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Florian Maurice : « Pour être recruteur, il faut être malade »

Propos recueillis par Clément Gavard, à Rennes
Florian Maurice : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Pour être recruteur, il faut être malade<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Près de deux ans après son arrivée au poste de directeur technique, Florian Maurice a la satisfaction de voir le Stade rennais, 3e de Ligue 1, pratiquer le jeu le plus plaisant du championnat de France. Avant le déplacement à Nice samedi, l'ancien attaquant de 48 ans, qui préfère être discret dans les médias, s'est posé pendant plus d'une heure pour parler de sa deuxième vie : celle de recruteur. Le dirigeant breton évoque l'évolution du métier, son expérience à l'OL, sa relation avec Jean-Michel Aulas et sa passion débordante pour le ballon rond. Entretien avec un architecte.

En septembre dernier, à la fin du mercato et au moment où le Stade rennais connaissait un début de saison compliqué, pouviez-vous imaginer voir cette équipe pratiquer un football de cette qualité ? Je mentirais si je disais que j’imaginais qu’on en arrive là aussi rapidement, mais avec ce qui avait été mis en place pendant le recrutement, dans l’organisation et avec l’entraîneur que j’ai fait venir, j’imaginais qu’on puisse arriver à développer un beau football. Les choses ont été faites pour ça. Les joueurs recrutés, avec leurs qualités intrinsèques et surtout leur état d’esprit, sont arrivés pour que l’équipe puisse jouer de cette manière.

Depuis votre arrivée à Rennes au printemps 2020, sentez-vous que l’image du club a évolué en discutant avec les différents acteurs du milieu ? Même quand je parle avec des personnes qui sont en dehors du foot, il y a une connotation un peu différente. Depuis quelques mois, c’est sûr qu’on a une belle image sur l’aspect purement technique. On ressent aussi ce changement dans la répartition des revenus versés par le CVC où Rennes se dégage comme un club « fort » du championnat (derrière le PSG, Rennes fait partie du groupe 2 aux côtés de l’OL, l’OM, Nice, Lille et Monaco, NDLR). Cela n’aurait peut-être pas été le cas quatre ou cinq ans plus tôt et ça prouve que le club commence à être reconnu.

En deux mercatos estivaux, vous n’avez jamais recruté un joueur âgé de plus de 27 ans. Comment l’expliquez-vous ?J’ai toujours été attiré par les jeunes joueurs, c’est dans ces catégories que je me sentais le mieux quand j’étais recruteur pour visualiser le potentiel d’un joueur, mais je me suis aussi aperçu avec mon rôle de directeur technique à Rennes qu’on ne peut pas raisonnablement avoir une équipe seulement composée de joueurs de 18, 19 ou 20 ans. C’est aussi pour cela qu’on a fait venir Gaëtan (Laborde) ou Baptiste (Santamaria). Ils ont apporté de la maturité au groupe. J’ai compris que pour structurer une équipe, je ne pouvais plus faire venir que des Jérémy Doku ou des Kamaldeen Sulemana.

On compare souvent vos mercatos à des parties de Football Manager. Est-ce un jeu que vous maîtrisez ? J’en ai entendu parler, mais je ne sais même pas ce que c’est ! Honnêtement, je ne connais pas du tout. Faitout Maouassa est venu m’en parler un jour pour me dire qu’il avait repéré un super joueur dans le jeu. (Rires.) Il m’a raconté un peu le principe du jeu, mais je n’y ai jamais touché. Il paraît que des clubs s’en servent. J’imagine que ça peut être une source.

Ma carrière de joueur, je l’ai continuée par défaut, par dépit. Quand je décide que c’est la fin, c’est un soulagement.

