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Futura : « Comme beaucoup de petits Américains, on ne m’a pas mis un ballon dans les pieds »

Propos recueillis par Nicolas Jucha
7 minutes
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Futura est, à 60 ans, un vieux routier et pionnier du street art mondial. Le New-Yorkais fut l'un des premiers graffeurs à s'imposer en galerie et musée, mais aussi à collaborer avec d'autres expressions artistiques. Ce passionné de baseball aime le sport pour les émotions qu'il suscite. Il ne va donc pas se priver de suivre le Mondial avec un cœur partagé entre le Team USA et le Brésil, pays blessé qu'il souhaite voir gagner.

À voir : l’exposition FUTURA

La Coupe du monde de football, cela te parle ?

Je m’intéresse au soccer comme à d’autres sports, mais sur ma liste, il est en cinquième position. Comme beaucoup de petits Américains, on ne m’a pas mis un ballon de foot dans les pieds quand j’étais gosse, mais un gant de baseball dans les mains. Pour être honnête, je n’y connais rien, je ne peux pas dire si on est plus forts que le Ghana ou pas, mais j’aime regarder des matchs, certains joueurs me font vibrer.

Aux États-Unis, on se passionne pour le Mondial ?

Il n’y a pas vraiment de public pour voir le soccer à la télévision en temps normal. Mais tous les quatre ans, la Coupe du monde génère de belles audiences, mais ce sont principalement des étrangers aux États-Unis qui supportent leur propre équipe nationale.

Michel Platini a demandé aux Brésiliens de se calmer pendant le Mondial, et d’attendre la fin pour reprendre leurs manifestations….

Je vais surprendre, mais je pense qu’il marque un point, je suis d’accord. Jeux olympiques, Coupe du monde, quand vous avez chez vous ce type d’événements et ses investissements massifs… Les locaux auront toujours une bonne raison de protester, quelque chose à revendiquer, ils ont raison de le faire, mais Platini est également dans le vrai. Si la compétition part en vrille, peut-être qu’ils le regretteront après coup.

Les Brésiliens devraient donc arrêter de protester pendant un mois ?

Ils ont la Coupe du monde, qu’ils en profitent, n’aient pas de regrets après coup. Mais de toute façon, cela va dépendre des résultats du Brésil : si cela se passe mal sur le terrain, les protestations reprendront de plus belle. Je pense que les Brésiliens, malgré leurs problèmes, sont excités à l’idée de pouvoir remporter un nouveau Mondial, qui plus est à la maison. Mais j’ai bien conscience que tous leurs problèmes sont plus importants qu’une Coupe du monde de football.

Revenons au sportif, patriote d’abord et ensuite pro-Brésil ?

En soccer, je n’ai pas d’équipe. Même dans les autres sports, je n’ai pas forcément d’équipe et quand j’en ai, elles ne sont pas forcément new-yorkaises. Je ne suis pas loyal, je m’intéresse aux équipes et joueurs qui suscitent du plaisir. Le maillot ? Je suis avant tout loyal à ce que le sport est supposé être. En soccer, j’adore quand à la fin des matchs les joueurs échangent leurs maillots, c’est génial, ces moments-là me font apprécier le sport. Dans le baseball, cela n’existe quasiment plus, l’argent a tout perverti.

En clair, ton rapport au football comme à d’autres sports, c’est celui d’un amateur, mais pas vraiment d’un passionné ?

En soccer, j’aime observer certains joueurs, comme en basket. J’adore Lebron James, avec qui j’ai travaillé dans le cadre d’un projet pour la NBA. Aux États-Unis, il y a tout le temps de la compétition, on compare les sportifs entre eux, même dans le temps, tout se résume à une histoire de bagues aux doigts… Tu peux être un super athlète, mais si tu ne gagnes rien… Moi, j’ai envie de voir les choses un peu différemment, j’aime bien les sportifs un peu renégats et un peu artistes… Et j’aime aussi l’impact qu’a le sport sur tout le reste. En quelle année déjà vous avez gagné la Coupe du monde ?

1998.

1998, ok. Je m’en souviens maintenant, j’étais en France. Il semblait qu’il y avait un avant et un après, tout ce qui avait pu se passer avant en France semblait appartenir à une autre époque, un autre monde révolu… Il y avait des problèmes dans le monde, mais à l’époque de la victoire au Mondial, le monde semblait parfait. La France était complètement folle grâce à la Coupe du monde. Et puis je me souviens du match contre l’Italie ensuite…

2006 ?

