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Giovinco, loin des yeux, près du cœur ?
Barré par la concurrence à la Juventus, Sebastian Giovinco avait préféré s'exiler en MLS au début de l'année 2015, en dépit de nombreuses offres en Europe. Un choix qui avait alors fait jaser nombre d'observateurs. Mais un peu moins d'un an plus tard, la Formica Atomica (fourmi atomique en VF) est en passe de gagner son pari. Intraitable avec Toronto, Giovinco impressionne de l'autre côté de l'Atlantique. Au point de prendre le bon wagon pour l'Euro avec la Nazionale ? Peut-être bien…
Il n’aura fallu à Sebastian Giovinco que sept mois pour entrer par la grande porte dans l’histoire de la Major League Soccer. Arrivé à Toronto en janvier dernier, le petit milieu de terrain (1,64m) a déjà affolé les compteurs outre-Atlantique. Le 26 septembre dernier, lors de la réception du Chicago Fire (3-2), il est ainsi devenu le premier joueur de la Ligue nord-américaine à atteindre les 20 buts et 15 passes décisives sur une seule saison. D’un superbe extérieur du pied droit, la fourmi atomique est même allée chercher le petit filet opposé dans un angle incroyable. Un but génial, qui suffit à synthétiser la saison du milieu de terrain, qui a régalé son public de gestes vifs, de frappes chirurgicales et de tirages de langue. Des prestations qui n’ont pas échappé au sélectionneur italien Antonio Conte qui l’a toujours tenu en haute estime. Pour preuve, Giovinco faisait bien partie de la dernière liste du technicien transalpin fin août. Une convocation qu’il n’a toutefois pas pu honorer en raison d’une gêne aux adducteurs. Mais qu’importe. Selon toute vraisemblance, le petit Sebastian sera à nouveau appelé par Conte ce samedi soir, pour affronter l’Azerbaïdjan et la Norvège les 10 et 13 octobre prochains. La fourmi a peut-être bien fait son trou.
Le petit protégé de Conte
Certes, un trou friable et loin d’être définitif, mais un trou bien au chaud pour le moment. Car Antonio Conte ne peut ni ignorer les énormes prestations de Giovinco avec Toronto, ni le besoin criant de cartouches offensives pour la Nazionale. D’autant plus que les qualités de percussion du petit Sebastian ne courent pas franchement les rues en Squadra Azzurra, comme Andrea d’Amico, son agent, en fait le constat : « Je pense qu’il y a vraiment très peu de joueurs comme Giovinco en Italie. Il n’y a quasiment plus de joueurs italiens avec ses caractéristiques et son profil. » Très juste. Les récentes titularisations d’un Stephan El Shaarawy pas franchement au top de sa forme en sont d’ailleurs un signe évident. Andrea d’Amico fait toutefois preuve de mesure : « D’après moi, oui, Sebastian a de bonnes chances d’être convoqué pour l’Euro, sans manquer de respect aux décisions de Conte. Mais il y a encore beaucoup de temps jusque-là, et il faudra voir la forme des joueurs d’ici quelques mois. » Car entre un Insigne qui monte en puissance avec le Napoli, et un Candreva toujours solide en Nazionale, la fourmi atomique devra jouer des coudes pour assurer sa petite place.
Mais un élément pourrait bien consolider le frêle édifice : l’estime indéniable d’Antonio Conte. Andrea D’Amico abonde : « Sebastian n’a jamais eu peur de ne plus être convoqué enNazionale, parce qu’il sait que Conte connaît très bien ses qualités et ses caractéristiques. Antonio n’a jamais caché son estime pour Sebastian. Il l’a voulu à la Juventus et il l’a d’ailleurs convoqué enNazionaledans sa dernière liste (en août). » Une convocation que Giovinco avait alors avoué espérer aux micros de Sky Sport : « Je ne m’y attendais pas, mais je l’espérais au vu du boulot que je suis en train de faire (à Toronto). » Conte ayant donc fait fi du départ en MLS de son ancien protégé. À raison ? Sans doute, car l’époque où la Nazionale remportait la Coupe du monde 2006 avec 23 joueurs de Serie A, semble largement révolue. La progression de la Squadra Azzurra passant certainement aussi par le départ de certains éléments à l’étranger, comme c’est par exemple le cas pour Matteo Darmian ou Marco Verratti. Reste à savoir si la MLS entre dans le panel de destinations prises en considération.