Faisons un bond en arrière. En 2005, vous mettez fin à votre carrière de joueur. On parle souvent de la petite mort du footballeur. Vous, comment l’avez-vous vécue ? Franchement, j’aurais dû arrêter plus tôt. Après mon année au Celta de Vigo, je fais deux saisons plutôt correctes à Bastia (19 buts en 71 apparitions, NDLR), puis je me retrouve sans rien. Je vais même m’entraîner avec la réserve de Lyon. Je me retrouve finalement à Istres. C’est une catastrophe : je perds le goût, je n’ai plus envie, je n’ai plus d’objectifs personnels. L’été suivant, Michel Denisot, avec qui j’ai toujours gardé un bon contact depuis mes années au PSG, m’appelle pour venir faire une pige à Châteauroux, mais je n’arrête pas de me blesser, donc c’est fini, stop. Ma carrière, je l’ai continuée par défaut, par dépit. Quand je décide que c’est la fin, c’est un soulagement. J’ai peut-être atteint mes objectifs trop tôt dans ma carrière. J’ai été international très jeune, j’ai loupé une Coupe du monde pour avoir fait des mauvais choix, mais la vérité, c’est qu’en 2002 ou 2003, ma carrière était déjà terminée.

Entre 2005 et 2009, vous êtes consultant à la télévision. Avez-vous déjà le projet de vous reconvertir en intégrant une cellule de recrutement ? Non, c’est une opportunité qui s’est présentée. En 2007, après deux années passées à Canal, Jean-Yves Meilland me demande de venir bosser de manière régulière à OLTV. C’était mon job, je participais aux après-matchs et aux émissions quotidiennes chaque soir. Puis, en 2009, Claude Puel a demandé à Rémi Garde s’il ne pensait pas que ce serait une bonne idée de me prendre pour le recrutement. À Lyon, il n’y avait pas de cellule. Rémi Garde a été responsable du recrutement pendant six mois au-dessus de moi. Quand j’ai pris ma fonction, on ne m’a pas donné de directives. On m’a dit : « Vas-y, chasse ! » Je partais tous azimuts, j’allais n’importe où, je ne calculais pas. J’allais voir toutes les compétitions U17, U19, en Amérique du Sud… Je suis arrivé à une époque où l’OL voulait trouver des jeunes joueurs à développer. Puis, je me suis rendu compte que j’avais un bon flair pour les jeunes. Parfois, ils étaient recrutés par d’autres clubs et je me disais : « Putain, je l’avais repéré celui-là. » Je me suis dit que j’avais peut-être un bon œil et je suis parti là-dedans.

Quelle est votre réflexion au moment de cibler un joueur ? Avez-vous des critères plus importants que d’autres ?J’ai tout de suite été attiré par la technique. Quand je regarde un joueur, j’aime observer son allure, ce qu’il dégage. J’aime les beaux joueurs, je suis attiré par l’offensif en tant qu’ancien attaquant. Je me suis d’ailleurs trompé en me basant uniquement là-dessus au départ en oubliant l’aspect physique. Le championnat de France est particulier, plus dur qu’on ne le croit. J’ai fait l’erreur d’aller parfois chercher des joueurs dans des championnats beaucoup moins athlétiques, mais c’est de l’apprentissage.

Bruno Cheyrou, à la tête de la cellule de recrutement de l’OL, pense qu’il faut avoir été footballeur professionnel pour connaître la valeur d’un joueur. Pensez-vous la même chose ?Pour moi, c’est faux. Je vais donner une exemple concret : Gérard Bonneau (ancien responsable du recrutement des jeunes à l’OL, NDLR) n’a pas été pro, et c’est sans doute l’un des meilleurs recruteurs de jeunes que j’ai connus. Dans la cellule de recrutement à la formation à Rennes, il n’y a pas un joueur pro (à l’exception de Philippe Barraud, passé notamment par Rennes, NDLR). Ça ne veut rien dire. Gérard, qui est à Dijon maintenant, c’est une bête, c’est un monstre dans ce domaine. Il a joué en DH, mais il a l’œil.

Je passais jour et nuit devant mon ordinateur ou en déplacement. Ce n’est pas une vie. C’est top parce qu’on voyage, on rencontre des gens, mais c’est un métier de dingue.