Oui, je ne me souviens plus autant du match que du coup de tête. Visiblement, l’Italien avait dit quelque chose de pas très poli à propos de la maman…

C’était à propos de la sœur aussi…

Zidane, je pense qu’il a fait une grosse connerie. Pas seulement sportivement, mais pour tous les Arabes de France : depuis le 11 septembre 2001, la moindre raison peut exciter les rancœurs contre les communautés arabes dans le monde. Au moment du coup de tête, je me suis dit que cet homme faisait le jeu des racistes… Je comprends que chaque personne ait des émotions et qu’elles soient parfois difficiles à contrôler, mais il n’aurait pas dû oublier qu’il y avait plus que sa propre personne en jeu.

Surtout que la provocation fait partie du sport…

Oui, en sport, on le sait, l’adversaire cherche à entrer dans ta tête. Un champion ne laisse pas l’adversaire lui rentrer à l’intérieur. Un jeune joueur qui se laisse provoquer, qui explose…

Mais le meilleur joueur du monde, en finale du Mondial, n’a pas le droit ?

À ce niveau, non ! Je me souviens d’un match de NBA durant lequel un jeune joueur d’Indiana faisait tout pour que Lebron James pète les plombs. Il est allé jusqu’à lui souffler dans les oreilles, à faire mine de le frapper… Lebron James n’a pas craqué, c’est l’une des raisons pour lesquelles je l’apprécie. Il est le meilleur du monde, il le sait, comme il sait qu’il n’a pas le droit de craquer, il doit résister aux provocations. Il le fait pour lui, pour son équipe, pour sa ville, pour son pays, et pour tous ceux qui le suivent et le supportent.

Tu vas la suivre intensément cette Coupe du monde ?

Oui. Je n’ai pas besoin de tout connaître, mais juste de comprendre les choses essentielles, d’en capter les émotions. C’est assez simple cette année de la suivre depuis les États-Unis, car le décalage horaire est minime. Quand le Mondial était en Afrique du Sud, c’était un peu plus galère, car pour voir les matchs, il fallait ré-arranger le reste de sa journée. Les audiences devraient être bonnes aux États-Unis pour ces simples raisons pratiques.

Une Coupe du monde de football, cela peut se comparer à une grande foire d’art contemporain comme la FIAC ou Art Basel ?

Peut-être dans un sens, mais je dirais plutôt non. La Coupe du monde est une question de fierté nationale en priorité. Les gens se réunissent sous un drapeau, derrière une équipe. Tous les joueurs d’un même pays, qui le reste de l’année jouent dans des championnats et pays différents, se retrouvent ensemble pour cet événement. C’est une aventure collective. L’art et les foires d’art sont en effet internationaux, il y a des équipes derrière chaque artiste, mais cela reste très « individuel » . Chacun joue pour son seul intérêt. Dans une foire d’art, il n’y a aucune unité. Quand on arpente la foire, on ne se dit pas « tiens, les artistes américains sont là, tiens, les Allemands sont ici » … C’est seulement du business. Le sport a une beauté propre, crée une émotion unique. Tous ces matchs, toutes ces équipes, que ce soit en football, mais aussi en basket ou hockey, les qualités techniques des joueurs… C’est un spectacle permanent et qui se renouvelle sans cesse. Tu observes un joueur, et tu peux t’extasier : « Regarde comment il bouge ! » Ronaldinho ? Tu n’as pas besoin de t’y connaître en football pour voir la beauté dans ce qu’il fait. Ce qui est également beau avec la Coupe du monde de football, c’est que dans la société actuelle, avec le poids du business, la globalisation, de réunir les meilleurs joueurs de chaque pays pendant un mois, c’est difficile, mais cela se réalise. C’est encore plus beau de savoir qu’une équipe peut avoir les meilleurs joueurs, mais n’est pas assurée de gagner. Pourquoi ? Parce que ces joueurs ne s’entendent peut-être pas entre eux. C’est ça qui me plaît dans le sport. Dans une Coupe du monde, cette notion de groupe atteint son paroxysme parce qu’une trentaine d’hommes doit cohabiter pendant six semaines. Le football a en plus ce petit côté universel qui le différencie des sports US. Aux États-Unis, le sport, c’est trop souvent l’Amérique contre l’Amérique. Los Angeles, New York, des villes contre des villes… Il faut que quelqu’un meurt pour que l’on soit patriotiques.

Ou des Jeux olympiques…

Exactement, c’est le seul moment sportif qui rende les Américains vraiment patriotes. L’intérêt des Américains pour les JO est spontané, la Coupe du monde de football est plus « imposée » ou « proposée » , ce n’est pas naturel comme les JO, pour lesquels nous avons plein de supers athlètes et de supers rivaux comme la Russie ou la Chine…

The Escapades of Futura 2000 (collaboration avec The Clash)

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Propos recueillis par Nicolas Jucha

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