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Federico Dimarco, le Pazzo de l’Inter
Supporter de l'Inter depuis sa naissance, Federico Dimarco vit le rêve de n’importe quel tifoso au monde : disputer une place en finale de la Ligue des champions avec le club de son cœur. Pour cela, encore faut-il que l’Inter termine le boulot face au Milan, ce mardi soir (20h45) à San Siro.
Peu sont les êtres humains sur cette Terre à pouvoir crier haut et fort qu’ils ont transformé leur rêve inaccessible en réalité. À l’avoir fait en l’espace de vingt ans, ils ne sont qu’une poignée. Pourtant, Federico Dimarco fait bel et bien partie de cette deuxième catégorie. Il y a vingt ans, alors qu’il n’avait pas encore soufflé ses six bougies, l’actuel piston gauche des Nerazzurri était dans les travées de San Siro pour voir, la larme à l’œil, Milan voguer vers la première finale de C1 de l’ère Ancelotti. Même si ce n’est pas forcément un bon souvenir, Dimarco sait voir le verre à moitié plein : « Penser qu’il y a 20 ans, je regardais ce match des tribunes et qu’aujourd’hui, j’ai la chance de le jouer est une émotion incroyable. » Lors de la manche aller il y a six jours, ce père de famille aux cheveux peroxydés a fait plus que seulement acte de présence en servant parfaitement Henrikh Mkhitaryan sur le but du break. Bien mérité pour ce néo-international italien (8 sélections), qui a rejoint les Azzurri pour la première fois en juin 2022, et qui vit actuellement sa meilleure vie.
Un missile et des galères
Cet amour entre l’Inter et Dimarco est sincère. Depuis qu’il est en âge de marcher, ce Milanais pur jus – dont le père tient un magasin de fruits et légumes non loin de la Porta Romana à Milan – fréquente les travées de San Siro jamais loin de sa tunique noir et bleu. « Je ne me souviens même pas de mon premier match à San Siro, je devais avoir trois ans, racontait le poulain de Simone Inzaghi à la Gazzetta Dello Sport. À partir de là, j’ai commencé à suivre l’Inter, et c’est devenu, dans le bon sens du terme, une drogue. Ma passion. Je jouais le samedi ou le dimanche matin, puis j’allais directement au stade. La dernière année où j’y suis allé autant, c’est en 2010 : avec le Barça en demi-finales, j’étais dans le premier anneau vert, je n’avais jamais vu le Meazza vibrer de la sorte. » Comme dans toute relation, c’est dans les moments difficiles que l’on comprend si le lien est solide ou s’il peut s’étioler rapidement.
Ce « bas », Dimarco l’a vécu il y a quatre ans. Lors de la quatrième journée de la saison 2018-2019, il est prêté à Parme par le club de sa vie, là où il a été formé et a fait toutes ses classes depuis l’âge de sept ans. Ce jour-là, il va commettre l’irréparable : inscrire un banger, son premier but en pro, face à l’Inter qui offrira à Parme une victoire de prestige. Pire : Dimarco ne va pas se gêner pour le célébrer comme il faut, torse poil et glissade au menu. En retour, les insultes pleuvent, et l’intéressé est obligé de s’en expliquer de façon toujours aussi… naturelle : « Cette célébration, cette liesse, cela a été la libération de ces dernières années difficiles. Je n’aurais jamais voulu que ce premier but soit contre mon équipe préférée… mais c’est aussi ça le football. Je suis désolé pour les supporters qui se sont sentis offensés, ce n’était pas ma volonté. Je voulais vous demander de ne pas être offensés… surtout en ce moment, alors que ma fille va bientôt naître ! »
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Un tour de la Botte avant de s’offrir l’Europe ?
Parce que oui, Dimarco a dû lutter avant de décrocher une place de titulaire à l’Inter. Une juste récompense obtenue cette saison, depuis le départ de l’inamovible Ivan Perišić dont le CV et les performances ne laissaient que très peu de place aux autres au poste. « Ivan a fait une saison extraordinaire l’année dernière : il était “injouable”, glissait Dimarco à son sujet. Je l’avais connu quand il venait d’arriver (en 2015, NDLR), puis, quand je l’ai revu après des années, c’était autre chose, d’un niveau unique. » Pendant ces sept ans, où l’international croate a facturé 254 matchs chez les Nerazzurri et remporté le Scudetto en 2021, Dimarco s’est exilé de la capitale lombarde. Ascoli, Empoli, Sion, Parme puis Vérone, le ragazzo milanais ne s’est jamais barré très loin. Mais suffisamment quand même pour terminer sa construction : « Quand vous sortez du secteur des jeunes, vous devez franchir les étapes de votre croissance. Je pense que je l’ai fait et que je suis retourné à l’Inter, pour y rester, au bon moment. Si je suis devenu le joueur que je suis, je dois remercier tous les entraîneurs que j’ai eus. » Tous ? « Dans le lot, il y en a un surtout… Ivan Jurić (actuel entraîneur du Torino que Dimarco a eu au Hellas, NDLR). Il m’a formé à 100 %, à tous points de vue. Il m’a complété, dans mon physique, dans mon rôle. Et surtout dans la tête. »
C’est donc en 2020-2021, l’année du titre de l’Inter, que Dimarco a définitivement explosé à la face de la Botte. Que cette machine à centrer, excellent tireur de coups de pied arrêtés, a bénéficié de la culture tactique de ce coach issu de l’école Gasperini pour se permettre d’aller voir plus haut. Les Gialloblù seront l’une des équipes surprises et finiront dixièmes, Jurić regrettera publiquement le retour de son poulain à l’Inter en fin d’exercice et « Whisky » terminera son prêt d’un an et demi avec 5 buts, 8 passes décisives en 48 apparitions. Une question reste en suspens : pourquoi diable Federico Dimarco se fait-il appeler « Whisky » ? « Je ne sais pas pourquoi il nous a demandé de l’appeler comme ça, confiait son ancien coéquipier et gardien à Vérone, Marco Silvestri. Un jour, je lui ai demandé et il m’a dit : “Boh, j’aime bien, je l’ai choisi.” »Revenu en force à l’Inter l’an dernier, où il a grappillé du temps de jeu lorsqu’il était autorisé à soulager Perišić, Dimarco a également soigné ses rapports avec les tifosi de la Curva Nord et les autres. Lors de la finale de Coupe d’Italie remportée face à la Juve (1-0), il n’a pas regardé les cinq dernières minutes en se cachant derrière une serviette. Cette saison, ses performances régulières en Serie A et en C1 en ont fait une valeur sûre. À titre d’exemple, aucun joueur intériste n’avait délivré cinq passes en Ligue des champions depuis… Samuel Eto’o, en 2009-2010. Soit l’année de la dernière victoire de l’Inter (et d’un club italien) en Ligue des champions, alors que la bande d’Edin Džeko n’a jamais été aussi proche de vivre à son tour cette entrée dans l’histoire. Comptez sur Dimarco pour dépoussiérer ce souvenir dès que possible.
Par Andrea Chazy