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- Algérie-Cameroun (2-1)
Et l’Algérie s’effondra
Entamée depuis le mois de janvier et une désillusion à la CAN, la pente descendante de la sélection algérienne, version Belmadi, s’est achevée sur un écroulement total face au Cameroun, en barrages retour de la Coupe du monde 2022.
Ils étaient 30 000. Une floppée d’inconditionnels, dépensant ses quelques et parfois rares économies afin de prendre place, dès 11 heures (coup d’envoi à 21h30), au stade Mustapha Tchaker de Blida. La longue attente d’un peuple plongé dans une pandémie interminable et une crise sociopolitique toujours plus importante. Ce match face au Cameroun devait alors servir de bouffée d’oxygène, d’ultime plaisir pour égayer un quotidien loin d’être rose. Mais comme souvent, les Algériens se sont laissés bercer par les illusions du sport, trahis par leur propre équipe nationale.
Des larmes et des larmes
Les plus philosophes diront : « Allez, ce n’est que du football. » La réalité de cette élimination est pourtant beaucoup plus amère. Elle est venue toucher la population algérienne dans l’un de ses seuls plaisirs : le ballon rond. Enorgueillie par un légitime retour au premier plan, auréolé d’un sacre en Coupe d’Afrique des nations 2019, l’Algérie a longtemps semblé au-dessus du lot. Et malheureusement, la chute n’en fut que plus brutale. Homme de pragmatisme et d’idées parfois arrêtées, Djamel Belmadi a dès lors personnifié, volontairement ou non, cette lente fin de cycle.
Sur le terrain, la faillite s’est d’abord caractérisée par des choix tactiques qui n’auront pas tardé à atteindre leurs limites. Revenu à un historique 3-5-2, mis en place sous l’égide de Rabah Saadane, les inspirations du sélectionneur ne se seront jamais vraiment matérialisées. Difficile ainsi d’expliquer les changements tardifs alors que le onze de base nécessitait un sérieux ajustement, au fil d’une partie verrouillée par les Camerounais. Compliqué en effet de demander à Youcef Atal (17 minutes de jeu dans les jambes en ce mois de mars) d’enchaîner les efforts durant près de 120 minutes ou de ne pas voir les difficultés de Ramiz Zerrouki, submergé par la tension palpable et heureusement couvert par le brillant Ismaël Bennacer. D’un point de vue mental ensuite, les Verts ont été les victimes malheureuses de leur propre pression. Menés d’entrée, les Algériens ont plongé dans de trop récurrents travers, précipitant leurs gestes, manquant de sérieuses occasions et laissant l’adversaire installer un faux rythme, chez eux, devant leur public. Il faut dire que dans ce marasme local, il ne faudrait pas oublier de féliciter les Lions indomptables, respectueux d’un plan de jeu préalablement établi et portés par des cadres sérieux.
Où sont passés les leaders ?
Il serait néanmoins cruel (comme le football) d’imputer cette mauvaise passe au seul Belmadi. Meneur de troupes reconnu, le technicien a effectivement vu ses leaders le lâcher au dernier moment. En tête de liste, Youcef Belaïli. Si on le savait inconstant, le Brestois n’a pas tardé à se montrer irritant. Sa nonchalance caractéristique, parfois charmante, s’est dès lors transformée en agaçante suffisance, faite de simulations, de dribbles inutiles et de tentatives en solitaire. Le résumé d’un rendement frustrant, notamment par la présence de Saïd Benrahma sur le banc ou l’apparition, encore trop tardive, de Rachid Ghezzal dans les ultimes instants.
Vient le tour de Riyad Mahrez. Irréprochable à Manchester City (meilleur buteur du club cette saison avec 22 réalisations), l’ailier et capitaine ne semble plus être concerné en équipe nationale. Depuis près d’un an, et malgré une CAN satisfaisante, ce manque d’abnégation ne correspond aucunement à son standing. Preuve en est, le bilan chiffré de ses cinq dernières sorties internationales : aucun but, aucune passe décisive. Parmi les autres symboles, une attitude parfois désinvolte, observée sur de nombreuses situations critiques. Des trentenaires aguerris, auxquels pourraient s’ajouter Raïs M’Bolhi, Aïssa Mandi ou Djamel Benlamri, venus clore ce long bal enchanté, sur une note tristement mauvaise.
À tort ou à raison, beaucoup penseront donc qu’il est aisé de critiquer les individualités, qui plus est à chaud. Mais cette nécessaire remise en question, évoquée par bribes depuis un petit moment, doit désormais être actée. Pour que les efforts d’Islam Slimani, pas le plus élégant, mais certainement le plus vaillant et qui disputait là ses dernières qualifications pour un Mondial, ne s’évaporent pas dans le vide. Pour que le football algérien redonne à son peuple ce qui lui reste de plus cher : sa fierté.
Par Adel Bentaha