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France-Portugal, la mémoire dans la peau
Quatre ans après la finale de l'Euro 2016, le Portugal revient à Saint-Denis dimanche pour disputer un duel de Ligue des nations. Et si les choses ont bien changé depuis ce sale revers, les Bleus ont désormais un statut à assumer.
10 juillet 2016, nuit de folie : les Bleus attaquent le rendez-vous d’une vie avec les dents plantées dans le gazon, offrent vingt premières minutes délicieuses, vont presser le Portugal dans son lit, se laissent porter par un Sissoko solaire (aucun autre joueur n’a marché à ce point sur les milieux portugais au cours de l’Euro 2016) et se construisent plus de munitions que face à l’Allemagne au tour précédent. 10 juillet 2016, nuit d’insomnie : comment l’équipe de France a-t-elle pu laisser échapper le toast qu’elle s’apprêtait à porter ? Vaste débat, retourné dans tous les sens depuis plus de quatre ans, mais qu’il est aujourd’hui possible de trancher à l’aide de deux éléments. Le premier : après une entame furieuse, la France a décidé de reculer et de soigner sa relance là où il aurait certainement fallu continuer d’agiter le Portugal dans tous les sens afin de le désorganiser davantage. Le deuxième : cette nuit-là, les Bleus ont rencontré des monstres, un Rui Patrício avec des gants de fer, un Pepe maître des airs, un William Carvalho prince de la couverture, un Ronaldo qui avec sa blessure a cassé en deux le rythme et le scénario de la finale, et un Eder poussé par une bonne étoile. Puisqu’on pourrait refaire l’histoire pendant des heures en évoquant de nouveau le poteau de Gignac, le souffle de Payet coupé d’entrée par l’agressivité portugaise et Antoine Griezmann qui manque sa tête la plus simple de la compétition sur un centre de Coman, autant ne plus se faire de mal et se vider le crâne : dimanche soir, le Portugal revient à Saint-Denis, et l’équipe de France l’attend avec des arcs bandés.
Vers un nouveau losange
Ce match, troisième étape d’une Ligue des nations dont la Selecção est tenante du titre, peut devenir un outil de mesure. En quatre ans, tout a changé, ou presque, dans le paysage : les Bleus sont devenus champions du monde, le onze de Didier Deschamps a été bousculé (seuls six joueurs du groupe – Hugo Lloris, Paul Pogba, Antoine Griezmann, Kingsley Coman, Anthony Martial et Olivier Giroud – étaient à l’Euro 2016) et la dynamique du groupe France avec, mais rien ne dit que le Portugal, qui n’a perdu qu’une fois depuis l’été 2018 (en Ukraine, 2-1, il y a un an, N.D.L.R.), s’avancera dimanche soir avec plus d’ambitions offensives qu’en 2016 malgré une armada sexy (Cristiano Ronaldo, Bernardo Silva, João Felix, Diogo Jota, Trincão, André Silva…). « Nous avons nos armes et nous venons pour gagner, a contré samedi le sélectionneur portugais, Fernando Santos, dont le mandat a débuté en octobre 2014 par un France-Portugal (2-1). La finale sera toujours dans nos mémoires, mais là, c’est un match différent. »
Alors, qu’attendre de ce sommet international qui sera avant tout une explication entre deux nations qui ont avalé tour à tour la Suède et la Croatie et qui dansent ensemble en tête du groupe 3 de la Ligue des nations ? Une confirmation, quelques jours après la gifle mise à l’Ukraine (7-1) dans un système repensé, avec une défense à quatre et un milieu en losange. Ce 4-4-2 devrait de nouveau être couché sur la table par Didier Deschamps dimanche avec quelques ajustements : Lloris va retrouver son but, Presnel Kimpembe devrait accompagner Raphaël Varane derrière, Paul Pogba prendre la place d’Eduardo Camavinga au milieu, Antoine Griezmann et Kylian Mbappé sont attendus dans le onze. Un match existe en revanche à gauche entre Lucas Hernandez et Lucas Digne, très bon mercredi comme depuis le début de saison, au milieu entre un Nzonzi en forme et un Kanté en phase de reprise, alors que Tolisso, joueur le plus en vue cette semaine (personne n’a tiré plus que le Munichois, qui a au passage avalé un but et lâché une passé décisive), est en balance avec Adrien Rabiot.
« L’Euro 2016 ? C’est bien loin tout ça… »
Avant ce match, on concède le rêve de voir aligner d’entrée un triangle offensif Ben Yedder-Mbappé-Griezmann. En vingt minutes contre l’Ukraine, le Monégasque s’est régalé, a créé trois occasions et a offert deux passes décisives. Mais la rigidité défensive du Portugal pousse aussi à une titularisation d’Olivier Giroud, désormais centenaire et qui a ouvert cette semaine la saison de la chasse au Thierry Henry. « Dans tous les cas, l’objectif du losange, c’est d’avoir un triangle offensif dans les meilleures dispositions, répond Deschamps. Ma réflexion sur le système part toujours du positionnement des joueurs offensifs. » Au cours de son apéro médiatique, le sélectionneur des Bleus a également dégagé au loin l’idée d’une revanche : « C’est bien loin tout ça et on ne pourra rien changer à cette finale. Cette défaite a servi au groupe. Là, ça va simplement être une belle confrontation entre deux des meilleures équipes européennes. On va pouvoir évaluer les forces du moment. » Mais aussi poursuivre l’affinage à quelques mois de l’Euro, et ce, alors que la visite de la Croatie en septembre avait accouché d’une première demi-heure catastrophique. Nuit de folie ou nuit d’insomnie ? Là encore, il faudra choisir.
Par Maxime Brigand