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Fribourg, c’était le Brésil

Par Côme Tessier
6 minutes
Fribourg, c’était le Brésil

À son arrivée en Bundesliga au début des années 90, le SC Fribourg a fait valdinguer l'Allemagne dans tous les sens, à commencer par le Bayern Munich. En trois matchs au Dreisamstadion, les joueurs du Brisgau font mordre la poussière au Rekordmeister et y gagnent une belle réputation en même temps qu'un drôle de surnom. Désormais, appelez-les les Breisgau-Brasilianer.

Uwe Wassmer. Rodolfo Cardoso. Harry Decheiver. Trois noms pour trois victoires contre le Bayern en trois saisons sur des scores fleuves. Dans l’ordre : 3-1, 5-1, 3-1. Ils ne sont pas nombreux à avoir réussi une telle performance en Allemagne. Pourtant, au début des années 90, un petit promu qui vit ses premières saisons en Bundesliga met ainsi la misère au club le plus titré d’Allemagne à chaque fois qu’il ose s’aventurer dans son stade. Sous l’impulsion de Volker Finke, le SC Fribourg se fait ainsi un nom au plus haut niveau et s’attire une cote de sympathie qui ne s’est pas démentie depuis. Parmi les faits d’armes de la troupe qui débarque en Bundesliga comme une horde de Vikings déferle sur les côtes anglaises, un maintien à la différence de buts suivi d’une troisième place de feu. Mais il y a surtout ces succès de prestige, en particulier à domicile. Ou comment Fribourg a construit sa réputation d’équipe sympa et joueuse dès ses premiers matchs contre les meilleures équipes d’Allemagne.

Un Bayern perdu

Quand on lui demande de rembobiner, Martin Spanring savoure le coup réussi par son équipe. « Le Bayern n’a tout simplement rien compris à ce que nous avons fait ce jour-là et à notre système de jeu. Volker Finke avait mis en place trois joueurs au milieu de terrain, qui échangeaient leurs rôles à loisir pendant le match. Les joueurs du Bayern étaient perdus contre nous. » Pourtant, quelques mois plus tôt, le premier match de l’histoire de la Bundesliga pour le SCF ne se passe pas aussi bien contre ces mêmes joueurs. Fribourg encaisse un sévère 3-1 à l’Olympiastadion de Munich, malgré la présence de 20 000 de ses supporters – un reporter de l’époque écrit alors que « dans la Forêt-Noire, seuls les arbres sont restés chez eux » –, et apprend le haut niveau. « Nous étions une petite équipe et le Bayern avait des individualités très fortes. C’est pour cela que nous avions notre système de jeu aussi. Il fallait toujours avoir un joueur de plus au marquage pour éviter les situations de un-contre-un. C’est très difficile à faire sur 90 minutes, mais ce jour-là, ça a fonctionné. Nous avons suffisamment couru. » Spanring admet ainsi qu’il y avait de la « surprise » d’avoir réussi le coup parfait au match retour, surtout pour un club du calibre de Fribourg. Il y a aussi ce jour-là de la réussite pour un homme en état de grâce, Uwe Wassmer, qui claque un triplé à Raimond Aumann.

Alors que le Bayern arrache un nouveau titre, Fribourg souffre durant le reste de la saison. Il faut un scénario incroyable et trois victoires sur les trois derniers matchs pour obtenir le maintien à quelques buts près. Dès lors, libéré, Fribourg entame une période d’état de grâce. Le club enchaîne sur une incroyable 3e place en Bundesliga à… trois petits points du champion, le Borussia Dortmund. Et à chaque venue du Bayern au Dreisamstadion, le Bayern repart avec sa valise bien remplie. « C’était le match de l’année pour nous, celui que nous voulions gagner avant tout » , raconte Kohl. Selon Spanring, l’ambiance y est aussi pour quelque chose. « Au Dreisamstadion, il y a toujours une belle atmosphère, assez familiale. Sur le terrain, on sait qu’on a le droit à l’erreur, que le public ne va pas siffler à cause d’une mauvaise place, mais continuer d’être derrière son équipe. Même en 2e division, les spectateurs sont toujours là à soutenir le club. Il n’y a ça nulle part ailleurs, même si le stade n’est pas aussi grand et impressionnant que celui de Dortmund ou de Schalke. » Le 23 août 1994, pour la deuxième saison de Fribourg en Bundesliga, le stade est une fois encore plein et Trapattoni vit un calvaire sur les bords de la Dreisam. Cette fois-ci, le Rekordmeister encaisse trois buts en moins de vingt minutes et perd finalement 5-1, tandis que Papin voit rouge. L’analyse de Kohl est facile : « C’était une victoire d’équipe, nous gagnions tous ensemble, en courant les uns pour les autres, alors que le Bayern était plus une construction d’individualités. » Si Cardoso brille tout particulièrement à l’été 95, le collectif est la clé pour mettre à mal le FC Hollywood.