On dit souvent qu’un métier doit s’apprendre. Avez-vous suivi des cours ou eu des rencontres marquantes dans votre cheminement ? Rien de tout ça. Je ne suis pas scolaire, j’ai arrêté l’école en seconde. Je n’ai pas de diplômes pour être recruteur, entraîneur ou directeur sportif, j’ai tout appris sur le tas. Quand je suis arrivé à l’hiver 2009, j’ai demandé à Vincent Ponsot s’il pensait que je devais suivre la formation de Limoges. Il m’a répondu : « Non, tu vas rester avec nous et tu vas aller voir dans tous les secteurs d’activité du club pour voir comment ça fonctionne. » Je n’y suis même pas allé, puisque j’étais pris avec le recrutement. C’est un métier de fou d’être recruteur, je passais jour et nuit devant mon ordinateur ou en déplacement. Ce n’est pas une vie. C’est top parce qu’on voyage, on rencontre des gens, mais c’est un métier de dingue. C’est passionnant, j’ai vraiment aimé faire ça. J’ai aussi eu beaucoup de chance parce que j’avais un rapport direct avec le président et chaque entraîneur. Pour moi, c’était exceptionnel. J’avais le sentiment de servir à quelque chose. C’est très important quand on est recruteur parce que ce n’est pas le cas dans tous les clubs.

Il y a une impression de liberté totale, c’est le souvenir que vous gardez de cette décennie passée à Lyon ? On n’avait pas de cellule de recrutement à l’OL, j’étais libre de faire ce que je voulais. Le club avait confiance en moi. Je ne suis pas le gars qui laisse sa famille pour partir en vacances pendant quinze jours, c’était du travail. Tout était très simple, la connexion était hyper rapide et je n’avais pas dix interlocuteurs autour de moi.

Ma perception, c’est que ça ne sert à rien d’être une armée mexicaine dans une cellule de recrutement pour regarder des matchs.

C’est quand même étrange de se dire qu’un club comme l’OL n’a pas de cellule de recrutement développée. N’est-ce pas un problème général en France où les cellules sont la plupart du temps restreintes ? À Lyon comme à Rennes, tu n’as pas besoin d’avoir 50 personnes, il n’y a qu’un club à gérer. Par exemple, le City Group, ils en ont 5-6, c’est différent. Ma perception, c’est que ça ne sert à rien d’être une armée mexicaine pour regarder des matchs, surtout avec ce qu’on a mis en place ici aujourd’hui. Tous les joueurs sont référencés, on a des données qui nous permettent de filtrer un maximum et d’éviter les déplacements inutiles. Ça m’est déjà arrivé de voyager en me demandant ce que je faisais là. Je ne veux pas ça pour mes recruteurs. Le joueur équatorien de 17 ans qu’on aura vu une fois en vidéo, il aura déjà été vu dix fois par Manchester City, on ne peut pas lutter.

Il y a pourtant les exemples de Jérémy Doku ou Kamaldeen Sulemana, courtisés par des grands clubs européens, qui ont fini par signer à Rennes. Ce n’est pas la preuve que vous pouvez lutter ? C’est tout un contexte qui a fait que l’on a pu faire venir Jérémy Doku : on jouait la Ligue des champions et on avait les moyens de sortir une somme importante à une période compliquée pour les clubs. Mais qu’est-ce que les grands clubs européens attendent ? Voir ce qu’un jeune comme lui peut faire en C1. J’en avais parlé un jour avec quelqu’un de la Juventus à propos de deux ou trois joueurs de l’OL. Il m’avait dit : « Florian, je préfère être sûr de mon investissement en mettant 60 millions d’euros plutôt que de mettre 20 millions sans savoir ce qu’un joueur vaut au haut niveau. » Rennes, c’est aussi une étape pour eux. Le fait de voir Eduardo Camavinga partir au Real Madrid, même s’il vient du centre de formation, ça montre qu’on a la capacité pour développer leurs qualités. Maintenant, quand on remporte le duel avec l’Ajax pour Kamaldeen Sulemana, c’est une grande satisfaction pour moi. Et ça montre que le club progresse.

