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France-Israël : bas les casques
La France accueille ce jeudi la sélection d’Israël dans un climat politique et sécuritaire extrêmement tendu. Ce qui a tendance à occulter les quelques défis sportifs qui attendent les hommes de Didier Deschamps dans cette dernière ligne droite de 2024.
Y être ou ne pas y être, telle est la question. Si des dizaines de milliers de spectateurs ont répondu par la négative, au contraire des président.e.s de la République et de région, Didier Deschamps et ses troupes n’ont eux pas d’autre choix que de faire face à celles d’Israël. « On a fait en sorte de préparer ce match le plus normalement possible, mais dans l’ensemble du groupe, personne ne peut être insensible au contexte qui est lourd et pesant », résumait Didier Deschamps mercredi en conférence de presse d’avant-match, en parfaite harmonie avec N’Golo Kanté quelques minutes plus tôt : « On sait qu’on représente l’équipe de France, pas nos opinions personnelles. On va donner le maximum pour le maillot. Moi, ça me fait de la peine de voir ce qui se passe là-bas, et j’espère que ça va s’arranger. »
Le boycott n’étant plus (l’a-t-il déjà été ?) d’actualité, les sportifs devront donc composer avec leurs objectifs sportifs au milieu d’un conflit en cours sur un autre continent, mais aux répercussions internationales. À 20h45 pétantes, il faudra ajuster son short, entonner La Marseillaise, serrer des paluches et jouer. Comme il y a un mois à Budapest face au même adversaire, ceci dit. Sauf qu’à domicile et une semaine après les graves incidents survenus à Amsterdam, le decorum est un rien déstabilisant. En plus des sièges vides, c’est un dispositif de sécurité exceptionnel – déjà bien visible en veille de match, le 13 novembre, « une date triste aussi pour nous avec ce qui s’est passé en 2015 », dixit Deschamps – qui encadrera le retour des Bleus du foot dans leur jardin du Stade de France, 16 mois et 26 jours après leur dernière représentation. Alors « il faudra s’adapter », comme le dit Deschamps, déjà las.
Moins de Mbappé, plus de Kanté
Mais puisqu’ils n’ont pas les moyens d’arrêter une guerre, ces Bleus sans casques ont pourtant deux missions à mener en ce mois de novembre. Un : valider par une victoire leur présence en quarts de finale de Ligue des nations, et voyager dimanche prochain à Milan l’esprit tranquille. Deux : recentrer les discussions sur le terrain. Parce que c’est leur job. Parce que c’est aussi ce jeu qui a trop manqué à cette équipe de France dans une année 2024 qui n’aura fait que rendre les cœurs des supporters encore plus chafouins. La faute notamment à un Euro joué avec le frein à main, aux départs des visages familiers qu’étaient Griezmann et Giroud, et au virage qu’a pris l’histoire entre Kylian Mbappé et son équipe nationale.
En attendant que le capitaine revienne sous de meilleurs auspices, c’est donc le doyen et un des deux derniers champions du monde de cette liste qui prendra le brassard. N’Golo Kanté, 33 ans et toutes ses dents, sait qu’il n’est pas le plus loquace, mais n’a qu’une envie : « savourer ». Savourer un retour en sélection, lui qui avait raté la dernière sauterie pour cause de blessure. Savourer le fait de disputer des matchs internationaux qui, même s’ils se multiplient comme des petits pains, doivent rester un accomplissement sportif. Savourer aussi la chance de mener une nouvelle génération de joueurs en quête de repères et de figures. Interrogé sur l’absence du Madrilène, le milieu d’Al-Ittihad a balayé : « Ce qui compte, ce sont les joueurs qui sont là. »
Des défis à tous les étages
Chacun de ces 23, de par leur simple présence dans cette équipe de France en pleine mue, a une carte à jouer. Une charnière centrale est à fixer ; Lucas Chevalier a une place à se faire dans le pool des gardiens ; les bizuts d’octobre Michael Olise et Manu Koné devront confirmer ; Jules Koundé peut définitivement valider son titre de meilleur tricolore de l’année ; les habituelles doublures comme Jonathan Clauss, Lucas Digne, Mattéo Guendouzi pourront certainement s’exprimer ; Adrien Rabiot et Kingsley Coman ont un nouveau statut d’ancien à assumer ; Bradley Barcola, Christopher Nkunku et Marcus Thuram devront prendre leurs responsabilités en l’absence des titulaires Dembélé et Mbappé. Bref, ce ne sont pas les enjeux qui manquent. Et puis ? Et puis Kolo Muani. Meilleur buteur des Bleus durant l’année civile avec 6 pions en 14 matchs, le Parisien n’a eu droit qu’à 45 minutes de jeu depuis le dernier rassemblement. Comme Giroud époque Chelsea, l’attaquant conserve la confiance de son sélectionneur qui, s’il sait que « ce n’est pas l’idéal », refuse de se mêler de ce qui se passe au PSG. Mais pour combien de temps encore ? Didier Deschamps le sait : il y a des zones de turbulences qu’on ne peut pas éternellement éviter.
Par Mathieu Rollinger, à Saint-Denis
Propos recueillis par MR.