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Girondins : le grand bazar avant le retour du foot
Nouvel entraîneur, nouveau directeur sportif, nouveau championnat, nouvelle équipe... Beaucoup de nouveautés, mais c’est toujours le bordel aux Girondins, sur fond de tensions entre groupes de supporters et d’absence de dialogue entre salariés et direction. De quoi faire un petit point avant leur début de saison, placée sous le signe de l’amateurisme à tous les niveaux.
Après un été bien orageux, les Girondins de Bordeaux vont faire leur rentrée, comme tout le monde. Comme les millions d’élèves qui repartiront dans les classes lundi matin, les Bordelais auront cette petite boule de stress accrochée au ventre. Pour cause, eux aussi s’apprêtent à faire un saut dans l’inconnu, en commençant cette saison de National 2 avec un effectif totalement remanié, rapiécé même, le tout sous la houlette d’un nouvel entraîneur, Bruno Irles.
"Redonner des sourires". Les premiers mots de Bruno Irles, nouvel entraîneur des #Girondins #N2 pic.twitter.com/jHbiw6KhuU
— Sud Ouest Girondins (@SO_Girondins) August 28, 2024
Pourtant, après l’annonce de la rétrogradation en N2 par la DNCG en août, c’était bien Erwan Lannuzel, entraîneur de la réserve, qui était annoncé sur le banc de l’équipe au scapulaire. Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, les dirigeants bordelais, malgré le placement de leur club en redressement judiciaire, ont réussi à trouver de l’argent pour recruter un nouveau coach, tout en bénéficiant du coup de main très étonnant de John Williams, fan des Girondins mais aussi directeur sportif d’Amiens (accessoirement). Problème : ces nouvelles embauches passent mal pour les membres du personnel bordelais, à l’heure où plusieurs d’entre eux vont perdre leur travail.
Redressement judiciaire, petites annonces et Monaco
Les salariés girondins se demandent en effet comment une institution se trouvant en redressement judiciaire et croulant sous 118 millions d’euros de dettes peut avoir le budget pour de telles dépenses. Ceux-ci se sont exprimés au travers d’une lettre envoyée par le Conseil social et économique du club au tribunal de commerce de Bordeaux en début de semaine. Le personnel bordelais a ainsi déploré le manque d’information de la part de la direction, et a fait part de son étonnement sur le renouvellement du staff : « Comment justifier de telles embauches/dépenses alors que des dizaines de personnes vont être licenciées et qu’il existe à l’évidence des ressources internes permettant de faire fonctionner le club et de répondre à ses besoins immédiats ? »
Le recrutement de nouveaux salariés en plein redressement judiciaire est loin d’être la chose la plus folle qui est arrivée à Bordeaux en cette fin d’été. Bruno Irles, le nouvel entraîneur, aurait pu ne pas venir en Gironde… faute de logement. « J’étais en contact avec Bruno Irles, car je le connaissais avant qu’il signe à Bordeaux, raconte Jérémy Berrié, supporter bordelais qui s’est transformé en agent immobilier le temps de quelques heures. Il y avait une condition que le club ne pouvait pas remplir, c’était de lui trouver une location. Sachant qu’il ne restait plus que quelques jours pour faire un mercato, je me suis engagé à lui trouver un logement via mon petit réseau. C’est en très bonne voie, je l’ai notamment mis en contact avec quelqu’un qui a joué avec lui au centre de formation de l’AS Monaco. Pourtant, tout club professionnel (même si on a perdu ce statut) est censé trouver une location et une voiture à l’entraîneur. Ce n’est pas tout le temps le cas, mais c’est la coutume. En l’occurrence, pour Bruno Irles, le club n’a trouvé ni l’un ni l’autre. »
Le cirque bordelais
Ce manque absolu de professionnalisme s’est fait ressentir jusque dans le mercato bordelais. Le club s’y est pris au dernier moment pour bâtir son effectif de National 2, le poussant à demander précipitamment des contrats à la Ligue… et à annoncer des signatures qui n’ont jamais eu lieu, comme celle de Steve Mvoué. Les Girondins ont quand même fini par boucler un effectif pour commencer la saison, et devront ainsi compter sur une équipe inédite, composée de jeunes courageux et de vétérans qui rechaussent les crampons, comme Paul Baysse et Rio Mavuba.
