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Gourcuff, le grand huit

Par Serge Rezza
Gourcuff, le grand huit

À peine le temps d’évoquer le retour de flamme qu’un nouveau coup de latte vient frapper Gourcuff : une blessure, la sixième en deux ans, et une indisponibilité pour au moins les deux prochains mois. Mais quelle est donc cette poisse qui lui colle au maillot ?

On ne l’a jamais rencontrée, on ne sait rien d’elle, mais elle a plutôt bon goût. La seule liste des joueurs qui ont fini entre ses mains suffit à s’en convaincre : Marco van Basten, Michael Owen, Abou Diaby ou encore Chelito Delgado. On peut la trouver collante, le plus souvent usante, la poisse n’en reste pas moins une esthète de première. Et c’est quand on la croit sortie du circuit qu’elle revient pour frapper un grand coup. On en tient pour preuve le dernier en date, Yoann Gourcuff et sa sortie le genou droit en vrac samedi dernier après quinze minutes de jeu face à Troyes. La faible intensité du choc face à Nivet laissait penser qu’il y avait plus de peur que de mal. Jusqu’à ce que le diagnostic tombe lundi dernier : entorse du genou droit, soit six semaines à trois mois d’indisponibilité.

Yoyo, jouet du destin ?

À première vue, peu de chances de se planter : avec six blessures au compteur depuis son arrivée à Lyon, Gourcuff s’impose quand l’un des plus fidèles abonnés à la poisse. D’autant que cette fois, tout était en place pour sonner le retour en grand du meneur de jeu lyonnais : Une de L’Équipe titrant le jour même sur Le bel été de Gourcuff, comm’ qui survend la rédemption depuis le site internet du club – « J’ai trouvé la force de revenir grâce à vous et à votre soutien. Ensemble, nous vivrons une belle saison. » – et volonté manifeste d’en faire le cœur du jeu lyonnais dans le 4-2-3-1 nouveau genre. À quelques semaines des deux premiers matchs officiels de l’équipe de France, Deschamps pouvait lui aussi reprendre les affaires là où Blanc les avaient laissées, avec ce mélange d’attention toute particulière et l’envie de préserver le bonhomme : « Avec tout ce qui s’est passé, je préfère le laisser revenir tranquillement à son meilleur niveau. » Le passage d’un 4-4-2 mollasson à un 4-2-3-1 plus convaincant en cours de partie face à l’Uruguay laissait entendre qu’il y avait de la place pour ponctuer le retour de flamme sous le maillot bleu.

Jusqu’à ce coup d’arrêt samedi dernier qui est venu poser la question : n’en a-t-on pas trop fait avec Gourcuff ? Ou du moins, ne l’a-t-on pas amené à trop en faire ? C’est l’écho qu’a pu avoir après coup cette confession lâchée par Lacombe avant le match face à Troyes : « Il faut que Yoann se gère un peu mieux. Il est très exigeant avec lui-même dans sa préparation athlétique, il lui arrive d’être un peu inquiet, mais il ne faut pas qu’il en fasse trop. C’est ce que je lui ai dit il y a quelque temps : « Gardes-en un peu… » » (L’Équipe) De quoi en tirer deux convictions. La première, Nanard possède toujours ce flair pour sentir les choses avant les autres. La seconde, la blessure de Gourcuff n’est peut-être pas seulement due à la poisse et au hasard. Tests physiques explosés à Tignes, joueur le plus aligné pendant les matchs de préparation, des performances menées pleine caisse pour les trois premiers matchs officiels de la saison quand le reste de l’équipe répète qu’il faut encore digérer les efforts consentis depuis la reprise : Gourcuff en a fait plus que les autres. Sans doute n’avait-il pas vraiment le choix, à la fois pour satisfaire l’envie d’un retour tant attendu par toute la France du foot et pour ne pas se voir renvoyé plus longtemps au dernier coup de latte en date, ce passage sans lendemain par l’équipe de France la veille de l’Euro.

Montée en surrégime

À sa manière, cette blessure est venue rappeler tout le malentendu qui entoure la carrière de Gourcuff depuis quelques mois : celle d’un joueur auquel on demande le retour à la splendeur de ses années girondines, histoire de se convaincre qu’on n’a pas complètement rêvé son talent. C’est l’histoire de la fin de saison dernière où, le temps d’une finale de Coupe de France, le souvenir fonctionne à plein devant sa gestuelle irréelle. C’est l’histoire de ce « bel été » qui ravive un autre souvenir, celui d’un volume de jeu au-dessus de la moyenne qui permet à chaque porteur de balle d’avoir son Gourcuff à moins de dix mètres. Deux fois, les tentatives finiront dans le mur.

Du coup, il y a plusieurs façons de lire la trajectoire de Gourcuff. Celle d’un joueur qui a peut-être bien perdu son mojo, ce qu’il avait annoncé à sa manière la saison dernière alors qu’il tentait un premier retour : « Après mon opération de la cheville, il y a peut-être des mouvements que je ne pourrai plus jamais refaire. » Une autre façon consiste à considérer Gourcuff comme un phénomène sans lendemain, une sorte de Linsanity avant l’heure pour un joueur dont on aurait dû situer plus tôt le talent à sa juste mesure. Après le départ de son père, ses formateurs à Rennes se sont déjà divisés à son sujet. Le Milan Lab le juge trop tendre pour avoir un jour l’étoffe des héros rossoneri. Sous Domenech, certains cadres des Bleus cachent à peine leur scepticisme – Henry, Ribéry, Malouda faisaient partie de ceux-là. Dernièrement, Juninho en a remis une couche dans France Football : « Il a de la qualité, mais je trouve qu’il a été surévalué. (…) Pour moi, il n’est pas très rapide et il ne voit pas le jeu suffisamment vite, car il garde trop le ballon et ne joue pas à une touche. » On peut toujours voir dans les blessures et coups de spleen à répétition de Gourcuff une histoire du foot moderne qui perd les plus fragiles d’entre les joueurs, largués sous la pression et les montagnes de frics qui vont avec – transfert à 27 millions et salaire annuel autour des 4 millions. Certains ne s’en sont jamais remis (Sebastian Deisler), d’autres remontent la pente comme ils peuvent (André-Pierre Gignac). On peut y lire une autre tentative, celle d’un type qui n’a jamais cessé de justifier son talent partout remis en question, quitte à y laisser une cheville, un ligament interne ou quelques bleus à l’âme. Faire le grand huit avant de l’être. Autant dire, un sacré client pour la poisse.

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