Les Brésiliens normaux du Brisgau

Chaque fois que le Bayern passe par là, il prend ainsi une leçon par son exact opposé. Fribourg est alors une équipe sans stars, comme le raconte Spanring. « En 1993, je suis arrivé dans une équipe qui était uniquement constitué de types normaux. Il n’y avait que des gens sympas, équilibrés et intelligents. » Volker Finke, dans l’héritage des mouvements de mai 68, promeut le vélo comme moyen de transport et trouve son équilibre dans une ville déjà proche des valeurs écologiques. Le club devient en même temps le premier à installer des panneaux solaires sur le tout nouveau toit du stade, dès 1995. Surtout, Finke tient à ces joueurs ordinaires au sein du club. « C’était la politique de recrutement du club » , explique Ralf Kohl, fidèle au SCF toute sa carrière, qui souligne « l’harmonie » entre les joueurs malgré la concurrence. Le coach fait monter jusqu’au plus haut niveau des joueurs qui évoluaient jusque-là en amateur et qui n’ont pas que le football dans la vie. Cela se traduit sur le terrain. Avec son jeu léché, fait de passes courtes et rapides, Fribourg met à terre une dernière fois le Bayern 3-1, grâce à un doublé d’Harry Decheiver. Dans la ville la plus ensoleillé d’Allemagne, Fribourg crée pourtant quelque chose d’unique en son genre pour l’Allemagne, quelque chose qui ressemble au Brésil selon les observateurs de l’époque.

Ralf Kohl nuance de suite. « Dire qu’on jouait comme des Brésiliens, c’est un peu exagéré peut-être. On cherchait simplement à jouer vite au milieu, avec quelques individualités pour faire la différence comme Cardoso. » Le plus brésilien de tous s’appelle Cardoso, un Argentin qui émerveille par la qualité de ses passes et sa vision du jeu. Avec lui, Fribourg joue un football attractif pendant ces premières années de Bundesliga. Les victoires lors des grands matchs attirent la sympathie et donne naissance au surnom de Breisgau-Brasilianer, les Brésiliens du Brisgau en français. Spanring ne le trouve pas dénué de sens. « On essayait de jouer un beau football d’équipe, collectif, avec uniquement des passes courtes et rapides. Les ballons longs, cela n’existait pas chez nous. C’est ainsi que la comparaison avec le Brésil a commencé. Nous avions des petits joueurs qui jouaient comme des Brésiliens, en tiki-taka, bien que l’effectif ne comprenait pratiquement que des Allemands. Il y avait très peu d’étrangers en dehors de Cardoso. » Pendant seize ans à la tête du club, Volker Finke maintient cette envie et la spécificité de Fribourg, malgré plusieurs descentes. Un état d’esprit qui se retrouve désormais selon Martin Spanring dans la gestion de Christian Streich, à la tête de l’équipe depuis janvier 2012. D’ailleurs, en mai 2015, le SCF a renoué avec la victoire contre le Bayern pour la première fois depuis dix-neuf ans. « L’équipe actuelle ressemble à celle d’autrefois. Ils ont des joueurs très techniques, qui courent énormément. Si on regarde les statistiques, Fribourg est l’équipe qui parcourt la plus grande distance pendant un match en Bundesliga. Alors ce week-end, s’ils n’encaissent pas de buts sur les 20-25 premières minutes, ils ont une grosse chance de pouvoir gagner. C’est toujours difficile de jouer à Fribourg. » Seul problème : depuis, le Bayern l’a bien appris.

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Par Côme Tessier

Tous propos recueillis par CT

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