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Galères de déplacements…

La Team Tribunes de So Foot
12 minutes
Galères de déplacements…

Se déplacer dans toute la France (et dans toute l'Europe) pour supporter tes couleurs amène forcément son lot de bons moments. Une victoire à la dernière seconde dans un derby, un voyage atypique avec tes camarades de tribune en Europe de l'Est… Mais aussi de nombreuses galères. Petit listing des évènements qui peuvent se passer lors d'un déplacement.

Se faire oublier sur une aire d’autoroute

La hantise de tous les enfants lors des grands départs en vacances. La phobie habite aussi un certain nombre de supporters français, ces accidents étant assez fréquents dans l’histoire d’un groupe. Il y a l’oubli volontaire, pour « rigoler » , quand on demande au chauffeur de fermer les portes et de mettre la première sans attendre Chonchon qui vient de taper plusieurs sandwichs Sodebo dans la station-service. Le car démarre, le copain court lamentablement en manquant la vautre et en agitant vainement les bras. Et il y a l’oubli involontaire, le pire. Ce moment où, pris de violentes crampes au ventre, tu te décides à passer un – trop – long moment aux toilettes. Quand tu sors de la station, le car n’est plus sur le parking. Instinctivement, tu penses à la mauvaise blague citée ci-dessus. Mais après avoir retourné toutes les cachettes possibles pendant 30 minutes, il faut bien que tu te rendes à l’évidence : ton groupe t’a oublié. Évidemment, toutes tes affaires sont restées à l’intérieur : pas de portable, de papiers et encore moins d’argent vu que tu n’achètes jamais rien dans ce genre d’endroits, trop chers ! Tu commences à avoir froid sans ton manteau aussi. Ton allure n’inspire pas confiance quand il faut quémender un « peu de crédit » sur le portable d’un(e) inconnu(e). Et puis bon, tu ne te souviens plus du tout du numéro de ton pote resté dans le bus. Plusieurs solutions s’offrent donc à toi :

– te faire prendre en stop par des automobilistes ou des gendarmes qui rattrapent le bus en très peu de temps. – te faire en prendre en stop par des automobilistes ou des gendarmes plutôt cools pour rattraper le bus alors que celui-ci a déjà fait demi-tour pour te récupérer. Bonne chance pour le retour ou pour demander à ton nouveau chauffeur de te déposer à Sochaux alors qu’il se rend à Lyon…- attendre sur l’aire d’autoroute. Un de tes camarades va forcément remarquer ton absence et le signaler au chauffeur pour qu’il fasse demi-tour. En revanche, tu vas prendre ton tarif pendant tout le reste du trajet. Surtout pour une histoire de toilettes.
– attendre. Jusqu’à comprendre que personne ne remarquera ton absence avant que l’euphorie générale ne redescende. Tu rentres en stop.

La garde à vue

Ce dimanche, c’est déplacement et tout indique que la journée va être sympathique. Tout le monde est là à l’heure pour le départ du car (une première !). Les locaux n’ont qu’à bien se tenir. Ton groupe impressionne, à l’extérieur. Malgré deux/trois chamailleries entre l’avant et l’arrière du bus (réglos les mecs), le trajet se passe tranquillement. Arrivé au stade, tu sens la police sur les dents. Apparemment, ça a chauffé en centre-ville, et les Bleus auraient aimé éviter ça. Tu connais la musique, pas de chichis et tout se passera bien. La fouille est sévère avec une double -palpation, mais un des tes potes a quand même réussi à cacher une torche, qu’il craque à l’entrée des joueurs. Des CRS vexés et bien décidés à remplir leur quotas interviennent direct en parcage pour le choper, car identifié à la vidéo. L’entrée est brutale et provoque, inévitablement, un mouvement de foule. Deux flics empoignent un membre de ton groupe de manière un peu trop musclée et, sans savoir pourquoi, tu t’approches. Trop peut-être puisque tu te prends un vilain coup de tonfa des CRS dans le dos. Après une mêlée et le chaos, tu te retrouves finalement plaqué à terre, le souffle coupé, plusieurs mains qui t’empêchent de bouger. En une minute, tu passes d’une tribune à un fourgon de police.

