- Euro 2016
- 8es
- Italie-Espagne (2-0)
Fàbregas, l’instant zéro
Rarement l'Espagnol se sera montré aussi invisible que contre l'Italie. Un rendement qui découle d'une saison ratée. Problème : quand Cesc joue ainsi, c'est tous ses collègues qui en pâtissent. Un constat davantage valable pour la Roja que pour d'autres équipes.
Il est le symbole de cette Roja qu’on peine à reconnaître. Et surtout de ce milieu de terrain autrefois si intraitable. Lui, il s’appelle Cesc Fàbregas, il a 29 ans et il joue à Chelsea. Autrefois, il était l’un des meilleurs meneurs de jeu du monde. Mais ça, c’était avant. Car depuis un an, Cesc n’est plus. Incapable de retrouver son talent, Cesc ne voit plus le jour, que ce soit avec Chelsea ou son pays. Pourtant, rien ne laissait présager une telle descente aux enfers. Lorsqu’il quitte le Barça pour la Premier League durant l’été 2014, Fàbregas sort une saison mémorable, avec 23 passes décisives toutes compétitions confondues et un championnat d’Angleterre glané sous les ordres d’un tuteur nommé José Mourinho. Depuis, plus rien, donc.
Et sa prestation lors de cette triste élimination face à la Squadra Azzurra est à l’image de ce qu’est devenu Fàbregas : un fantôme. Un gars pétri de qualités à qui on fait inlassablement confiance et qui déçoit (presque) tout le temps. Opposé dans le cœur du jeu à des Italiens qui crevaient la dalle, le Londonien n’a pas existé. Aucune influence, aucune passe clé, aucune présence physique, aucun repli défensif décisif, aucune inspiration offensive, aucun mouvement gênant pour l’adversaire… C’est peu dire que Fàbregas a loupé son match. Et qu’il a loupé du même coup son Euro, tant ses deux premières rencontres avaient été du même acabit, avant de hausser un minimum son niveau devant la Croatie.
Rendez-leur Xavi
Le problème, c’est que l’Espagne et son tiki-taka se repose essentiellement sur son milieu à trois, hyper performant lors de la période 2008-2012, pour maîtriser son sujet, dominer la bataille de l’entrejeu et faire vivre sa possession de balle. Or, si l’un des trois n’est pas performant ou ne s’acclimate pas à cette homogénéité typiquement catalane, la Roja ne marche plus et perd ses moyens. Exactement ce qui s’est passé contre l’Italie. Alors oui, le talent individuel fait la différence face à des nations bien inférieures. Mais contre la justesse croate ou la tactique italienne, ça ne passe pas. La Roja ne peut que déjouer, malgré les coups géniaux toujours possibles d’Andrès Iniesta. Conséquence : le trio Busquets-Iniesta-Fàbregas s’est fait bouffer par la triplette De Rossi-Parolo-Giaccherini. Avec un Busquets moyen, les espaces laissés par les hommes de Vicente del Bosque ont été intelligemment exploités par ceux d’Antonio Conte, alors que Cesc n’en a trouvé aucun. Chaque contre-attaque était un supplice, et les doubles champions d’Europe en titre ont dû compter sur un David de Gea en feu pour ne pas récolter une défaite beaucoup plus sévère.
Koke au placard
Dès lors, comment expliquer le choix du sélectionneur, qui préfère laisser Fàbregas sur le pré quatre matchs d’affilée et se passer des services d’un Koke, sous-utilisé pendant la compétition ? Non, le joueur de Chelsea n’est pas le principal responsable (loin de là), mais la réponse reste tout de même un mystère. Forcément, ce débat va gonfler en terre espagnole. Et si son avenir chez les Blues n’est pas menacé avec cet échec, son statut de titulaire sera logiquement remis en question lorsque la saison reprendra. D’autant que pour ce huitième de finale, son futur entraîneur, Conte, était aux premières loges pour voir le désastre du bonhomme. « J’ai un peu parlé avec Antonio Conte, déclarait Fàbregas dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport avant la rencontre. C’est un grand entraîneur, un gagnant. Il m’a dit ce qu’il voulait faire avec moi, ce qu’il voulait faire à Chelsea, et plusieurs autres choses qui resteront privées. J’ai une grande envie de travailler avec lui. Maintenant, j’aimerais qu’il commence à s’occuper de Chelsea le plus tôt possible. Je voudrais qu’il se concentre dès mardi sur son nouveau travail. » Raté. Le milieu continuait : « Il m’a fait une très bonne impression. » Le contraire n’est sûrement pas vrai.
Par Florian Cadu