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Fernando Diniz : « Si l’on perd sans jouer avec nos principes, on perd deux fois  »

Par Sergio Levinsky, à Jeddah (Arabie saoudite)

Malgré la lourde défaite de Fluminense contre Manchester City en finale de la Coupe du monde des clubs (4-0), Fernando Diniz ne semble pas être affecté par le résultat. Calme, souriant, le coach de Flu se livre après coup sur ses idées ainsi que sur l'énorme fossé qui existe aujourd'hui entre les clubs européens et sud-américains.

Fernando Diniz : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Si l’on perd sans jouer avec nos principes, on perd deux fois  »

Cette défaite face à Manchester City en finale (4-0) n’est pas la meilleure façon de terminer l’année…
C’est un résultat lourd pour nous, c’est vrai, mais nous n’avons pas eu de chance en tobant sur la meilleure équipe du monde de ces cinq dernières années. Pour ne rien arranger, ils ont marqué contre nous dès la première minute du match, et la forte pression qu’ils nous ont imposée a fait qu’en deuxième mi-temps, nous avons eu du mal à nous approcher de leur but. Malgré cela, nous avons essayé de jouer comme nous l’avons fait toute l’année, et nous sommes presque toujours parvenus à nous libérer de cette pression en jouant. Mais l’usure que cause cette équipe de City est énorme.

On a l’impression, d’après ce que vous dites, que l’écart est très grand entre l’actuel vainqueur de la Copa Libertadores et le vainqueur de la Ligue des champions.
Chaque fois que vous jouez contre de telles équipes, vous apprenez et vous vous améliorez, mais malheureusement, nous n’avons pas souvent l’occasion de les affronter. C’est la réalité avec laquelle nous devons vivre. Pour en revenir au match, je pense qu’il aurait été pire de jouer un jeu plus défensif. Cela ne me convient pas, car j’ai mes convictions, et si l’on perd sans jouer avec nos principes, on perd deux fois.

Il faut vivre sa vie avec ses convictions, pas avec celles des autres. C’est logique d’une certaine manière : nous avons joué de la même manière toute l’année, pourquoi changer maintenant ?

Fernando Diniz

Pourriez-vous développer un peu plus cette idée ?
Il faut prendre des risques. Je pense qu’il est beaucoup plus risqué d’arrêter d’être ce que l’on est que de persister à essayer d’être ce que l’on est. Il faut vivre sa vie avec ses convictions, pas avec celles des autres. C’est logique d’une certaine manière : nous avons joué de la même manière toute l’année, pourquoi changer maintenant ? C’est ainsi que nous avons réussi à remporter une Copa Libertadores, alors que ce club ne l’avait jamais gagnée auparavant. C’est vrai que l’adversaire était très coriace, mais ma philosophie est de penser d’abord à mon équipe, à la façon dont elle joue, et que ce sont les autres qui doivent s’adapter à cela et non l’inverse. Même si dans ce cas particulier, nous parlons d’une équipe très forte, qui travaille depuis des années et qui a une ligne définie et très prudente, et c’est vrai que le risque était là. Malgré cela, nous avons décidé de prendre des risques et au moins, dans la défaite, nous étions nous-mêmes. Maintenant, nous devons nous remettre à penser à ce qui nous attend en 2024, avec notamment une nouvelle participation à la Copa Libertadores pour essayer de revenir au plus haut niveau international.

 

J’ai un immense respect pour Guardiola et son travail, mais je ne suis aucun courant. Ni celui de Guardiola, ni celui de Klopp, ni celui d’aucun autre entraîneur au Brésil. Je suis autodidacte

Fernando Diniz

Après le match, on vous a vu beaucoup échanger avec Pep Guardiola. Suivez-vous sa philosophie ?
J’ai un immense respect pour Guardiola et son travail, mais je ne suis aucun courant. Ni celui de Guardiola, ni celui de Klopp, ni celui d’aucun autre entraîneur au Brésil. Je suis autodidacte. J’ai toujours été plus intéressé par l’étude des joueurs. Ils sont mon véritable objet d’étude. J’essaie de les aider à s’améliorer, non seulement en tant que footballeurs, mais aussi dans la vie, pour que le football soit un moyen d’accéder à une vie meilleure. Et d’ailleurs, cela finit aussi par aider les supporters, car je crois en un football esthétique. Je crois qu’il y a d’abord les joueurs, les personnes, et ensuite l’aspect tactique.

Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Que tout n’est pas une question d’efficacité, d’objectifs. Entre les objectifs, il se passe des choses et il faut s’occuper du jeu et laisser quelque chose derrière soi. Si l’on fait un parallèle avec la vie, il se passe plein de choses jusqu’à la mort. Et ce sont ces choses qui donnent un sens à la vie. On ne sait jamais si on va gagner ou perdre, et on ne sait jamais si on va mourir demain ou dans 50 ans, alors c’est pour cela qu’il faut essayer de s’amuser et de laisser quelque chose derrière soi.

Guardiola est l’un des entraîneurs qui a le plus insisté sur ce qu’on appelle le « jeu de position », mais vous semblez être en faveur d’un style totalement inverse. Avec des joueurs qui changent de position en permanence. Soudain, Marcelo passe de l’aile gauche à l’aile droite, ou Keno et le Colombien Arias, qui sont censés jouer sur des flancs opposés, se retrouvent côte à côte…
Je le définis comme un style de collaboration, de soutien, qui dépend beaucoup des autres, tant dans la construction que dans la récupération. C’est un style qui demande beaucoup de courage. Ces combinaisons, ou triangulations, nous donnent souvent une supériorité numérique sur nos adversaires dans certaines zones du terrain.

Je conçois le football comme un levier social, qui est bien plus qu’un jeu. C’est un mode de vie.

Fernando Diniz

Comment vous définiriez-vous, au-delà de votre rôle d’entraîneur ?
Comme un Brésilien typique, avec beaucoup de fierté et de joie d’appartenir à un pays comme le Brésil qui a beaucoup de bonnes choses, mais qui doit résoudre des problèmes comme la pauvreté, les favelas, la discrimination… Je conçois le football comme un levier social, qui est bien plus qu’un jeu. C’est un mode de vie. C’est pourquoi je ne crois pas que les résultats soient le seul objectif.

Vous êtes également le sélectionneur par intérim du Brésil, qui est sixième au classement des qualifications sud-américaines de la Coupe du monde 2026 et qui n’a pas remporté le plus grand des trophées depuis 2002. Pourquoi en est-il ainsi, avec tant de stars ?
Il s’agit d’un long développement et parfois, dans un tournoi qui se dispute tous les quatre ans, il peut y avoir un mauvais jour qui explique cela. Mais nous pouvons gagner à nouveau. Je vous rappelle que lorsque Pelé a pris sa retraite internationale (en 1970, NDLR), le Brésil a passé 24 ans sans remporter de Coupe du monde avant d’en gagner deux, en 1994 et en 2002. Je ne crois pas aux recettes magiques pour gagner une Coupe du monde, mais à l’effort, au travail, à l’humilité et, bien sûr, à la conviction. En tout cas, je ne crois pas, comme on le dit dans certains médias de mon pays, que celui qui gagne est un coach à succès et que celui qui perd est un loser. Gagner un match de football ne fait pas de vous « un gagnant » dans la vie.

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Par Sergio Levinsky, à Jeddah (Arabie saoudite)

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