Concrètement, comment fonctionne la cellule de recrutement à Rennes ? Jérôme Bonnissel est le responsable du recrutement, et on a trois autres recruteurs professionnels qui se déplacent. J’ai également mis en place un analyste vidéo, un analyste data et un data scientist. On travaille avec des fournisseurs qui peuvent nous donner l’ensemble des données physiques des joueurs européens et sud-américains. Ce qui permet de confectionner le joueur type au poste auquel on souhaite se renforcer. J’ai travaillé pendant dix ans tout seul à Lyon, ça peut sembler extrême, mais on a eu des résultats. Tout n’a pas été parfait, j’ai fait des erreurs, des mauvais investissements. On ne peut pas faire 100% en recrutement, celui qui dit qu’il va faire 100% est un mytho. La direction doit être consciente que les erreurs existent. Pour moi, cette cellule est suffisante, et on travaille très bien comme ça. Précisons qu’il y a aussi une autre cellule à la formation gérée par Philippe Barraud. Après, c’est du réseau. Par exemple, on est tout de suite en alerte quand un joueur de 16 ans débute en professionnel. Ça ne veut pas dire que c’est un futur bon, mais je suis alerté.

Ce qu’on perçoit sur le terrain, c’est capital dans le recrutement. La data ne mesure pas si le joueur est intelligent, mais on va y venir dans les prochaines années.

Comment a évolué le métier en dix ans ? Au début, je travaillais avec les cassettes vidéo. Ça a énormément évolué, notamment avec la data, mais je ne veux pas faire que ça. Par exemple, je ne peux pas me dire que je ne prends pas un joueur s’il est noté moins de 8/10 dans un critère (cf l’interview de Damien Comolli dans le dernier numéro de So Foot, NDLR). Ce qu’on perçoit sur le terrain, c’est capital dans le recrutement. À Rennes, le groupe est composé de mecs intelligents avec un esprit collectif, j’ai envie de garder ça. La data ne mesure pas si le joueur est intelligent, mais on va y venir dans les prochaines années. La data, c’est une aide au recrutement pour comparer des profils, c’est purement factuel. J’ai toujours été attiré par le bon mec. Même si je n’ai pas le temps de vraiment découvrir quelqu’un avant de le recruter. Lovro Majer, on le contacte début juillet, il arrive mi-août, mais je n’ai pas le temps de passer du temps avec lui ! Je discute, j’écoute… Ça m’est déjà arrivé de dire à un coach qu’on ne pouvait pas faire venir un joueur parce que je ne l’avais pas senti au téléphone. C’est une question de sensation.

À Rennes, votre métier de directeur technique ne se limite pas au mercato. Est-ce qu’on l’oublie parfois ? Quand je suis arrivé, j’étais le recruteur. On me prend pour ça. Quand M. Pinault m’appelle, il attend de moi que je ramène des bons joueurs. Mais mon rôle, c’est aussi d’être au quotidien avec les joueurs. J’ai besoin de les voir, d’assister aux entraînements, de ressentir l’ambiance dans le groupe. Je peux aussi donner mon ressenti à Bruno (Genesio), lui apporter une réflexion plus extérieure, sans remettre en cause ses choix, je ne suis pas du tout attiré par le métier d’entraîneur.

Vous avez également mis en place des gens pour accompagner les joueurs psychologiquement à Rennes. En quoi c’est important de leur proposer des préparateurs mentaux ou une psychologue ? J’estime que le foot se joue aussi dans la tête aujourd’hui. Les joueurs ont un peu de mal avec ça parce qu’ils n’ont pas envie que les autres se disent qu’untel ne va pas bien. C’est perçu comme : « Je ne vais pas bien, je vais voir le psy. » C’est capital d’être accompagné quand on connaît l’importance du foot, la place des réseaux sociaux, etc. J’en aurais sûrement eu besoin à mon époque pour me fixer des objectifs différents, mais je n’avais personne à qui parler. Je trouve que c’est important de communiquer avec quelqu’un dont c’est le métier. Je le répète aux joueurs : si la psychologue peut faire gagner 1%, 2% ou 10% sur leurs performances, il faut les prendre. On met également ça en place dans la formation pour que les jeunes soient éduqués à ça. Quand ils arriveront chez les pros, ce sera plus simple pour eux d’aller vers ces professionnels.

Je n’ai jamais eu le sentiment d’être le fils de Jean-Michel Aulas ou qu’il soit mon père. C’était mon patron.

