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FC Metz : le doigt sur le bouton de l’ascenseur
Dans le sillage des Girondins de Bordeaux, chez qui toutes les alarmes sont actionnées, un autre club historique de Ligue 1 coule en silence. Après sa déroute 6-1 à Rennes de dimanche, le FC Metz pointe à quatre points de la place de barragiste et cinq du maintien. Et les Lorrains ont tout intérêt à profiter de la trêve internationale pour se ressaisir, car les lendemains risquent d'être difficiles.
Marc-Aurèle Caillard en a marre. Alors il gesticule, gueule et fusille du regard tout ce qui est blanc et inerte autour de lui, avant d’aller chercher pour la quatrième fois le ballon au fond de ses filets. On ne joue alors que la 55e minute de ce Rennes-Metz, et le gardien messin s’en prendra deux de plus par la suite. Mais sur cette action, c’est une vague rouge qui a submergé toute une défense sans que celle-ci n’esquisse un seul mouvement de brasse pour tenter de rester à la surface. La course de Martin Terrier, la passe dans le bon tempo de Flavien Tait, le jaillissement de Hamari Troaré faisant suite au poteau, la reprise de Serhou Guirassy : le tourbillon breton a tout emporté. Une fois siphonné, le FC Metz n’aura que ses yeux hagards pour pleurer.
6-1 au compteur : Rennes grimpe sur la boîte, Metz n’en boîte que plus. Au niveau comptable, ce résultat ne change foncièrement pas grand-chose. Déjà parce que les Rouge et Noir ne boxent pas dans la même catégorie. Ensuite, les Grenats étaient avant-derniers de Ligue 1 au coup d’envoi et le seront toujours au coup de sifflet final. Mais cette gifle doit enfin permettre aux Lorrains de prendre conscience d’une chose : leur place dans l’élite est en péril.
Metz around
Pendant de longues semaines, à force de vivoter sur des match nuls et vierges (quatre 0-0 depuis février dernier) et de s’enorgueillir de courtes défaites contre des gros comme Marseille (1-2) ou Nice (0-2), le FC Metz s’est caché derrière son petit doigt. Le petit doigt en question : une défense présentée comme hermétique, rassurante et devant être le socle des futurs succès. Un argument parfait pour minimiser son inexistence offensive. Trois minuscules buts ont été inscrits en 2022, et un seul a mené à la victoire : celui d’Ibrahima Niane à Reims. C’est peu, pour ne pas dire rien. Alors en attendant que les offensifs se réveillent, Antonetti et son staff ont continué d’empiler les joueurs défensifs, pensant naïvement que leur salut ne tient qu’à ce filon. Jusqu’à l’explosion de ce dimanche.
Les sept éléments partis disputés la CAN pendant presque un mois, les blessures (Centonze, Udol, N’Doram, De Préville pour ne citer que les plus handicapantes), les suspensions (dont celle de Pajot), des recrues hivernales à intégrer (Candé, Jemerson, Amadou et Mafouta), les satisfactions de la saison passée (Boulaya, Pape Matar Sarr) qui semblent avoir déjà la tête ailleurs : voilà tant d’autres facteurs susceptibles d’expliquer les difficultés mosellanes. Ce serait pourtant occulter la plus flagrante de toutes : l’impossibilité de traduire sur le terrain la hargne de son coach Frédéric Antonetti. Ses poings serrés pour exprimer sa rage en début de saison lors de la réception du PSG et son altercation avec Sylvain Armand lors d’une soirée lilloise pourraient bien demeurer les deux seules images marquantes de la saison du FC Metz. Le Corse, écopant d’une suspension de sept matchs fermes, n’a depuis pas eu l’occasion d’observer depuis la tribune ses hommes en faire autant.
« 6-1, c’est sale »
Alors à quoi servira ce « très mauvais après-midi » en Ille-et-Vilaine ? Peut-être à « se remettre à l’endroit », si l’on en croit les propos de Benoît Tavenot, l’adjoint présent sur le banc : « On a été absent à tous les niveaux. C’est le premier match où on explose. Je ne pensais pas qu’on allait assister à un tel naufrage. » Dans un sursaut de lucidité, il refuse de se trouver de nouvelles excuses et en appelle à l’orgueil de ses joueurs, jusqu’ici globalement épargnés : « On doit assumer, 6-1, c’est sale. Le problème du FC Metz, ce n’est pas l’arbitrage ou la pelouse. C’est ce qu’on fait ! Dès le départ, on a été passifs. On a un sprint de neuf matchs, il n’y a plus rien à calculer ! Ou ça nous permet de nous sauver, ou ça va nous couler. »
Metz s’endort dans son sommeil, c’est un fait. Et il avait besoin d’être pincé de la sorte avant d’affronter des concurrents directs comme Bordeaux, Clermont et Lorient. Dans son histoire moderne, c’est-à-dire depuis la première relégation en Ligue 2 sous l’ère Molinari en 2002, le club à la croix de Lorraine a appris à descendre, à encaisser les coups d’un foot professionnel toujours plus exigeant. Depuis cette date, il n’a pas su rester plus de trois saisons consécutives en Ligue 1. Cela ne l’a pas empêché de revenir dans l’élite, parfois plus fort, parfois plus conscient de ses limites. Quand on tombe à pic, on voit le vide sous ses pieds et on peut au minimum tergiverser pour savoir comment atterrir avec le moins de dégâts possible. À Metz, la chute est progressive, lente, et le club ressent à peine la baisse d’altitude. Il est peut-être encore temps d’en prendre conscience pour, au mieux, tenter de redresser la barre ou, au pire, s’organiser pour rebondir ensuite.
Par Mathieu Rollinger