On te fait comprendre que tu es mal barré. Tu aurais frappé un flic, et tout aurait été filmé. Même discours de la part de l’OPJ (Officier de police judiciaire, ndlr) dans le commissariat où tu as été transféré. Tu sais que tu n’as rien fait, mais tu commences à douter, à maudire ton pote qui a craqué le fumigène. Pourquoi avec des flics autant sur les nerfs ? Et comment vas-tu expliquer ça au boulot ? T’avais une réunion lundi matin avec le responsable export de la boîte et tu vas pourtant le planter. Tu te mets même à penser : « Et s’ils veulent faire de moi un exemple ? » C’est d’ailleurs ce qu’on te répète depuis ton interpellation. Avouer pourrait « alléger le truc » , assure l’officier. La visite à l’hôpital sert de pause et de repos, un peu. À ton retour, le poulet basquaise servi est atroce puis, surprise, on t’annonce que tu vas sortir, les charges sont abandonnées. Tout heureux, tu récupères enfin tes affaires, refais tes lacets et te presses de quitter le commissariat. Dehors, une dizaine de mecs posés devant le commissariat te fixent. Flippé, tu songes même à retourner à l’intérieur. Mais tu reconnais finalement des visages familiers. Tes potes t’ont attendu et ça fait plaisir. Ça se serre la pince, ça s’embrasse (mais pas trop) et t’es tout fier de raconter que t’as résisté aux flics.

Se cramer la main avec un fumigène

Aujourd’hui, c’est « derby » . Près du stade, dans le bus, le groupe se répartit les trucs à passer lors de la fouille. Certains ont des bouts du message enroulés autour de leur taille, d’autres quelques pétards et toi, tu as l’honneur de devoir entrer un fumigène. La faute à tes chaussures creusées (c’est mieux qu’entre les fesses) et à ta gueule d’ange, à faire presque fondre un CRS. Et ici, surtout, la sécurité est beaucoup plus légère qu’à Bordeaux ou Lille. Descendu du bus, tu te diriges en direction des stadiers, au milieu du groupe. Pas question d’être dans les premiers – les flics sont très consciencieux – et encore moins dans les derniers. Trop louche. Pas question de s’écarter du groupe non plus, on ne sait jamais… Tu sens la pression monter, tes jambes tremblent légèrement, cette adrénaline, dangereuse et excitante, te fait suer. Dans la queue, tu aperçois que ton fouilleur fait retirer les pompes. Les autres CRS ont l’air de s’en foutre et il a fallu que tu tombes sur le seul qui fasse « bien » son taf. Ce n’est vraiment pas de bol. Tu as beau amadouer le dépositaire de la force publique en levant les bras comme un Top Chef, tu reçois un « Déchaussez-vous monsieur, s’il vous plaît » . Heureusement, une embrouille éclate sur une autre file. Ton salut, puisque ta fouille s’arrête là. Un coup de chance exceptionnel. Au coup d’envoi, tu te tâtes à cramer toi-même la torche. Quand tu repenses à ton simple état pour la faire rentrer… Mais bon, les caméras sont mal placées et tu remarques une sorte de perchoir pour t’installer. Avec un peu de chance, des gars prendront même une belle photo pour les forums spécialisés.

À l’entrée des joueurs, au milieu des cris et des chants, tu reçois le signal, sors de ta cachette avec un autre pull et une cagoule, et tu dégoupilles le fumi’. Mais ça foire direct. Patrice Carmouze. Tu pointes alors le bout de ta torche éteinte vers ce mec, à côté de toi, qui a réussi l’allumage de son fumi’. Tu as déjà vu cette technique sur Youtube. Quelques étincelles partent dans tous les sens, une flamme commence à naître mais ne prend pas correctement. La torche explose. Surpris et ensuite choqué, tu retires ta cagoule, ton sweat et tu jettes un coup d’œil sur l’état de ta main. Tu as tous tes doigts, mais des brûlures très sévères. La douleur fait son apparition, d’abord passable, pour devenir vite insupportable. Après un conciliabule entre potes, tu te décides à te faire soigner, quitte à manger une garde à vue derrière. Ta main est plus importante.

