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« Aucun club de football n’est fier de prendre l’avion »

Propos recueillis par Quentin Ballue
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Complément d’enquête a diffusé jeudi sur France 2 un sujet « Jets privés et ultra-riches : ça plane pour eux ». Au milieu, une séquence sur l'Olympique lyonnais et sur son choix de l'avion pour se rendre à Marseille. Directeur de la communication corporate de l'OL, Florent Deligia nous livre son regard sur cette épineuse question des mobilités.

Comment l’équipe de Complément d’enquête a-t-elle approché l’OL pour ce sujet sur les jets privés ?

Avant le match contre Marseille, ils nous ont prévenus qu’une équipe accueillerait les deux avions à l’aéroport. On s’est dit que c’était un bon sujet. On négociait déjà avec la SNCF avant le Covid. Le président Aulas nous a dit qu’il leur répondrait et qu’il les inviterait au stade pour en discuter de manière plus approfondie. L’idée était de leur présenter ce qu’on est en train de faire de manière globale. Les déplacements, ce n’est qu’une petite partie de ce qui est construit, il y a la gestion de l’énergie, des émissions carbone, etc.

Vous les avez donc reçus au Groupama Stadium ?

Ils sont venus, on leur a expliqué les problématiques de sécurité, notamment à Marseille. On leur a présenté nos échanges avec la SNCF et les devis, on leur a aussi montré les panneaux solaires qui couvrent 80% des besoins énergétiques du stade. Ces séquences n’ont pas été conservées, ils nous ont dit que c’était un choix éditorial. C’est dommage, on a eu l’impression que le football servait de produit d’appel pour le reportage. Aucun club de football n’est fier de prendre l’avion. On veut trouver les meilleures mobilités par rapport au contexte. On s’était dit que si on leur montrait comment se passaient les négociations avec la SNCF et tout ça, le débat serait relancé dans le bon sens.

Comment vous arbitrez entre les différentes options de mobilité ?

La première question, c’est la sécurité. Pour aller à Marseille, on a étudié plusieurs hypothèses, notamment arriver dans une gare en dehors de Marseille et finir en bus, mais la sécurité nous a bloqués. Faire Lyon-Marseille en car, même banalisé, ça oblige à mobiliser des forces de police sur tous les ponts qui enjambent l’autoroute, comme ce qui se passait pour le derby. Pour aller à Saint-Étienne, ça pouvait se gérer, mais jusqu’à Marseille, ce n’était pas possible. Les autres points sont la récupération, les horaires et les temps de trajet. Cette saison, on a fait deux déplacements en car (Montpellier, Auxerre) et on va en faire un troisième (Clermont). À chaque fois, ça coïncidait. Quand on a commencé à travailler le sujet du train, le président Aulas nous a dit : « Allez jusqu’au bout de l’hypothèse, même si c’est plus cher, ce ne sera pas le point bloquant. » La priorité étant la sécurité, la récupération et les heures d’arrivée et de départ. On avait deux hypothèses de travail pour se rendre à Lille et à Paris, en étant en première classe dans un train normal. La facture finale était deux fois supérieure à celle de l’avion, mais on a continué.

Alors, qu’est-ce qui a bloqué ?

Pour Lille, vu qu’il faut réserver trois mois à l’avance et qu’on a souvent les dates trois semaines avant, on a négocié avec la SNCF sur la base d’un match le dimanche. Ils nous ont proposé des horaires qui ne collaient pas, on arrivait trop tôt ou trop tard. Avec le recul, heureusement qu’on ne l’a pas fait parce que le match a été programmé un vendredi… Réserver trois mois en avance, c’est bloquant. Il faudrait trouver un entre-deux entre les demandes des diffuseurs et celles de la SNCF, il y a peut-être un juste milieu entre trois semaines et trois mois. Pour Paris, on a travaillé l’hypothèse, mais on arrivait trop tard, en début d’après-midi. À ce moment-là, en novembre, il y avait aussi l’inconnue d’une potentielle demi-finale de Coupe de France le mercredi. Comment gérez-vous la récupération derrière si vous enchaînez deux matchs à l’extérieur et que vous devez repasser par Lyon entre deux pour vous préparer ? La SNCF a compris nos problématiques, on continue de parler avec eux. On veut trouver des protocoles pour prendre le train régulièrement. Maintenant, si les clubs de foot veulent faire des efforts, les déplacements se feront majoritairement en car, plus qu’en train. C’est plus simple car vous partez et revenez quand vous voulez. Montpellier ou Auxerre, c’est assez long, mais on y va quand même en car. Si Saint-Étienne et Dijon étaient encore en Ligue 1, on irait aussi en car.

