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Bordeaux et Gérard Lopez sans filet
À moins d’un miracle, Bordeaux se rapproche inexorablement d’une rétrogradation en National 1 après l’échec des négociations avec le groupe américain Fenway Sports Group ce lundi. La faute, en grande partie, à son président et propriétaire depuis 2021, Gérard Lopez, spécialiste pour couler les entreprises sportives qu’il possède, et qui doit maintenant trouver une solution pour sauver les Girondins.
« Le club est sauvé », clamait Gérard Lopez en juillet 2021 après avoir racheté les Girondins de Bordeaux au groupe américain King Street, actionnaire du club durant trois saisons. Trois ans après ces belles paroles, le monument bordelais est au bord du précipice, rétrogradé en National 1 à titre conservatoire par la Direction nationale de contrôle de gestion et qui doit trouver une quarantaine de millions d’euros pour sauver ses finances, et donc sa peau. Ce lundi, une de ses dernières chances est tombée à l’eau : Fenway Sports Group ne rachètera finalement pas le club de Ligue 2, malgré des semaines de négociations et un passage en commun devant la DNCG, le 9 juillet. Le groupe américain, propriétaire de plusieurs clubs dans différents sports dont Liverpool, a décidé « de ne pas donner suite aux discussions » en raison du « coût important du stade dans les années à venir, mais aussi par le contexte économique général du football français », peut-on lire dans un communiqué.
Désormais, le club, 12e de l’exercice 2023-2024 de Ligue 2, met « toute [son] énergie à la finalisation d’un plan de financement » avant de repasser en appel devant la DNCG le 23 ou le 24 juillet, selon Sud-Ouest, mais le risque de dépôt de bilan est plus que jamais réel, si aucun argent n’est injecté dans les comptes du club, par un rachat… ou par Gérard Lopez lui-même. Tel un capitaine qui sombre avec son navire, l’homme d’affaires de 52 ans pensait presque jusqu’au bout pouvoir éviter de céder la majorité de ses parts. Il avait alors d’abord cherché – et trouvé – un investisseur minoritaire, avec le fonds étasunien Sixth Street, qui possède déjà des parts au FC Barcelone ou encore en NBA chez les Spurs de San Antonio, et proposait une offre de « 100 millions d’euros sur six ans sous forme de dette », selon France Bleu Gironde. Mais voyant l’opération stagner, Gérard Lopez – qui avait déjà refusé une offre du propriétaire de Chelsea, BlueCo, pour ne pas faire de Bordeaux un club satellite – s’était finalement rabattu sur une vente totale du club, qui n’aura finalement donc vraisemblablement pas lieu.
Un calvaire sans fin
Une situation funeste et une possible fin tragique qui pend malheureusement au nez de Bordeaux depuis des mois, voire des années. Fin juin, le club marine et blanc avait pourtant bénéficié d’une certaine clémence de la part du gendarme financier du foot français, obtenant un délai supplémentaire pour tenter de trouver des financements nécessaires au maintien de son équipe masculine dans l’antichambre de l’élite française. Un sursis qui n’a fait que repousser l’échéance tant redoutée par les supporters girondins. En janvier, le FCGB avait également vu sa masse salariale et ses indemnités de mutation encadrées. Mais surtout, le vent d’une rétrogradation a soufflé sur la Garonne dès 2022, seulement une saison après le rachat par Gérard Lopez. Après la décision de la DNCG confirmée en appel, les dirigeants bordelais « mécontents » avaient déposé un ultime recours, payant, auprès du CNOSF, le Comité national olympique et sportif français, dont l’avis favorable avait été finalement partagé in extremis par le comité exécutif de la Fédération française de football. Miracle : Bordeaux avait pu être réintégré en Ligue 2, quelques semaines après sa relégation sportive.
Afin d’éviter sa liquidation judiciaire, le FCGB avait également été soutenu par la métropole bordelaise, dont les élus n’avaient pas hésité à voter « l’étalement de la dette du club jusqu’à fin 2026 et celui des loyers du Matmut Atlantique ». L’avenir du stade bordelais est d’ailleurs lui aussi en suspens depuis l’annonce de la rétrogradation et de l’arrêt des négociations de vente. Citée comme l’un des freins à la transaction par Fenway dans le communiqué des Girondins, l’enceinte du club depuis 2015 coûte 4,7 millions d’euros par an, révèle Sud-Ouest, un prix impossible à assumer en cas de rétrogradation. Ce cauchemar porte un nom, aussi, celui de Gérard Lopez.
La responsabilité de Gérard Lopez
Depuis son arrivée dans le monde du sport, le dirigeant hispano-luxembourgeois joue avec le feu et l’argent, mais finit toujours miraculeusement, d’une manière ou d’une autre, par s’en sortir. La chute presque certaine de Bordeaux était donc prévisible, même si certains ont voulu faire croire (ou voulu croire) qu’il était une bénédiction pour les Girondins. Il n’en est pourtant pas à son coup d’essai en matière de fiasco financier. La liste est longue, trop longue : au LOSC, il aura laissé des dettes à hauteur de 200 millions d’euros, après avoir vu le club frôler la relégation ; même chose à Mouscron, où des emprunts ont fini par lui être refusés ; et encore pire en Formule 1, avec l’écurie Renault, dont il a été l’actionnaire majoritaire en se distinguant par des salaires versés en retard et en laissant Alpine, le nouveau nom, endettée. C’est ce qu’on appelle un récidiviste. Arrivé comme un sauveur à Bordeaux, Gérard Lopez n’est plus en odeur de sainteté depuis plusieurs mois. En novembre, 50 partenaires du club avaient notamment exprimé leur mécontentement et jugeaient le quinquagénaire comme « un bon actionnaire, mais pas un bon président de club », un avis partagé par les Ultramarines, qui ont longtemps défendu le grand manitou. La chute semble inéluctable, et le dirigeant se retrouve désormais face à ses responsabilités, ses erreurs, et c’est tout un club, des salariés aux supporters, qui craignent le pire désormais.
Bordeaux perd des points pendant que ses ultras se foutent sur la gueulePar Lucie Lemaire