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Gourcuff, l’homme qui marche seul
Auteur d'une sortie remarquée, ce samedi, face à Nice, Yoann Gourcuff aura, encore une fois, plus marqué les esprits par une énième blessure que par son talent. Avec en point d'orgue, son auto-remplacement. Une folie.
La scène est incroyable. Face à Nice, ce week-end, peu après le retour des vestiaires, Yoann Gourcuff boitille après une frappe qui s’est envolée dans les tribunes de Gerland. Visiblement blessé, le milieu de terrain lyonnais ne fait pourtant pas venir les soigneurs. Il continue à marcher, seul, sans un mot, avant de rentrer dans le tunnel direction les vestiaires. Sur son passage, Nabil Fekir et Hubert Fournier tentent vainement de savoir ce qui ne va pas. Mais Yoann semble s’en foutre, il a pris sa décision, son match s’arrête là, à la 47e minute de jeu. Sur le terrain, le jeu continue et l’OL évolue à dix, dans l’incompréhension. Finalement, il faut attendre trois minutes pour voir Yattara faire son entrée sur la pelouse, à la place d’un Gourcuff déjà loin. Du jamais vu.
Un cas gênant
Yoann Gourcuff est bon. C’est un fait incontestable et, d’ailleurs, personne ne le conteste. Seulement voilà, le talent n’excuse pas tout. Loin de là, même. Surtout quand on parle d’un joueur qui, en cinq saisons à l’OL, n’a disputé que 23 matchs dans leur intégralité. Depuis son arrivée en terres lyonnaises, c’est bien simple, le garçon culmine à plus de 600 jours d’indisponibilité. Derrière tout ça, le problème qui reste insolvable est de savoir qui, entre son physique et son mental, est responsable de tout ce gâchis. En tout cas, aux yeux de tous, le joueur ne semble pas donner les signes d’un homme prêt à tout pour donner le meilleur de lui-même et inverser une situation qui lui cause du tort. En février dernier, par exemple, Maxime Gonalons, capitaine de l’OL, se livrait sur le cas Gourcuff dans les colonnes de France Football : « Ce besoin d’être à 100% pour jouer est difficile à comprendre pour l’ensemble de l’équipe » .
Preuve, s’il en fallait, que l’ancien Bordelais est un cas épineux au sein même de son propre vestiaire. Au vrai, personne ne semble comprendre ce joueur qui n’a jamais paru tant isolé, comme perdu au milieu des autres, dans un monde professionnel qui ne le comprend pas. Ou qu’il ne comprend pas. S’il a besoin d’être tout le temps à 100% pour jouer, il est normal de ne le voir tâter le cuir que de temps en temps, au gré de ses envies, lorsque son corps fragile décide enfin de lui foutre la paix. Sauf que même ça, c’est difficilement compréhensible pour les autres. La douleur fait partie du quotidien d’un sportif de haut niveau et il faut la surmonter, la dépasser, surtout dans un sport collectif où l’intérêt concerne tout un groupe. Toujours dans les colonnes de France Football, Maxime Gonalons confiait « avoir tout le temps mal » , mais qu’il jouait quand même. Deux visions différentes du football, en somme.
Un joueur nécessaire
Disons-le haut et fort : Yoann Gourcuff adopte, dans un sport collectif, un comportement purement égoïste, et c’est en ça que son attitude est gênante, voire néfaste pour le reste du groupe. Ce week-end, face à Nice, ce n’est pas tant sa blessure qui est problématique, c’est uniquement le fait qu’il est sorti du terrain sans rien dire à personne. Comme si, finalement, il était le seul concerné par ce qui lui arrivait. Alors que derrière, ce sont ses coéquipiers qui se retrouvent en infériorité numérique pendant trois minutes, avec un Yattara qui n’était pas prêt à entrer. Le plus fou restant peut-être le fait de ne même pas prévenir son coach de sa blessure. Ce dernier, à l’issue de la rencontre, a lâché un laconique : « Il est sans doute blessé, s’il est sorti. » Reflet, encore une fois, d’une incompréhension entre le joueur et le reste du groupe. Bien entendu, la situation est dommageable pour les deux parties. En fin de contrat en mai prochain, Gourcuff est d’ores et déjà à la recherche d’un nouveau club, sauf si, retournement de situation exceptionnel, l’OL décidait de le prolonger, et avec ce genre de comportement, on ne peut pas dire que le milieu de terrain donne envie aux clubs intéressés de se pencher plus sérieusement sur son cas.
D’un point de vue personnel, l’ancien Milanais ne renvoie pas une image très positive de sa propre personne. Mais la situation est surtout compliquée à gérer pour l’Olympique lyonnais, car malgré ses absences répétées, Gourcuff est fort quand il joue. Très fort, même. Quand il est associé au duo Lacazette-Fekir, c’est bien simple, l’OL gagne. Le trio a été aligné cinq fois cette saison pour autant de victoires. Avec le Breton titulaire, il est donc évident que l’OL est plus fort, plus serein. Et à huit matchs de la ligne d’arrivée, la présence de Gourcuff dans les rangs lyonnais pourrait être primordiale pour tenter d’aller chercher un titre encore à leur portée. Sauf qu’à ne pas sanctionner le joueur après un tel comportement, il se pourrait qu’Hubert Fournier perde en crédibilité. Si personne n’a encore tous les éléments en main pour juger définitivement cette affaire, il n’est pas à exclure que Gourcuff ait disputé ce week-end son dernier match avec l’OL. Un beau gâchis en perspective.
Par Gaspard Manet