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Faites place
« Je suis arrivé en roi, je repars en légende. » Jusqu’au bout, Zlatan Ibrahimović aura eu les bons mots, ceux qui marquent. Le Suédois va donc quitter le PSG après quatre saisons dans la capitale. Il y avait une histoire avant lui, il y’en aura encore une après lui, mais l’histoire de Zlatan Ibrahimović au PSG est unique et éternelle. C’est tout simplement le meilleur joueur de l’histoire du club qui s’en va. Au sommet.
178 matchs, 152 buts, 53 passes décisives et une gueule. Voilà, avant les deux derniers matchs de la saison (Nantes et la finale de la Coupe de France contre l’OM), ce que va laisser Zlatan Ibrahimović dans la capitale. Des chiffres qui auront aidé à garnir le palmarès du club (quatre titres de champions, trois coupes de la Ligue, une Coupe de France, trois trophées des Champions), mais aussi a donné une certaine crédibilité à un projet qui fête seulement sa cinquième année d’existence. À l’aube de fêter les 45 ans du club de la capitale, la place de Zlatan Ibrahimović dans l’histoire du club peut donner lieu à débattre. D’un point de vue émotionnel, des joueurs comme Pauleta, Raí ou encore Safet Sušić occupent une place à part. Surtout parce qu’ils renvoient à une autre époque. Celle d’un Parc des Princes avec une âme, celle d’un club sans autant de moyens financiers, celle d’un club qui ne gagnait pas grand-chose, aussi, pour prendre la période du Portugais par exemple. Mais minimiser l’apport de Zlatan au club de la capitale aux millions de QSI serait lui faire offense. Offense à son talent, à ce qu’il a montré, dit, fait, donné aux gens qui aiment le club ou tout simplement au football français. Qu’on le veuille ou non, Ibrahimović aura crédibilisé le PSG de QSI, mais aussi, un peu, la Ligue 1. D’aucuns avanceront qu’il n’a jamais daigné parler en Français publiquement, qu’il s’amusait avec les défenses de Ligue 1 comme un père avec ses enfants, qu’il méprisait à tout va, qu’il jouait avant tout pour lui. Oui, c’est vrai. Mais c’était un leader. Un homme qui adorait se construire dans l’adversité. Dans la rage. Alors qu’on le disait sur la fin, cramé, usé, Ibrahimović termine la saison de Ligue 1 avec des chiffres stratosphériques : 36 buts, 13 passes. Sur le site officiel du club, l’homme – qui ne prend que trop rarement la parole – a fait sa communication : « Le PSG est devenu ces dernières années un club star à l’éclat international et j’aurai pris une part majeure dans cette métamorphose. Le temps est venu pour moi d’emprunter un nouveau chemin » .
Comme toujours, tout est ramené à sa personne. Il est comme ça, le Roi Ibra, mégalo. On se demandera toujours où se situe la frontière entre son personnage et l’homme qui se cache derrière. En tout cas, Ibrahimović ne pouvait partir du PSG – club où il sera resté le plus longtemps dans sa carrière – qu’au sommet. Il sort de sa saison la plus réussie en club et achèvera son aventure parisienne par une finale de Coupe de France contre l’OM. Une porte de sortie à son image. Le hasard fait souvent bien les choses, surtout s’il part sur un titre. Dans un club qui aura vu défiler George Weah, Ronaldinho ou encore David Ginola, Ibrahimović restera le plus grand, car il ne s’est pas « fait » à Paris. Quand il débarque, au cœur de l’été 2012, c’est déjà une star. Un mec qui a joué à l’Ajax, la Juventus, l’Inter, le Barça et l’AC Milan. Son CV parle pour lui. Il aura eu le mérite d’être encore plus fort au PSG.
Intimidant et dominateur
La France a découvert une force de la nature, un type dont le premier but en Ligue 1 résume à lui tout seul sa domination. Contrôle de la poitrine au-dessus du crâne de Bourillon et reprise dans la foulée. Physiquement, il se dégageait du Suédois une bestialité rarement vue au PSG. Peut-être chez Weah, mais par intermittence. Ibra, lui, aura été régulier. Dominateur. Intimidant pour ses adversaires, mais aussi ses partenaires. Récemment, un ancien intime du vestiaire parisien racontait cette scène : « À l’entraînement, lors des oppositions, il ne voulait prendre que les jeunes avec lui. Et se frotter aux titulaires. Il avait cette envie de gagner. Moralité, son équipe gagnait systématiquement. » C’est aussi ça que le PSG et Leonardo étaient venus chercher avec le Suédois. Un état d’esprit de conquérant. Un winner. Avant son arrivée, le PSG courrait après un titre de champion depuis 1994. En quatre ans, Ibrahimović et sa bande auront triplé le palmarès du club. Mais celui de 2013 était le plus important. C’était le premier. Celui qui complexait tant les dirigeants Qataris. Au fond de lui, Zlatan Ibrahimović s’est senti chez lui au PSG, car il en était le roi. Personne au-dessus de lui. Que ce soit financièrement ou sportivement. Son rêve de gagner la Ligue des champions s’est envolé à l’endroit où ses limites se voient le plus : dans les gros matchs à enjeux. Alors oui, il aura fait le boulot sur certaines confrontations (Barcelone 2013, Chelsea cette saison), mais l’histoire retiendra que le PSG d’Ibrahimović s’est arrêté quatre fois de suite en quart de finale et que le grand Suédois a raté sa dernière sortie contre Manchester City. Zlatan Ibrahimović n’était pas parfait. Son arrogance et son sens de la formule en auront choqué certains, mais le PSG vient de perdre un joueur capable de changer le cours d’un match où il ne se passe rien sur un tir. Un dribble. Une passe. Une inspiration. Le PSG se sépare d’un compétiteur rare. Unique. Mythique. Il ne faut pas chercher à le remplacer, il est irremplaçable, mais apprendre à vivre sans lui. Grandir, quoi. C’est une étape importante dans l’histoire du club. C’est un fait, le PSG fera sans doute moins peur. Mais que la France en profite, car une fois sa carrière terminée, le joueur reviendra au club dans un rôle d’ambassadeur : « Ce ne sont pas des adieux, simplement un au revoir. Je suis venu ici en roi et j’en repars comme une légende. Mais je reviendrai ! » Au fond, savoir si Zlatan Ibrahimović est le plus grand joueur de l’histoire du club, c’est une question sans intérêt. Les époques sont différentes. Le football est différent. Le PSG est différent. Zlatan Ibrahimović aura évolué quatre ans au PSG et en France. Et on en aura bien profité. Vraiment. Alors pour tout ça, Ibra, merci. Merci encore. Et bon vent.
Par Mathieu Faure