Mise en place avec aujourd'hui une équipe "N2" : Diabaté- N. Fofana, Grillot, Sané, Trichard – Bonte, Louveau, Diaby, Grain – Noc, Merdji #Girondins https://t.co/QRXV6QgY1M
— Sud Ouest Girondins (@SO_Girondins) August 29, 2024
Mais la situation au Haillan reste un véritable foutoir, la faute à une direction toujours muette, notamment envers ses salariés. Face à cette gestion catastrophique, Jérémy Berrié, qui se présente comme un supporter bordelais non affilié à un groupe ultra, a décidé d’organiser avec Djino Forté, un autre supporter, un rassemblement aux alentours du Parc Lescure, le dimanche 1er septembre, pour appeler à la démission de Gérard Lopez. « Des groupes de supporters bordelais venant d’un peu partout en France ont répondu à l’appel, comme le nouveau groupe le Kop 33 ou les North Gate Bordeaux, expose Berrié. On a invité tout le monde pour ce rassemblement, car on prône un message d’unité et de renouveau. On a aussi invité les Ultramarines, mais leur direction ne nous a pas répondu. Ils organisent un rassemblement la veille pour le match contre Poitiers, alors qu’il est à huis clos, et qu’ils savaient qu’on allait organiser cet évènement dimanche, donc c’est un peu dommage. » De quoi rappeler que si le désamour entre les ultras et la direction est acté depuis longtemps, celui entre les différents groupes de supporters est lui aussi toujours d’actualité.
Viens chez moi, j’habite chez un voisin
Car si les Girondins signent leur retour à la compétition ce samedi face au Stade poitevin au stade Sainte-Germaine du Bouscat (Gironde), les supporters bordelais devront suivre ce premier match en N2 à la télévision (sur TV7). La raison ? Face aux tensions existantes entre les deux principaux groupes ultras, les Ultramarines et la North Gate, le club bordelais a demandé que le match se déroule à huis clos. Une décision logique d’après Philippe Fargeon, ancien joueur des Girondins devenu adjoint à la mairie du Bouscat : « Le stade Sainte-Germaine est géré par la ville de Bordeaux, mais il est sur la commune du Bouscat, et nous n’avons pas les moyens d’assurer une sécurité optimale. En revanche, il va falloir trouver une solution rapidement pour les Girondins parce qu’ils ne vont pas pouvoir continuer à jouer à huis clos. »
De quoi rappeler que si la reprise du dialogue entre les groupes ultras bordelais est une nécessité, trouver un stade pour les Girondins en est une autre. Car si le Bouscat peut dépanner un temps, il n’est pas fait pour accueillir des dizaines de milliers de supporters, et il est surtout l’antre du club omnisports du Stade bordelais, qui avertit que ses installations sont déjà saturées. Les Girondins doivent donc trouver une solution avec SBA, l’exploitant du Matmut Atlantique, pour retourner sur ses terres. Pour finir, les Girondins abordent cette saison en N2 avec un objectif en tête : remonter la pente, tant sur le plan sportif que social. « Il va falloir reconstruire le club, résume Fargeon. Je trouve que les socios ont pris de bonnes initiatives, et il y a également beaucoup d’entreprises locales qui montrent leur intérêt pour un nouveau projet pour les Girondins. En tout cas, le départ du président aujourd’hui est plus que souhaitable. » La saison promet d’être longue à Bordeaux.
Par Jules Reillat
Propos de Jérémy Berrié et de Philippe Fargeon recueillis par JR