- Journée mondiale du tourisme éco-responsable
Et si les supporters devenaient éco-responsables ?
Ils sont des millions à se déplacer chaque week-end pour admirer, soutenir et célébrer les leurs à travers les terrains de football du monde entier. Mais le supporter, qu'il soit présent à chaque échéance ou uniquement sur les évènements internationaux, fait autant de bien à l'équipe encouragée que de mal à Mère Nature. Pourtant les solutions existent.
Raisonner le déplacement
« En France, trois millions, c’est le nombre de kilomètres qui seraient parcourus chaque week-end en raison du football par les spectateurs, les journalistes, … 80 fois le tour de la terre. » , rapportait il y a peu le journal the Ecologist. Des chiffres qui donnent le tournis, mais surtout, interrogent. Est-il possible d’envisager d’autres moyens de limiter l’impact écologique de ces déplacements ? Pourrait-on soutenir les siens à travers le monde tout en rendant grâce à la nature qui nous entoure ? En résumé, peut-on limiter les crachats des avions, trains et bus pourris, aussi louable que l’intention de jouer le 12e homme soit ? Pas sur. Epineuse, la question se heurte en effet à de nombreuses contraintes géographiques. Si au niveau local, covoiturage ou véhicules tournants aux produits purs peuvent régler la question, franchir les mers et les continents sans rejets nocifs paraît impossible. Et puis se taper un Guingamp-Moscou dans un bus qui tourne au colza, c’est bien beau, mais faut pas pousser le bouchon.
Jordan Trombetta, responsable du Chico Mendès FC, association et club de football ayant pour mot d’ordre : « Beau Jeu, Ecologie et Justice » !
« Il y a un travail qui a été commencé en 2013 au niveau gouvernemental. Le rapport expliquait qu’on pouvait réduire les distances parcourues de 15% juste en modifiant l’organisation des tournois et championnats et de prendre en compte le facteur géographique. En terme d’environnement, c’est bien, en terme d’assise territoriale aussi. Évidemment, la solution de dire « on rapproche tout » est trop radicale. On ne peut pas empêcher Lyon d’aller à Moscou pour un match de Coupe d’Europe mais on peut leur demander de faire de la compensation de CO2. Ce n’est pas fait. Quand tu regardes l’Euro 2016, ils ont fait une stratégie globale, mais c’est assez drôle, il n’y a pas grand-chose. Ils te donnent de grandes phrases, mais sans aucun programme pour compenser les émissions de toutes les fédérations. Ce serait le minimum. On pourrait prendre exemple sur les entreprises solidaires. Ce qu’on préconise, c’est d’avoir des transports doux. Tu peux virer tout ce qui est avion, bus, diesel, etc. Aux JO de Londres par exemple, ils avaient été précurseurs en la matière. Il y avait pleins de navettes qui tournaient à l’électrique, ils avaient mis à disposition des vélos… Au niveau local tu peux agir. Au niveau global, c’est plus compliqué, car c’est le cœur même de l’événement que tu remets en cause. Soit tu te dis ça en vaut pas la peine, soit tu te dis qu’à côté tu vas compenser. »
Gérer ses déchets
Une bière, puis deux, puis trois. Un sandwich triangle avalé sur une aire d’autoroute. Un paquet de chips au fromage englouti le long des pavés. Un coca salvateur après une longue journée de chants qui font transpirer. En voyage, ces gestes semblent incontournables pour subsister et se sustenter. Pourtant, et aussi savoureuse soit la 3e pinte de l’après-midi, le recyclage tire la gueule. Pas de poubelles jaunes, bleues (d’ailleurs, elles sont toutes vertes pour vous), et c’est toute la nature qui trinque pour ces bouts de plastiques ou bouts de verre lâchement abandonnés sur la voie publique et dans les espaces verts. Un crime, ou presque, puisque ces objets mettront des milliers d’années à se décomposer et endommageront sans aucun doute ce que la Terre nous a laissé en cadeau. Supporters, n’agissez plus comme des malfrats et jetez vos déchets dans un endroit approprié. Sinon, vous aurez la mort des générations futures sur la conscience. Ni plus ni moins.
L’avis de Jordan
« Il pourrait y avoir des choses beaucoup plus éco-friendly. En tant que supporter, à moins que tu viennes avec ta gourde de bière bio (rires), on ne te met rien à disposition pour respecter tout ça. Les instances organisatrices pourraient mettre des critères en disant que tel débit de boisson s’installe là, mais avant, il signe une charte écologique. Quand tu regardes le Brésil 2014 et ce qui va arriver en France, c’est certain qu’il y aura ce problème. Il n’y a pas d’éducation à la nature, ce sont des moments uniquement dédiés à la consommation. Les produits dérivés ont leur effet. Le transport de tout ça pollue. Tout ce qui est à base de plastique dans le processus de fabrication comme de déplacement, pollue énormément. Une fois que t’as dit ça… Il yaurait beaucoup de choses à faire sur les gobelets, les plastiques, la façon dont on met à disposition un cadre avec des endroits pour jeter les choses, pour les recycler, des messages de prévention… Tout ça diminuerait beaucoup la pollution. Le principe, c’est plus le produit est local et bio, moins tu pollues. Si tu manges un Mc Do, les produits ne sont pas locaux. Si tu manges une pita en Grèce par exemple, ça va. Ce serait intéressant qu’en 2016 par exemple, il y ait un travail autour du Made In France. »
Choisir son maillot
On ne le sait que trop peu, mais les maillots achetés puis portés coutent beaucoup à l’écologie. Ne serait-ce que par leur fabrication, entre le coton et les produits chimiques utilisés pour floquer noms, devise ou sponsors. Soutenir son équipe sans en avoir les couleurs ? Une hérésie direz vous. Pourtant, deux points devraient rassurer les plus sceptiques face à cette recommandations : un, les supporters les plus acharnés sont toujours ceux qui font face à la tribune, torse-nu, fasse t-il -7 degré un soir d’automne à Minsk. Deux, le port de la tunique de footeux est déjà proscrit dans le code du style, que ce soit dans la rue, au bureau ou en soirée. Dès lors, l’exclure du stade ne serait qu’une avancée légère vers son processus d’éradication bénéfique.