On a l’obligation de chercher les meilleures solutions. Notre réponse est globale, il n’y a pas que les déplacements dans l’équation. Toute activité de loisir en extérieur sera rattrapée par la question du dérèglement climatique.

La SNCF propose de privatiser des trains, non ?

Quand on leur a posé la question, ils nous ont dit qu’ils ne pouvaient pas le faire, car ils manquent de conducteurs et de trains. Avoir un train juste pour 50 personnes, ce ne serait pas cohérent. D’ailleurs, dans cette situation, le prix serait multiplié par quatre ou cinq.

Vous comprenez que ça interpelle qu’on fasse voler deux avions pour un Lyon-Marseille et qu’on fasse venir un bus pour le trajet hôtel-stade ?

On ne l’a pas caché à Complément d’enquête : le président Aulas a sa vie de patron, il gère l’OL, il est à la Ligue, à l’ECA, etc. Il ne fait pas toujours le déplacement avec l’équipe. Il y avait cinq heures de différence entre les deux vols, on était en pleines négociations avec John Textor, il était resté à Lyon pour gérer ça. Concernant le bus, il n’est pas à vide. Il part parfois avec des personnes – des gens de la com, des VIP – et surtout, les soutes sont pleines, il y a des tables de kiné et plein de choses à l’intérieur. Par contre, ce n’est pas parce que les clubs ont ces habitudes qu’on ne réfléchit pas à faire autrement.

Sport Positive a établi un classement prenant en compte une dizaine de critères écologiques : l’OL arrive en tête en France, mais neuf clubs de Premier League et onze clubs de Bundesliga affichent une meilleure moyenne. Comment expliquer ce retard des clubs français ?

Culturellement, l’Allemagne s’est posé ces questions-là bien avant nous, allant jusqu’à lancer des débats sur le charbon, le nucléaire, etc. La question énergétique nourrit le débat national en permanence en Allemagne. Les pays plus au nord ont intégré ces questions-là plus tôt. Je ne parlerai pas pour les autres clubs, mais on a une fondation pilotée par Maëlle Trarieux, qui cherche des solutions au quotidien, et on travaille avec le label Fair Play For Planet pour faire évoluer nos pratiques. L’OL est propriétaire de son stade et ça change tout quand on veut mener des actions. Avec des hauteurs sous plafond assez importantes, on avait tendance à chauffer un peu trop le haut des pièces. Les équipes ont trouvé des solutions, il y a désormais des systèmes qui permettent de plaquer l’air chaud au sol, là où sont les gens. Comme des portes restent parfois ouvertes entre l’intérieur et l’extérieur, on a aussi installé des rideaux d’air pour isoler.

Antoine Miche, président de Football Écologie France, nous disait : « Est-ce qu’il ne vaut pas mieux six heures de bus plutôt que l’avion quand on sait qu’on a la chance de jouer au foot parce qu’on a une planète vivable ? Plus on fait de choses contre le fait que la planète soit vivable, plus on met en péril sa propre activité. » Vous entendez ce point de vue ?

Il a raison de poser ce débat, c’est son rôle. On a l’obligation de chercher les meilleures solutions. Notre réponse est globale, il n’y a pas que les déplacements dans l’équation. Quand c’est possible, on privilégie le bus. Il ne faut pas oublier, malheureusement, à quel point le Covid a ralenti toutes les initiatives positives en matière de mobilité. La bulle sanitaire était la priorité, et l’avion a été la réponse quasiment systématiquement. Les clubs ont perdu un ou deux ans avec ça, mais on travaille ces questions et on cherche des alternatives. Toute activité de loisir en extérieur sera rattrapée par la question du dérèglement climatique, tout le monde a intérêt à trouver des solutions.

Dans cet article :
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Propos recueillis par Quentin Ballue

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