Une fourmilière plus appropriée
Car il faut bien le dire, en janvier, une grande majorité des amateurs de football remettaient en cause le choix de Giovinco. Le voir partir en MLS alors même qu’il avait quelques touches sur le Vieux Continent, à Lyon, par exemple, a surpris et déçu de nombreux observateurs. Pour son agent, Andrea d’Amico, rien de surprenant : « Sebastian a choisi d’aller à Toronto, car c’était le projet le plus intéressant et celui qui lui plaisait le plus. Beaucoup savent aussi que le championnat nord-américain devient de plus en plus important, aussi bien pour les joueurs que pour son intérêt international. » Mais malgré son expansion constante et régulière, il est certain que la Major League Soccer a encore beaucoup de chemins à parcourir pour rivaliser un jour, avec les championnats européens. Une réalité dont Sebastian lui-même a conscience. « Le foot au Canada ? C’est un foot un peu bizarre, mais divertissant. Il y a beaucoup d’espaces, le niveau n’est pas encore égal à celui en Italie ou en Europe, mais il y a énormément de marge de progression » , expliquait-il ainsi à Sky Sports en août dernier. Un écart de niveau qui se joue principalement sur les postes défensifs. Outre-Atlantique, la fourmi ne s’est pas frottée uniquement à de grands défenseurs et gardiens, loin de là…
Outre un football différent, Sebastian a surtout découvert au Canada une mentalité aux antipodes de celle qu’il connaissait en Italie. Et c’est peut-être ce dont il avait besoin pour retrouver le niveau affiché un temps du côté de Parme. Le 13 juillet dernier, alors qu’il vient d’inscrire un triplé contre New-York City, il explique au Guardian ce changement salvateur : « La différence avec l’Italie, c’est qu’ici je peux passer du temps avec ma famille et mes amis. Après l’entraînement, je peux aller faire une promenade, manger une glace, faire du shopping et des autres choses dans le genre. Et quand ça m’arrive d’être arrêté par des tifosi, ils sont toujours respectueux et pas agressifs. C’est un style de vie différent et je l’apprécie vraiment. » Aussi le petit milieu de terrain s’est libéré de la pression dantesque dont il s’accablait à chacune de ses apparitions avec la Juve : « Je me sens mieux en général, et je joue beaucoup mieux que je ne le faisais en Europe » , résume-t-il simplement.
Pas de prêt en Europe à la trêve, a priori
Une qualité de vie retrouvée, un niveau de jeu impressionnant… Pour l’instant, rien ne pousse le milieu de terrain à traverser l’Atlantique à nouveau. « Je ne pense pas qu’il sera prêté pendant la trêve en MLS. Il ira simplement en vacances. Franchement, c’est une idée qu’on n’a jamais prise en considération. Sebastian est concentré sur sa saison avec Toronto. Ça n’aurait pas de sens de penser à revenir en Europe » , confie son agent, Andrea D’Amico, qui assure que son joueur est concentré à 100% sur la fin de saison de Toronto. « Pour le moment, le plus important pour lui est de faire de bonnes prestations avec Toronto, de chercher à se qualifier en play-offs, de terminer la saison de la meilleure manière possible avec Toronto » , abonde-t-il, en précisant que l’Euro est effectivement « un objectif important » pour Sebastian. Malgré la distance, la fourmi atomique espère bien venir en France, cet été. Pour prouver que son choix n’était pas si mauvais. Et puis, comme l’explique Andrea : « Sebastian a toujours été confiant en ses qualités. Il n’a jamais vraiment douté. »
Par Eric Marinelli et Gabriel Cnudde