L’avis de Jordan
« Ton maillot est produit en coton. 80% du coton provient d’Ouzbekistan qui est un pays qui ne respecte pas les droits des enfants. Et ces gamins ramassent le coton. Ensuite, le coton demande énormément d’eau. Donc cela créé un déséquilibre dans l’usage de l’eau. Ensuite, tout ce qui pollue, c’est la teinture. Ce sont des perturbateurs endocriniens, des produits chimiques qui à force, te créent des problèmes aussi pour ta santé. Au Chico Mendes, nos maillots sont recyclés à partir des maillots ou tee-shirt que tu as déjà chez toi. Et les teintures sont faites ensuite avec des produits naturels. Le maillot doit être beau, mais aussi exemplaire. Après, les grandes entreprises comme Nike et Adidas je m’en méfie, car tu ne sais jamais avec eux si c’est du green-washing ou pas. »
Ravaler son mégot
Ouais, super, on est en week-end loin de bobonne et des gamins. Alors, on boit des coups et pour les accompagner, on fume une blonde, une tige, une doure… Saloperie de vice diablement bon. Que vous crachiez vos poumons importe guère d’ailleurs. Mais ensuite, on en fait quoi du mégot ? Ne mentez pas, on vous a vu l’écraser sous la semelle de votre Nike droite. Bad boy attitude certes, mais comportement qui coute cher puisque le petit bout jaune ou blanc (parce que vous êtes un amateur de roulées), va pourrir les alentours pendant de nombreuses années. On vous laisse tirer tranquillement, mais pensez à protéger ce qui peut l’être.
L’avis de Jordan
« On est sur le problème du mégot. On les retrouve partout. La France pour l’Euro 2016 souhaite faire des stades sans tabac. Ils le placent sur un point de vue « respect, moins de nuisance » mais tu peux aussi l’envisager d’un point de vue environnemental. »
Quid des fumigènes ?
« Je ne l’ai jamais étudié, c’est une bonne question. Je ne connais pas le type de gaz qui en émane. Après c’est une bombe aérosole donc je dirai que ça a de l’impact. Mais le problème de ça, c’est plus où tu le mets ensuite. On en revient à la gestion du déchet. Le problème se situe plus là, à savoir si les produits chimiques que cela contient vont finir dans une rivière par exemple. »
Dématérialiser les billets
La SNCF s’y est mise, les compagnies aériennes aussi. Dès lors, pourquoi ne pas proposer la dématérialisation de la place du match en l’insérant directement dans l’écran de votre Smartphone dernière génération ? Moins de papier, plus de simplicité et le système ne s’en avérerait que plus pratique. Le vice pourrait même être poussé plus loin si tous les tickets d’un groupe de supporters étaient regroupés sur le portable du kapo. Un seul Iphone, des centaines de places : ne reste qu’à avoir de la batterie.
L’avis de Jordan
« C’est une solution contestée. D’abord, cela dépend d’où vient ton papier, s’il ne cause pas une déforestation massive, s’il est recyclé ou pas… Ensuite, le vrai problème, c’est de connaître l’impact environnemental de ton Smartphone. Quand tu vois que Google, Apple investissent énormément dans des serveurs et que ces serveurs participent au réchauffement climatique… Faut faire attention à cette solution qui est peut être plus polluante qu’il n’y paraît. Il ne faut pas revenir au 3310 pour autant mais les solutions existent, comme le fair-phone par exemple. »
Savoir où déposer son urine
Conséquence logique de l’ingestion de litres de houblon, le syndrome de la pisse irrépressible n’épargne pas le supporter en déplacement. Dès lors, que faire ? Se soulager contre un mur à l’abri des regards (ou presque) ? Ou bien respecter les âmes sensibles et se rendre dans un lieu adéquat ? Sacré dilemme coincé quelque part entre les convenances et l’esprit pratique.
L’avis de Jordan
« Il vaut mieux pisser dans la rue, clairement. Et c’est encore mieux si tu as bu de la bière bio ! Sur la question de l’assainissement, je ne comprends pas pourquoi on ne fait pas des toilettes sèches, comme dans les festivals. Il n’y en a pas dans les stades alors que ça n’a rien de compliqué. Ça n’utilise pas d’eau, et en plus ça ne laisse pas d’odeur. D’ailleurs, ça pourrait être un outil de sensibilisation assez énorme. »
Limiter les bastons
Entendons-nous : déplacement de supporters n’équivaut pas à coups portés. Pourtant, et dans de rares cas, l’autre conséquence logique de la bière amplifiée par une rivalité entre deux équipes peut conduire à des situtations dramatiques : destructions, sang versé.. Et forcément, la remise en ordre nécessite de dépenser certaines ressources (l’eau du karcher, les machines de déblaiement). Un coup de poing donné à un adversaire est un coup de poing porté à la nature.
L’avis de Jordan
« Le problème du sang, c’est que ce n’est pas propre, c’est dommage (rires) ! Ça entache la voie publique, donc forcément, ça ne peut pas être écologique. Se bastonner dans ou en dehors des stades, sur des bases superficielles, ce n’est de toute façon pas lié à nos valeurs. »
Par Raphael Gaftarnik