Quel est votre rapport au football ?
Tout d’abord, j’ai beaucoup joué étant petit. À tel point qu’à un moment donné, je m’étais dit dans ma tête que je deviendrais footballeur. Vraiment. J’ai fait partie de l’équipe du Loiret en pupilles, mais jamais de celle du Centre. Finalement, vers l’âge de quinze, seize ans, au moment où j’ai lâché le ballon, j’ai croisé une guitare. Donc ça a été le sport dont j’ai été le plus proche. Dans la musique, je suis né en groupe et c’est un vrai pont avec le football pour moi. Le principe d’équipe. J’ai toujours adoré le côté collectif, le jeu tout simplement. Mais aussi les gestes parfaits, les moments de gloire personnelle ou altruiste. Quand on demande à Cantona quel est son plus beau but, le mec répond que c’est une passe. Je trouve que cette phrase est très bien de sa part. Désormais, le foot, j’ai lâché un peu, mais j’y reviens quand il y a une grande émulation. Par exemple là, pour la Coupe du monde. En même temps, c’est mentir que de dire ça, parce que je suis pas mal la Premier League…
Ça veut dire que vous n’êtes pas collé tous les dimanches devant la télé, en gros ?
En fait, si. Je me suis même abonné à beIN, parce que finalement, mon fiston de douze ans me ramène doucement au football. Ça me rapproche. Et pour la première fois de ma vie, l’année dernière, j’ai pris un abonnement au PSG pour aller les voir jouer. Après, je suis copain avec Jocelyn Gourvennec grâce à son frère. Il venait aux concerts de Louise Attaque souvent, à Rennes et à Marseille et en retour, il m’a invité plusieurs fois pour des matchs à Guingamp. J’aime discuter football avec lui, tant pour un beau geste que pour son nouveau job si particulier de manager. Comment dire les choses ? Quand dire les choses ? Dans quelle dimension ? J’étais d’être aussi fidèle avec lui que lui l’est avec notre musique. C’est un curieux. J’ai l’impression que lorsque l’on devient footballeur, on doit se lever foot, se coucher foot et manger foot. Et c’est comme ça que les gars progressent ! Mais chez Jocelyn, j’ai trouvé cette envie de se nourrir de plein d’autres choses. Après, je n’ai pas rencontré beaucoup d’autres footballeurs, mais lui, il a ça. Je sais que quand Raí jouait au PSG, il était fan des Innocents et JP Nataf allait voir pas mal de matchs du club. D’ailleurs, je les ai croisés tous les deux au jubilé de Raí.
Pour les personnes de votre génération, le souvenir le plus mémorable reste France-Allemagne 82. Vous vous en rappelez ?
J’avais dix ans. J’étais en famille. Il y a tous les gestes dont on se rappelle, notamment le coup de genou sur Battiston. J’ai revu le match dernièrement sur Internet et je me demandais si l’impression de vitesse allait être la même qu’à l’époque. Et finalement, pas tant que ça. Ça jouait plus lentement, mais ça jouait. Forcément, cette équipe nous proposait d’être fan de Platini et j’étais trop petit pour suivre la Coupe du monde 78, donc j’ai plein de souvenirs de 82. Si mes souvenirs sont bons, c’est dans cette compétition-là qu’on se prend l’un des buts les plus rapides de la Coupe du monde contre l’Angleterre. Ça me faisait vibrer. Je me faisais le match dans la tête avec mon ballon à côté.
Ensuite, la grande période de la France avec l’Euro 84 et la Coupe du monde 86.
Oui, absolument. Et la Coupe du monde 82 préparait ça. C’est marrant parce que je me rappelle une phrase de Platini qui disait que la France n’aurait jamais pu gagner la Coupe du monde en 82, mais qu’en 86, ils l’auraient fait. 84, en plus, c’était à domicile. Je me rappelle la demi-finale contre le Portugal. Et puis le VRAI coup du chapeau de Platini. Un coup du chapeau, c’est trois buts, mais un du gauche, un du droit et un de la tête, je crois. Lui le fait sur ce coup-là ! J’en ratais pas une miette. En 86, je dois reconnaître que j’ai suivi le match contre le Brésil, mais que j’ai évacué la demi-finale contre l’Allemagne à cause de leur maillot vert. Et ça, vous l’écrivez ! (rires) Les gros matchs de l’équipe de France, c’est toujours des beaux matchs. Tu regardes la finale de 2006, Zidane n’a jamais sorti un match comme ça de toute sa carrière. Je lisais dans votre brochure du Mondial que justement, le point fort de la France, c’était son caractère imprévisible, mais que c’était aussi son point faible.
Vous parliez du collectif comme d’un pont entre le foot et la musique. Vous en voyez d’autres ?
Quand je joue avec mon groupe, j’essaie de faire en sorte qu’on ne joue pas les uns à côté des autres, mais ensemble. Ça va peut-être sembler comme enfoncer des portes ouvertes, mais ce n’est pas parce qu’on aligne onze joueurs super forts que l’équipe va l’être. Cette idée-là de fluidité est basique et s’est vérifiée avec les Galacticos du Real Madrid qui n’arrivaient pas à jouer ensemble. Il y a aussi le fait que tu puisses avoir une idée et qu’un autre se la réapproprie, et ça peut devenir son idée. Il y a ça dans le foot : dans les mouvements, dans les automatismes.
La répétition ?
Oui ! Il y a le rythme, aussi. Maintenir un rythme ou pas. Le casser. Il y en a qui voient les choses une seconde avant les autres. Zidane, c’était fou quand tu le regardais jouer. Je me disais tout le temps : « Il va lentement, là ? » Alors que pas du tout, le mec avait toujours une ou deux secondes d’avance sur l’autre joueur. McEnroe disait un peu la même chose : quand il frappait une balle, il savait qu’elle ne pouvait pas aller ailleurs. Il savait. Mais je suis quand même plus fan de Platini, forcément. Un vrai chef d’orchestre. En Ligue des champions, avec la Juventus face à Bordeaux, il fait une passe à Boniek de je ne sais pas combien de mètres… Ses passes, c’était de l’horlogerie, quand même.
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