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Fabio Paim, le vrai espoir perdu du Portugal
À côté de lui, Ricardo Quaresma a connu une magnifique carrière. Il aurait pu être Cristiano Ronaldo, voire mieux. Au lieu de ça, Fabio Paim joue aujourd'hui en Lituanie après avoir évolué au Qatar, en Angola et à Malte. Adoubé par Cristiano Ronaldo en personne il y a dix ans, l'ancienne promesse du football portugais a finalement choisi de tout foutre en l'air.
Impliqué dans un scandale sexuel, Fabio Paim nie en bloc. « Je n’ai pas été détenu. Si je dois aller au poste de police pour éclaircir la situation, je le ferai » , déclarait le joueur du FK Nevesis en Lituanie il y a quelques jours dans la presse portugaise. Le porte-parole de la police de Kaunas, Kestutis Kasciukevicius, avait pourtant confirmé la veille que le joueur formé au Sporting venait d’être arrêté pour une histoire de viol. En 2012, Paim avait déjà été brièvement détenu suite à une accusation de viol de la part d’une jeune femme de 20 ans. Des histoires comme ça, le jeune loup de cité ne les compte plus, tout comme il ne compte plus les erreurs de parcours qui l’ont conduit au cœur du territoire lituanien après des passages par Malte, le Qatar et l’Angola (entre autres). Si personne en dehors du Portugal n’a eu le temps de connaître ce talent de précoce avant sa chute, c’est que cette dernière a commencé tôt, très tôt.
En fait, la carrière au plus haut niveau du sosie d’Eddy Gordo dans Tekken s’arrête à la fin de son passage infructueux à Chelsea. D’après l’intéressé, la dégringolade a même commencé plus tôt. « Mes parents m’ont toujours tout donné, mais il ne pouvaient pas me donner ce que l’Academia du Sporting avait à m’offrir » , avoue-t-il dans les colonnes de Mais Futebol au Portugal. Élevé dans un quartier mal famé, Paim a toujours eu du mal avec la discipline. Son talent fou n’a pas arrangé les choses. Le gourou du centre de formation du Sporting, Aurélio Pereira, expliquait dans un documentaire en 2010 qu’à 13 ans, beaucoup de pays étaient prêts à lui offrir un club pour qu’il représente leur sélection chez les séniors. Même Cristiano Ronaldo, alors âgé de 20 ans, n’a aucun mal à reconnaître la supériorité de son compatriote au micro des médias anglais. « Si vous pensez que je suis un crack, alors attendez de voir Fabio Paim. »
300 000 euros claqués en un an
Si la phrase culte, restée dans les annales, sonne comme un slogan, ce n’est sans doute pas un hasard. Le joueur de Nevesis est à l’époque représenté par le même homme que CR7, un certain Jorge Mendes. Et comme avec beaucoup de ses meilleurs clients, le super-agent tisse un lien solide avec le nouveau Cristiano, qu’il accompagnera une fois en vacances à Rio de Janeiro. Il fallait au moins ça et un contrat millionnaire pour mettre la concurrence hors d’état de nuire. « Tous les agents se bousculaient pour le représenter » , se souvient Aurélio Pereira. De son propre aveu, Paim gagnait plus d’argent à 17 ans que beaucoup de professionnels adultes de l’effectif principal. « En plus de ça, à chaque fin de saison, on me versait dans les 100 000 euros de primes liées à mon nombre d’apparitions et de buts inscrits. »
Ce contrat en or obtenu par Jorge Mendes se transforme rapidement en cadeau empoisonné pour un gamin qui n’a jamais eu d’argent auparavant. Putes, soirées, voyages et même voitures – il conduisait une grosse Mercedes sans permis -, le natif d’Estoril claque environ 300 000 euros en un peu plus d’un an. « C’est facile de dépenser de l’argent… Très facile. Une fois, je suis parti en vacances au Mexique avec un coéquipier. Je n’avais rien pris avec moi à part ma carte de crédit. Je suis rentré de là-bas avec quatre valises pleines » , en souriait-il dans le documentaire Quem quer ser Fabio paim (Qui veut être Fabio Paim ?) de 2010. Des excès auxquels s’ajoute une erreur cruciale, celle de quitter les dortoirs de l’academia pour rentrer dans sa cité lisboète dans un souci d’authenticité. Très vite, les rapaces de la rue profitent de sa naïveté pour se faire prêter de l’argent qu’ils ne rendront évidemment jamais.
Parcourir le monde pour nourrir sa famille
Aujourd’hui, Fabio Paim n’a plus rien. Plus d’argent, plus de bolide, plus de Jorge Mendes. « Il m’a prévenu tellement de fois, il m’a dit de faire attention… Il était bon avec ma famille et moi. Mais quand tu ne veux pas te faire aider, personne ne peut le faire à ta place » , théorise-t-il pour Mais Futebol. Si sa mauvaise gestion de l’argent n’a pas aidé, c’est son comportement sur le terrain et aux entraînements qui lui portera le coup final. De fait, Fabio Paim a toujours été comme ça. Chez les jeunes, il travaillait déjà peu et n’aimait pas l’autorité. Il essuyait fréquemment avertissements et suspensions. Parfois, on le punissait en le mettant sur le banc. Mais quand c’était le cas, il n’y restait jamais bien longtemps. Les résultats passant au-dessus de tout, ses entraîneurs finissaient toujours par le faire entrer, et étaient rarement déçus de leur choix.
La vitesse, les dribbles et la farandole de buts qui accompagnaient ses entrées pardonnaient tout le reste. Son passage en prêt à Chelsea, ses entraînements aux côtés de Lampard, Terry, Carvalho, etc, et ses discussions avec Didier Drogba, qui le raccompagnait chez lui en voiture, ne changeront rien à la personnalité d’un jeune homme qui dit ne pas avoir su faire la différence entre le hobby et le métier de footballeur au moment de passer chez les pros. Aujourd’hui, cette erreur de jugement le pousse à voyager pour subvenir à ses besoins et à ceux d’une famille qui ne jouira finalement jamais de la richesse démesurée d’un enfant initialement destiné à sillonner les plus grands terrains d’Europe et du monde. Fabio Paim aurait pu briller. Il a préféré flamber.
Par William Pereira