Autour des pompiers, tout le monde te taille. Et les flics ne croient pas à ta version d’un fumi tombé sur ton pull. Dans un élan de gentillesse (ou de pitié), ils te laissent partir tranquillement avec les secours. À l’hôpital, arrivé sur place, on t’annonce qu’on va devoir retirer certaines parties de peaux brûlées avec un scalpel, sans anesthésie. Et tu souffres déjà. Mais tu redoutes d’abord le supplice dans la salle d’attente des urgences : des personnes ivres, des schizophrènes, des dingues, des gosses qui hurlent. Tu deviens presque impatient à l’idée qu’on te charcute… Sur le billard, le docteur te fait mal, mais ça fait professionnel. Il te retourne la main dans tous les sens, vérifie l’articulation des doigts avant de te tartiner de Biafine et de te faire le pansement le plus moche du monde. Évidemment, le match est terminé depuis un bout de temps et le bus n’a pas pu t’attendre… Tu zones dans l’hosto le temps que le jour se lève avant de prendre un bus et de rejoindre la gare. Douloureuse passion.

Se faire gazer

La dernière fois que tu t’es retrouvé dans cette galère, tu pouvais fuir. C’était au lycée, lors d’une réforme étudiante. Un flic avait balancé la bombe en l’air. Tu te croyais plus fort que les autres, les yeux grands ouverts. Tu avais vite regretté. Là, tu n’as pas d’autre choix que de laisser ce truc t’enflammer les yeux. Tu pleures, tu te grattes – mauvaise idée – et tu hurles. Tu cours dans un sens, même si tu ne sais pas vraiment d’où vient la lacrymo. D’ailleurs, tu ne sais pas non plus pourquoi tu cours. Tu n’iras pas bien loin. Le parcage doit faire cinquante mètres à tout casser. Tu remontes ton écharpe pour te couvrir. Putain, tu vas en chier. Ça monte. Tu clignotes des yeux, comme Albert Cartier. Ça fait mal. Tu les gardes fermés. Les larmes coulent sans que tu ne puisses rien contrôler. T’as l’impression que du Tabasco sort de tes globes oculaires. Ça brûle. Quand, enfin, tu peux rouvrir les yeux, tu refais le film de ta soirée. On était dans le car. Jusque-là, tu t’en souviens. On est sorti du car. C’est bon. T’es rentré dans le parcage. Ok. Du coup, c’est pendant le match que tout a dégénéré. Tu vois un type balancer une bouteille sur la pelouse. Tu vois un but. Tu vois un mec grimper au grillage. Tu ne le connaissais pas. Tu tombes. Et là, c’est le bordel. Les CRS débarquent. Ces dix bonnes minutes écoulées t’ont paru être deux secondes.

Tu reviens à la réalité. Autour de toi, des yeux rouges et des mecs se versent des verres d’eau dans les yeux. Ça n’a pas l’air d’être la bonne solution. Les plus prévoyants dégainent le sérum physiologique. Oui, des gens prévoyants font aussi les déplacements, mais ne prêtent pas, même si t’es sûr qu’il en a plein les poches, ce mec prévoyant. Tant pis. Tu aurais fait la même chose. Finalement, le calme revient. Tu peux enfin retourner au match. L’arbitre siffle. Une fois. « Y a rien làaaaAAAAAA ! » Une deuxième fois. « Mais il est con, lui ou quoi ? » Une troisième fois. D’accord. T’as loupé la moitié du match. Super. Tu pourrais casser n’importe quoi, un grillage, une poubelle. Faut pas venir te chercher. Et tu te poses une question existentielle : a-t-on le droit au masque à gaz dans les stades ?