Puisque l’on parle de sensibilité et de rapports humains, on peut évoquer les déclarations assez dures de Jean-Michel Aulas à votre égard au moment de votre départ de l’OL. Comment les avez-vous vécues ? Je connais le président Aulas depuis très longtemps. Je suis arrivé au club à l’âge de 10 ans en 1984. Il n’était pas encore président à l’époque. On s’est connus quand je suis passé professionnel. J’avais des relations de travail avec lui tout simplement. C’était mon patron, je n’allais pas dîner ou passer des soirées chez lui. On se voyait uniquement dans ce cadre professionnel.

Quand il dit que c’est un « amour déçu », on a pourtant cette impression qu’il perd un fils spirituel. Exactement. Mais personnellement, je ne l’ai jamais ressenti comme ça de mon côté. Je n’ai jamais eu le sentiment d’être son fils ou qu’il soit mon père. C’était mon patron. Je lui dois énormément, et je l’ai répété dans chacune de mes interviews données depuis.

L’arrivée de Juninho au poste de directeur sportif de l’OL a-t-elle été un tournant dans votre histoire avec le club ? Pour être honnête, j’ai appris que Juninho était nommé le jour de son arrivée. J’aurais préféré que ça se passe autrement. Je ne dis pas qu’il aurait fallu me donner le poste, mais j’aurais aimé qu’on m’en parle. Quand ça fait dix ans que tu bosses comme un fou pour un club… À partir de ce moment-là, j’estime avoir manqué un peu de considération. J’aurais aimé qu’on m’appelle pour me parler du projet, de ma future relation avec Juninho. Je n’ai pas eu ça. J’ai compris que je ne pourrais plus aller plus haut à Lyon. On a passé huit mois ensemble avec Juninho, je n’ai aucune raison de lui en vouloir, c’était le choix du président, mais je me suis aperçu que ça ne marchait pas. Quand Rennes m’a appelé, c’est normal que je le considère.

À partir de l’arrivée de Juninho, j’estime avoir manqué un peu de considération. J’ai compris que je ne pourrais plus aller plus haut à Lyon.

Comment se sont passées les retrouvailles avec Jean-Michel Aulas depuis cet épisode ? Est-ce que vous en avez déjà reparlé ? La première année, c’était très tendu, je ne l’avais pas revu depuis mon départ. À l’époque, ça se passe en un coup de fil, je lui dis : « Écoutez président, je m’en vais. » Je peux aussi comprendre qu’il n’ait pas aimé ça, j’aurais pu l’amener de manière différente. Mais c’était pendant le confinement, c’était compliqué… Il faut aussi qu’il puisse comprendre comment j’ai ressenti ce qui s’est passé. On a mangé ensemble récemment avant Lyon-Rennes avec Olivier Cloarec, Vincent Ponsot et Jean-Michel Aulas, mais on ne parle pas de tout ça, c’est un peu tabou entre nous. J’ai quand même ce regret d’être parti comme ça de l’OL.

Vous avez un lien très fort avec l’OL, est-ce que ça a été difficile de s’en détacher en arrivant à Rennes ? Après l’élimination contre Leicester, vous avez utilisé le pronom possessif « mon » pour parler du club, de l’équipe, du stade, du public, on sent que vous êtes enfin rennais. Tout cela n’a pas empêché ma coupure avec Lyon d’être nette. C’est un peu comme la fin de ma carrière, j’ai coupé, tac, c’est fini, on passe à autre chose. Dès que j’ai mis les pieds à Rennes, je me suis immédiatement senti bien. Oui, j’aime mon club, j’aime mon équipe, ce n’est pas que je veux tout m’approprier, mais je me sens bien ici. Aujourd’hui, mon fils de 10 ans est supporter de Rennes, il joue au Stade. Je me sens super bien intégré, c’est pour ça que je tiens ce discours. Rennes, c’est mon club.

