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Ghana-Algérie : clash des (tiers-)mondialistes !
Un sommet continental comme on les aime, avec deux équipes comme on les aime. Le Ghana mal parti joue gros ce soir. L'Algérie aussi. Et la CAN aussi…
Ah ! Le Ghana et l’Algérie… L’Afrique noire subsaharienne, chrétienne (à 73 %) et anglophone, d’un côté. L’Afrique maghrébine, musulmane et francophone de l’autre. Deux grandes nations du « Tiers-Monde » d’autrefois, marquées du prestige de l’Indépendance et initiatrices du Panafricanisme (le Ghana, d’abord). Les Blacks Stars et les Verts sont deux ténors du foot africain qui ont brillé de concert sur le continent et en Coupe du monde, pourvoyeurs de grands joueurs et dépositaires reconnus d’un jeu offensif, tactiquement mieux discipliné côté ghanéen et techniquement plus relevé côté algérien. Bref, une belle opposition de styles qu’on attendait depuis le tirage, suite au Mondial brésilien où ceux du Nord sont brillamment parvenus en 8e (battus par le futur vainqueur, l’Allemagne, 1-2 a.p) et où ceux du Sud ont gâché l’accession en 8e malgré un match merveilleux contre cette même Allemagne (2-2)…
Réveil ghanéen ?
« Gâchis » ghanéen, à cause de ce sempiternel complexe de supériorité qui habite les Blacks Stars : géniaux face à la Mannschaft, mais après avoir foiré le match d’ouverture face à des USA pas supérieurs (1-2). Lundi après-midi, même présomption coupable face au Sénégal : la bande des frères Ayew n’a pas trop cherché à bonifier l’avantage de 1-0 acquis sur un péno d’André. Pire ! Les Ghanéens ont reculé (1-1), puis très logiquement cédé sur un but perforateur de Moussa Sow en toute fin de match (1-2 à la 93e). Et voilà le Ghana condamné à une victoire quasi obligatoire face à une Algérie victorieuse ensuite de l’Afrique du Sud (3-1). Mathématiquement, en cas de défaite à Mongomo, les hommes d’Avram Grant seraient éliminés si dans le même temps le Sénégal ne perdait pas contre les Bafana Bafana… Et pourtant, les Ghanéens étaient prévenus de la force collective des Lions de la Téranga ! Mais, non : ils se sont un peu trop vite focalisés sur l’Algérie, supposément favori du groupe et de la compétition. À leur décharge, ils étaient privés de deux tauliers de la sélection : le capitaine Asamoah Gyan et John Boye, brusquement atteints de paludisme à leur arrivée en Guinée équatoriale. Gyan, leader emblématique, devrait pouvoir jouer ce soir, mais on peut spéculer sur son réel état de forme. Question : le Ghana peut-il « le faire » ? Oui, bien sûr. À condition, déjà, de disputer un match plein et intense, comme contre l’Allemagne à Fortaleza et d’assumer la possession au lieu de l’abandonner à l’adversaire (voir leur deuxième mi-temps contre le Sénégal). Ceci dit, grâce à leur grande expérience tactique et leur patience pleine de sang-froid, les Black Stars savent aussi très bien se sortir des matchs fermés sur un contre à deux joueurs maxi, sur une frappe lointaine, sur un exploit personnel ou sur un bon centre ou coup de pied arrêté avec « Dédé » Ayew à la réception… Le Ghana sait tout faire et peut très bien décrocher un bon 1-0 tardif. Et comme, en général, les Ghanéens répondent présent dans les grandes occasions, ils devraient pouvoir conserver leurs chances de qualif, le nul face à l’Algérie n’étant même pas éliminatoire.
L’Algérie, pour Gourcuff…
L’Algérie est doublement avertie, avant de jouer des Ghanéens revanchards et surtout après avoir vu la mort en face contre une surprenante Afrique du Sud, agréable révélation du tournoi sur le plan du jeu jusqu’à maintenant. Allons à l’essentiel : bien partie pour se faire « bafaner » , l’Algérie malmenée 0-1 a gagné au charisme. Phénomène courant en sport : souvent le challenger ne réalise pas qu’il peut VRAIMENT battre le favori jusqu’à en « oublier » de gagner. Pourtant ultra dominateurs (1-0), les Bafana Bafana ont subitement plongé après que Rantie a manqué son péno à la 53e. Le calme terrifiant de M’Bolhi, héros impérial de la partie, explique grandement l’échec fatal de Rantie. L’Algérie s’est aussitôt ressaisie et a ensuite déroulé, puis logiquement gagné 3-1 comme un grand leader sait le faire. Ce qui a vite sauté aux yeux, ce fut l’asphyxie précoce et prévisible d’Algériens « de France » , étouffés par la chaleur et l’humidité équatoriales. La lenteur de leurs déplacements et de leurs replis défensifs a créé des espaces trop facilement exploités par des adversaires vifs et superbement techniques. Outre les latéraux Mandi et Ghoulam en difficulté, c’est l’axe défensif algérien qui a pris l’eau. Au milieu, les deux récupérateurs du 4-2-3-1, Lacen et Bentaleb, ont souffert, tout comme la lourde charnière Halliche et Medjani trop souvent prise dans son dos par les attaquants sudafs. Brahimi a aussi déçu, tout comme Mahrez, devant. D’où le coaching avisé de Christian Gourcuff qui, après l’égalisation, a fait entrer les trépidants Belfodil et Taïder en lieu et place de Mahrez et Lacen (60 et 64e).
Contre le Ghana, on s’attend donc à du changement au milieu et en défense centrale, avec le retour très probable de Bougherra. La prestation des Verts cet après-midi dépendra d’abord d’une bonne condition physique. Dans le cas contraire, M’Bolhi ne pourra pas jouer une seconde fois le Sauveur de la patrie et préserver une équipe algérienne sur le reculoir ou éparpillée. Face au Ghana, que les Verts ne comptent pas non plus sur les largesses défensives offertes par l’Afrique du Sud. Enfin, Brahimi devra se mettre au diapason de Feghouli, une des rares satisfactions du premier match, et les milieux devront vite trouver les attaquants en brisant le blocus défensif qui a trop privé Slimani de ballons. L’Algérie est bien partie, mais les choses sérieuses commencent vraiment : après le Ghana, pointe le redoutable Sénégal qui pourrait se qualifier dès ce soir en cas de victoire face aux Bafana Bafana. On attend donc beaucoup de ce Ghana-Algérie, censé ranimer la flamme d’une CAN 2015 qui n’a pas encore trop décollé. Hier soir, tout le camp algérien s’est resserré autour de Christian Gourcuff endeuillé par le décès de sa mère. Les Verts joueront aussi pour lui ce soir à Mongomo.
Par Chérif Ghemmour