Pisser dans une bouteille dans le bus

Dans un bus traditionnel, la pause toilettes n’est jamais vraiment un problème. Elles sont parfois même à l’intérieur. La pause réglementaire des deux heures du chauffeur, ainsi qu’une certaine prévoyance, suffisant amplement à soulager jusqu’aux vessies les plus débordantes. Le bus de supporters est un peu différent. Déjà, rares sont les chauffeurs à ouvrir l’accès aux toilettes de leur véhicule. Surtout dans un car d’ultras. Les boissons sont éclusées au rythme d’une ripaille et peu savent bien viser. C’est enfumé. Bref, le bus, c’est l’appart’ d’un mec qui a décidé de le sacrifier pour une grosse soirée. Avec la queue au WC.À cette cadence, les deux heures en paraissent dix pour les petites envies. Le mental, lorsque les toilettes sont vraiment hors d’usage, est important, mais ne suffit pas tout le temps. Les embouteillages peuvent foutre en l’air toutes tes estimations. Et le chauffeur n’ouvrira pas la porte, juste pour toi, alors que son bus est sous escorte policière. Par chance, les bouteilles vides ne manquent pas. Par chance aussi, ton ivresse te désinhibe. Alors tu prends place dans l’escalier de sortie à l’arrière, tenant d’une main la bouteille, de l’autre ce qui peut l’être et, une minute durant, la nature reprend ses droits. Tu t’étonnes quand même à en remplir près d’un tiers, eu égard à ce que t’as mis à côté. Le chauffeur n’a pas toujours la conduite souple, surtout dans les bouchons. Tu rebouches et embarques ta bouteille. Et tu ne feras pas de mauvaise blague. Tu la jettes en descendant du car. Maintenant, tu sais que même si ça palpe sévère à la fouille, tu te tiendras tranquille jusqu’à la mi-temps !

Les autres galères de bus, et elles sont nombreuses

– La panne : la plus classique, la plus chiante. Après 6 heures de bruits suspects, une épaisse fumée blanche sort sous le capot de ton bus. Le chauffeur se gare en panique sur le bas-côté. Sur la bande d’arrêt d’urgence, c’est le bordel, même si une bonne âme essaie de faire régner un semblant d’ordre. Certains vont se balader dans la forêt bordant l’autoroute, d’autres sont partis chercher de l’aide à la prochaine station-essence 15 kilomètres plus loin et un gars refuse même de sortir du bus parce qu’il fait trop froid. Plusieurs solutions s’imposent : attendre l’arrivée d’un bus de remplacement et arriver à temps pour le match. Ou attendre l’arrivée d’un bus de remplacement, rater le match, faire demi-tour.- La panne… de clim’ : mi-août, direction le Sud de la France pour un déplacement chaud ! Dans tous les sens du terme. La clim’ souffre, avant de s’arrêter. Ça transpire non stop (surtout dans un espace clos avec 60 mecs à l’intérieur), ça s’embrouille pour un rien et ça se bat pour sortir se rafraîchir sur les aires d’autoroute ou avoir accès à la trappe du haut qui laisse passer un petit peu d’air… On s’en fout du match, des adversaires, on veut juste rentrer et prendre une douche. Bien fraîche. – Se tromper de chemin : pas banal, mais tu vis un grand moment de solitude quand tu remarques – évidemment souvent trop tard – que le chauffeur a renseigné la mauvaise adresse dans son GPS. Pour ton déplacement de Coupe de France, te voici à Montauban de Bretagne alors que le Montauban, dans le Tarn-et-Garonne, t’attend.- Se faire péter une vitre : un classique. Le match a été tendu, plusieurs projectiles ont été échangés entre les tribunes, et ton équipe a marqué un but hors-jeu à la 90e. Bref, tu t’attends à une sortie assez houleuse du parcage, et les flics, qui l’ont bien compris, mettent en place une escorte. Après 5 minutes de route, pas l’ombre d’un « ennemi » , mais deux coups secs retentissent. Cachés dans des buissons le long de la route, quelques ultras rivaux ont réussi à briser une vitre du car avec l’aide de gadins. Plus de peur que de mal, vu que personne n’est blessé par les éclats de verre, mais c’est parti pour un trajet de retour plutôt pénible. Il fait 5 degrés dehors et tu le payeras le lendemain avec une belle crève.

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