- Euro 2024
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- Autriche-France (0-1)
Kanté, la part des louanges
Au terme d’un match imparfait, que les Bleus ont réussi à rafler face à une Autriche aussi accrocheuse que nerveuse, N’Golo Kanté, absent en match officiel avec l’équipe de France depuis l’été 2022, a retrouvé le chemin des compliments, comme si de rien n’était.
Il est revenu dans le décor un dimanche de juin, à Clairefontaine, et a assuré du bout des lèvres qu’il n’avait pas changé tant que ça, qu’il restait, au fond, « quasiment le même » et qu’il se sentait humblement capable de « jouer [sa] part dans cet Euro ». Une quinzaine de jours plus tôt, son sélectionneur de toujours, Didier Deschamps, avait été, lui, assez clair sur le sujet : « Il a pu retrouver toutes ses capacités footballistiques et athlétiques, et dans ma tête, la situation était claire. Il fallait le laisser retrouver du temps de jeu tout en en laissant à des jeunes qui avaient montré de belles choses au Qatar. J’ai pris cette décision de le rappeler, car je considère, aujourd’hui, que l’équipe de France sera plus forte avec lui. » Sur ce coup, Deschamps n’avait pas tort : titularisé lundi soir pour la première fois depuis plus de deux ans en match officiel avec l’équipe de France pour ce qui était le premier plongeon des Bleus dans cet Euro 2024, N’Golo Kanté aura été face à l’Autriche le meilleur Français sur le gazon, et de très loin.
Il aura même été franchement phénoménal, jouant l’intégralité de la rencontre, faisant l’équilibriste entre les différents étages de son équipe avec brio, affichant la même endurance que par le passé face à des adversaires pourtant plus percutants que ceux qu’il a l’habitude de croiser en Arabie saoudite, empilant les projections, les lancements bien sentis, les ballons grattés et les transitions défensives de haut vol, et se baladant, ce qui est sans doute le plus bluffant, dans les petits espaces pour en ouvrir des plus grands à ses coéquipiers. Sans surprise, il est sorti du terrain avec le trophée de MVP alors qu’à cinq minutes de la fin du temps réglementaire, le public tricolore s’est mis à hurler son nom. Il y a quelques jours, auprès de Ouest-France, Kylian Mbappé notait que Kanté « s’est bonifié avec le temps. Non seulement il court beaucoup, mais il court intelligemment. Il sait se placer, anticiper, lire le jeu. Comme si cette qualité était devenue sa spécialité. » On en a eu une nouvelle preuve.
Les moments signatures
Aligné en pointe basse d’un milieu à trois, qui s’est replié en 4-4-2 ou en 4-1-4-1 en fonction des temps de la rencontre, Kanté, « rayonnant » selon Deschamps, n’était pourtant pas dans une configuration idéale, le triangle qu’il a formé avec Saliba et Upamecano n’ayant pas dégagé une grande complémentarité. Cela n’a pas empêché celui qui n’a jamais perdu avec les Bleus en compétition majeure (12 victoires, 4 nuls) de sortir certains moments signatures au milieu des coups de serpe, à l’image de son retour dingue dans les pieds de Patrick Wimmer en fin de match (85e) ou de son ouverture parfaitement dosée pour Thuram (67e). Si Griezmann n’a pas encore trouvé son rôle exact, on retiendra aussi sa bonne entente avec Adrien Rabiot, lui aussi attendu et au rendez-vous sur plusieurs plans, que ce soit dans la diversité de ses ouvertures balle au pied ou dans son impact sans ballon (5 ballons récupérés, soit seulement un de moins que Kanté).
L’équipe de France n’a pas sorti un match parfait, loin de là. Elle a encore beaucoup d’ajustements à faire en phase offensive, a parfois manqué de rythme et a souvent reculé trop facilement. Il faudra cependant souligner le fait qu’au-delà d’une énorme occasion pour Baumgartner sauvée par un élastique Maignan (36e), elle n’aura pas concédé grand-chose et affiché une vraie force défensive. Il faudra également garder en tête qu’elle aura rendu l’Autriche frileuse avec ballon en l’attendant bas et en la piquant rapidement dans les grands espaces. Mbappé n’y est pas pour rien, lui qui a pas mal tenté, peu réussi, même si le but contre son camp de Wöber vient de l’une de ses percussions, et a fini la soirée avec le nez brisé. Le piège était là, ces Bleus restent toujours aussi difficilement lisibles, mais ils l’ont évité et sans trop se mettre dans le rouge. C’est peut-être avant tout l’essentiel au moment d’entrer dans un grand tournoi.
Par Maxime Brigand, à Düsseldorf