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Eux contre le reste du monde

Par Clément Gavard, à la Düsseldorf Arena

Après leur victoire étriquée face à la Belgique (1-0), les Bleus sont en quarts de finale de l’Euro. Ils ne sont peut-être pas beaux, mais ils gagnent et surtout : ils n’ont besoin de personne pour avancer vers leur ambition ultime.

Eux contre le reste du monde

Il régnait une forme de soulagement chez les Bleus, ce lundi en fin d’après-midi, dans les coulisses de la Düsseldorf Arena. L’équipe de France en quarts de finale de l’Euro, ce n’est pas grand-chose, quand on a pris l’habitude de la voir atteindre la dernière marche de trois des quatre dernières compétitions majeures mais, quand même, ça fait du bien aux caboches. À commencer par celle de Didier Deschamps, que l’on devinait un peu tendu ces derniers temps et qui était d’humeur blagueuse après la victoire contre la Belgique. « I am », s’est-il laissé aller dans un anglais express pendant que le référent UEFA le présentait à la salle. Puis il a déroulé : « Il vaut mieux avoir le ballon et obliger les adversaires à défendre. On ne s’est pas fait prendre au piège. Le seul regret, c’est le nombre de frappes qui partent hors du cadre. C’est une immense fierté d’être en quarts de finale. Même si on nous attend là, il ne faut pas banaliser. Jules Koundé, que vous m’avez taillé pendant deux ans et qui est homme du match, Kolo Muani buteur… Comme quoi, il faut faire preuve d’un peu de retenue. » Lui contre les autres, eux contre le reste du monde, avec toujours le même credo : gagner. Ni plus, ni moins.

Un petit score ? Faites pas chier avec un petit score ou quoi, on est en quarts.

Antoine Griezmann

Dans le moule de Deschamps

Comme souvent, le sélectionneur des Bleus est en train de réussir à emmener son groupe avec lui, dans sa philosophie. Ils sont peut-être nombreux à avoir changé de chaîne dans l’Hexagone, d’autres n’en peuvent plus de l’équipe de France made in DD, mais s’ils restent sur le bord de la route pour la suite de l’aventure, cela n’empêchera pas ces monstres froids d’avancer. L’obsession de la victoire prend le dessus sur tout le reste : les occasions ratées, le jeu peu séduisant, le manque d’intensité, etc. Le mot « chiant » était arrivé dans la bouche d’Antoine Griezmann au début de la préparation, le numéro 7 français n’en reste pas moins un soldat de Deschamps et un symbole de cette équipe qui se construit dans l’adversité, la douleur, se faisant un malin plaisir à passer par un trou de souris quand elle le peut. « Un petit score ? Faites pas chier avec un petit score ou quoi, on est en quarts », lâchait-il au micro de beIN Sports, avant d’être plus mesuré, plus doux, plus tranquille lors de son passage en zone mixte. « On a besoin de vous, aussi », a-t-on même entendu.

Même son de cloche chez Adrien Rabiot, qui s’est de son côté lâché auprès de confrères italiens, comme relayé par Eurosport : « Ce n’est pas le plus important d’être beau. Vous avez vu l’Italie ? Ils n’ont pas été beaux et ils n’ont même pas gagné. Ce n’est pas important d’être beau, comme le dit Allegri. Il faut être victorieux et c’est ce que nous sommes. » Ces Bleus ne doivent rien à personne, ni l’esthétisme, ni la qualité de jeu, tant qu’ils finissent avec le beurre et l’argent du beurre. En privé, le milieu de terrain de la Juventus, qui sera suspendu pour le quart de finale contre le Portugal, fait savoir qu’il voit ce groupe comme solide, très solide. De plus en plus solide. On serait à deux doigts d’employer le terme « indestructible » : si elle est à la peine comme rarement offensivement (66 tirs, 16 cadrés, 3 buts dont 2 contre son camp et un penalty), elle n’a concédé qu’un seul pion (le penalty de Robert Lewandowski) et les quelques miettes laissées par la défense sont ramassées par Mike Maignan.

Dans leur bulle

Deschamps n’est « jamais inquiet », c’est lui qui le répète dès qu’une question allant dans ce sens lui est posée. « Il faut forcer le destin et ne pas faire en sorte que ça devienne un blocage psychologique », a-t-il insisté après la rencontre, quand les joueurs passés devant la presse au sous-sol de l’enceinte ressemblant à un grand magasin IKEA n’ont cessé de s’en remettre au « coach », comme un guide. « Le coach le répète sans cesse, on ne sait pas comment peut tourner le match, disait par exemple Rabiot. Il faut s’améliorer, il y a parfois un peu de précipitation, mais ça va venir, on a peu de réussite. Et peut-être qu’au prochain match, on en mettra trois au fond. » Il a aussi été question d’ « état d’esprit du groupe », ce qui peut rassurer au vu des fissures qui pouvait poindre lors du dernier match, mais pas encore de déclic. « On le saura plus tard », a souri Griezmann. Ces gars-là n’ont besoin de personne, même s’ils ont pu glisser quelques mots doux au public français se déplaçant dans les stades (ils étaient environ 8 000 à Düsseldorf).

Les multiples questions politiques dans un contexte inédit pour le pays ? Ils gèrent. Enfin, plus ou moins, car l’initiative commune n’est pas encore tombée. Le nez cassé de Kylian Mbappé ? Aucun souci. Le jeu chiant ? Ils répondent avec le sourire. Les différents systèmes travaillés par la Dèche ? « C’est peut-être pour vous induire en erreur », se marrait Rabiot. Tout ou presque coule sur eux, ils surmontent les évènements à leur manière. Dans leur bulle, celle qui doit les conduire à l’éternité. « C’est à la fin du bal qu’on paye les musiciens », s’amusait Eduardo Camavinga ce week-end. Comptez sur eux, le bal n’est pas encore terminé.

Des audiences toujours timides pour les Bleus face à la Belgique

Par Clément Gavard, à la Düsseldorf Arena

Propos recueillis par CG, sauf mentions.

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