- Euro 2020
Euro 2020 : merci pour ces moments
Tout était réuni pour que l'Euro 2020 soit un long calvaire, ça aura été tout le contraire. Malgré un format que l'on ne voudra plus revoir, la seizième édition pensée par Michel Platini est une belle réussite. Une agréable respiration.
L’Euro 2020 s’est terminé comme toute compétition digne de ce nom, avec des héros salués, des malheureux critiqués puis consolés, et des bons points distribués. Si les lendemains qui chantent sont pour l’Italie, il reste à tous les autres les souvenirs, tristes ou joyeux, d’un tournoi qui appartient désormais à la grande histoire du sport roi. Avant de conjuguer définitivement cette seizième édition au passé, il faut se réjouir d’avoir pu vivre une telle parenthèse enchantée, à une époque où le foot doit plus que jamais être une bouffée d’air frais plutôt qu’un boulet à traîner. La saison écoulée, marquée par la crise sanitaire et un calendrier éreintant pour tout le monde, joueurs comme (télé)spectateurs, pouvait faire craindre un Euro au rabais, entre les acteurs cramés, la formule à 24 laissant à désirer, et un tournoi éclaté aux quatre coins de l’Europe. Il n’en aura finalement pas été question. Et si cet Euro était celui de la réconciliation avec le ballon rond ?
Gloire au jeu
L’édition préférée de Michel Platini a d’abord accouché d’une réconciliation avec le jeu. Ce n’était pourtant pas gagné après les conclusions tirées de l’Euro 2016 et de la Coupe du monde 2018 : le football ne pouvait plus appartenir qu’aux monstres froids, défensifs et allergiques au spectacle. En réutilisant la même recette qu’en Russie face à l’Allemagne en ouverture de son Euro, l’équipe de France avait déprimé les romantiques refusant de voir les Bleus rafler un deuxième trophée d’affilée en appliquant la méthode pragmatique de Didier Deschamps. Ouf, ce n’était qu’une illusion. Que restera-t-il alors de ce championnat d’Europe ? Une phase de poules un poil trop longue, la faute à ce foutu format à 24 offrant le paradoxe d’avaler beaucoup de rencontres pour trop peu de sélections éliminées tout en abolissant le fameux troisième match sans enjeu réservé aux coiffeurs.
Il restera aussi l’image de Christian Eriksen s’effondrant sur la pelouse de Copenhague lors de la deuxième rencontre de la compétition, laissant presque penser que cet Euro 2020 ne pourrait pas aller jusqu’au bout en cas d’issue dramatique. Mais le Danois est devenu un miraculé pour lequel il ne fallait surtout pas s’arrêter de jouer, même si l’UEFA aura encore une fois démontré son manque de tact à cette occasion. Comme à chaque tournoi, il y a les buts destinés à finir dans les dizaines de compilations YouTube rythmées par une infernale musique techno (Patrik Schick, Paul Pogba, Andriy Yarmolenko) ; les belles découvertes amenées à briller ou bien à rester les joueurs d’un tournoi (Joakim Maehle, Mikkel Damsgaard, Roman Yaremchuk, Denzel Dumfries, Tomáš Holeš) ; les rencontres passées à la postérité (France-Suisse, Croatie-Espagne, Italie-Espagne, etc.) ; et toutes les belles histoires racontées par ce genre d’évènements.
Le foot, ce n’était pas (encore) mieux avant
Quand l’Euro 2016, d’une piètre qualité technique et tactique, aura surtout existé grâce aux vagues de supporters marrants animant l’Hexagone le temps d’un mois, le spectaculaire cru 2021 (une moyenne de 2,78 buts par match, un record depuis l’Euro 1976) a consacré les équipes joueuses (l’Italie, le Danemark, l’Espagne, etc.) au détriment des vieilles machines rouillées (France, Allemagne, Portugal). La Nazionale, vainqueur séduisant, ou le Danemark, sont plus que des promesses. Ce seront peut-être, dans les années à venir, les nouveaux modèles à suivre, les premières preuves qu’il est possible de gagner sans proposer une idée minimaliste du jeu. L’Euro 2020 aurait pu être le dernier coup de massue sur le crâne des fans dégoûtés à force de manger des matchs chiants. C’est finalement le tournoi de l’espoir.
Par Clément Gavard