Votre frère Max disait que vous pouviez voir plus de 300 matchs par an. Damien Comolli, lui, dit que son record annuel dans un stade s’élève à 202. Connaissez-vous le vôtre ? Je ne compte pas, je ne sais pas. Jérôme Bonnissel doit en voir plus que moi aujourd’hui. Je le répète, pour faire ce métier, il faut être malade, il faut aimer fouiner, chercher, etc. On a des logiciels qui nous permettent de voir les matchs du monde entier et les actions individuelles de chaque joueur, il faut aimer ça. Parfois, on peut aussi partir sur un tournoi et voir trois ou quatre matchs par jour, ça grimpe vite. En partant trois semaines au Brésil, à São Paulo, ça peut aussi tourner autour de la même moyenne.

Est-ce que le terrain vous manque depuis que vous êtes directeur technique ? Oui, beaucoup. Mais ce n’est plus mon rôle, même si j’essaie d’aller voir quelques matchs. On a la chance d’être dans une région où il y a beaucoup de football du National 2 à la Ligue 1. Quand on joue le vendredi, je pars à Brest ou à Lorient. Je ne fais plus les compétitions de jeunes et c’est vrai que ça me manque un peu, même si ce n’est plus mon job.

Comment fait-on pour avoir une vie de famille en parallèle d’un métier aussi chronophage ? J’ai la chance d’être avec ma femme depuis plus de vingt ans. Elle m’a connu joueur. La différence, c’est qu’on est moins à la maison en étant recruteur, mais ça fait partie du métier. Elle l’a accepté. Les enfants disaient parfois : « Pourquoi tu n’es jamais là, papa ? » Ce n’est pas facile à entendre. Mon rôle de directeur technique engendre plus d’attentes, mais je passe plus de temps avec ma famille. Je dors chez moi quasiment toute la semaine, sauf quand on est en mise au vert.

Votre vie entière semble tourner autour du foot. Dans un entretien à Ouest-France, vous disiez même ne pas savoir ce qu’était Netflix avant le confinement. Est-ce que vous avez d’autres passions à côté ? (Rires.) Ça y est, je sais ce que c’est Netflix, Prime, etc. Je découvre un peu plus de choses sur l’extérieur. Quand j’étais recruteur à Lyon, c’était du foot 24h/24. Le reste n’était pas utile, je n’avais pas besoin de voir autre chose. Je me plaisais énormément dans ce que je faisais. Avec le recul, on se dit que je suis cinglé. Il faut imaginer : tu rentres chez toi le soir, tu manges avec ta femme, puis tu regardes un match pendant qu’elle regarde un autre programme sur Netflix ou autre. Il faut avoir un problème. Mais j’avais certainement besoin de ça.

J’ai trop kiffé le confinement. Cette période m’a permis de couper. Je n’avais jamais autant profité de ma famille.

Comment avez-vous fait pendant le confinement quand il n’y avait plus aucun match de foot, à part peut-être en Biélorussie ? Pendant quinze jours, je me suis demandé comment j’allais faire. En fait, j’ai kiffé ! Je n’avais jamais autant profité de ma famille. J’ai passé deux mois en étant tous les jours avec mes enfants et ma femme, je me suis régalé, c’était top. Cette période m’a permis de couper. Je me levais le matin, je jouais avec mon fils, je lui apprenais à jongler. J’avais repris le sport, je faisais du gainage. (Rires.) Je n’avais jamais vécu tout ça.

Éric Carrière a récemment fait part de son dépit face à l’évolution de ce sport. Peut-on passer autant de temps dans ce milieu sans finir par être dégoûté du foot ? (Silence.) Éric a un idéal, le sien. Tout ne me plaît pas dans ce que je fais. Dans votre métier, ça doit être pareil. Il y a des choses de plus en plus difficiles à comprendre. Quand tu es en discussion avec des jeunes joueurs et qu’il y a la famille, les parents, les oncles autour, ça me pèse. Le foot a pris une place trop importante dans certaines familles. Il faut réussir à s’adapter à tout ça pour le supporter. Même si le temps passe, je ne suis pas encore blasé du foot. Pas du tout. J’aime venir tous les matins au club, voir les joueurs, les entraînements, les gens dans les différents services, etc. Ce n’est pas une corvée, heureusement, même si tout n’est pas toujours rose. Pour moi, ce n’est même pas un métier, c’est une passion.

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Propos recueillis par Clément Gavard, à Rennes

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