Ciao Gaël. Ça fait combien de temps que tu joues en Italie maintenant ?
Il suffit de compter. Je suis parti de France en août 2002. À l’époque, j’avais 21 ans et je venais de signer mon premier contrat professionnel avec l’Olympique lyonnais. Tu sais, le gros Lyon, avec Essien, Malouda, Abidal et compagnie… Du coup, je n’avais pas trop de chance de jouer avec l’équipe première. Mon agent avait des contacts en Italie et j’ai eu l’opportunité de signer à Pérouse. Et depuis, je suis resté ici.
Tu as trouvé une femme italienne dès les premiers jours ?
Non, pas du tout, puisque j’étais déjà avec quelqu’un ! Ma copine, qui est devenue ma femme, a lâché la fac et ses études pour me suivre. Par la suite, on s’est donc marié et on a eu un enfant.
C’est difficile de s’adapter quand on débarque dans un pays étranger à 21 ans ?
C’est sûr qu’au début, c’était pas simple. En plus, à Pérouse, il y avait beaucoup d’étrangers, dont d’autres Français comme Ferdinand Coly. Donc on parlait beaucoup entre Français. Résultat : on ne s’est pas trop intégré la première année et on ne faisait pas beaucoup de progrès en italien… Après, je suis allé en Sicile, à Catane, où j’ai rencontré mon futur témoin de mariage, qui m’a beaucoup aidé. À m’adapter, mais aussi à parler italien et sicilien !
Ton deuxième club, c’était donc Catane. Mais tu as énormément bourlingué, avec quasiment un départ lors de chaque saison. En tout, tu as porté les couleurs de treize clubs différents, c’est ça ?
Oula ! Je crois que j’en suis à mon treizième club, ouais. Pérouse, Catane, Acireale, Sangiovannese, Pise, Sienne, Torino, Livourne, Juve Stabia, Pro Vercelli, Novare et Lumezzane actuellement. Ça fait douze si on ne compte pas l’OL.
C’est une volonté personnelle de rester en Italie ?
Non, pas vraiment. Simplement, on me connaît ici. J’en suis à plus de 300 matchs professionnels, quand même. Alors que je n’ai jamais joué en France, que ce soit en Ligue 1 ou dans les divisions inférieures professionnelles. Donc personne n’a jamais pensé à moi dans l’Hexagone. D’ailleurs, j’aurais beaucoup aimé jouer en France. C’est un autre football – plus technique, moins tactique – que je souhaiterais connaître. Bon, je pense que c’est trop tard, à 33 ans… Mais sait-on jamais. Une offre de Ligue 2 ou même de National, ce serait super.
Et tous ces transferts, tous ces prêts, c’est pas un peu usant (entre 2002 et 2015, Gaël Genevier n’est resté que deux fois plus d’un an dans un club, ndlr) ?
C’est hyper fatiguant. Et quand le gosse arrive, c’est encore pire. C’est aussi pour ça que j’ai décidé de rester en Serie C cette année, à Lumezzane, alors que j’avais d’autres opportunités en Serie B. Au bout d’un moment, t’en as marre.
Pourquoi ne pas avoir choisi de te poser avant ?
Pour un tas de raisons. Déjà, j’ai longtemps été sous contrat avec Sienne, et le club me prêtait à droite, à gauche parce qu’il n’avait pas forcément besoin de moi. Parfois, ça n’allait pas avec l’entraîneur. D’autres fois, c’est moi qui ne me sentais pas bien dans le club.
Pour t’installer dans une nouvelle ville, tu prends toujours la même agence immobilière ?
Non ! (rires) À chaque fois, le club met à dispo une agence. Parfois, je demande à des connaissances qui ont déjà joué pour le club dans lequel je viens de signer. Mais oui, chaque année, le défi, c’est la recherche d’un nouvel appart’ !
Tu as donc connu trois divisions professionnelles en Italie…
Oui : les Serie A, B et C. Il y a une grosse différence de qualité technique et d’intensité entre la Serie A et la Serie B. Pour moi, ça a été compliqué de montrer ce que je savais faire dans l’élite. Pour preuve, j’ai disputé plus de 100 matchs en Serie B, contre seulement 8 dans l’élite !
Où est-ce que tu t’es senti le mieux ?
À Pise, c’était génial. Avec Giampero Ventura, qui est maintenant coach du Torino, on s’entendait très bien. On développait du beau jeu. On avait perdu en demi-finales de barrages pour la Serie A. La saison à Turin était sympa aussi. Là, on avait échoué en finale.
Tu as été dirigé par Antonio Conte à Sienne.
Oui. Malheureusement, je n’ai pas beaucoup joué avec lui, car je me suis rompu les ligaments croisés. On avait gagné le championnat de Serie B. Conte, je ne peux t’en parler qu’en bien. C’est un entraîneur qui est relativement bon tactiquement, mais qui est surtout monstrueux au niveau caractériel. Il arrive à transmettre son envie de gagner à ses joueurs de manière exceptionnelle. C’est sa vraie force. Mais pour le domaine tactique, le meilleur que j’ai eu, c’est Ventura. Il est d’ailleurs en train de le montrer avec Torino, qui est cinquième de Serie A en ce moment.
Quel joueur t’a le plus marqué ?
J’ai joué avec Fabio Grosso et Leonardo Bonucci, qui étaient déjà au-dessus du lot. Mais le plus impressionnant, c’était Adriano. Je l’ai eu comme adversaire quand il était à Parme et il était imprenable.
Plus triste, tu as vu des clubs subir des dépôts de bilan…
J’ai en ai vécu trois ou quatre. En Italie, dès qu’un club est en difficulté sportive, c’est la merde. Regarde Sienne, qui a duré sept ans en Serie A et qui a fait faillite… Même pour les salaires, c’est très différent de la France. Les modalités de paiement sont complètement irrégulières. Lors de mon arrivée, j’ai reçu mon premier salaire au bout de neuf mois !
Tu resteras dans ce pays après ta carrière ?
Je ne sais pas. Je m’y plais, mais la France et le reste de la famille me manquent. Je ne vois pas trop notre future vie de famille en Italie. Je pense qu’on bougera. Mais peut-être pas en France… En fait, j’ai tellement bougé en Italie en peu de temps et regardé à court terme que j’ai énormément de mal à me projeter dans quelques années.
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