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Et Edy resta…
Il avait donné sa démission. Le club lui avait même trouvé un remplaçant. Edy Reja aurait dû dire adieu à la Lazio Rome. Et puis, à la surprise générale, il reste, et sera donc sur le banc romain, ce soir, contre la Fiorentina. Retour sur quatre jours complètement insensés.
Irréel. Surréel. Digne d’un film de science-fiction. Ne cherchez pas d’autres adjectifs, mieux vaut s’arrêter à ceux là. Les quatre jours que vient de vivre la Lazio sont absolument hors de la réalité. Quatre jours de doutes, de rumeurs, d’indiscrétions, de secrets, pour finalement… rien. Edy Reja était l’entraîneur de la Lazio mercredi matin. Edy Reja est toujours l’entraîneur de la Lazio ce dimanche matin. Entre temps, les fameux quatre jours de grand n’importe quoi, qui ont secoué toute la planète biancoceleste. 96 heures chrono, qui ont abouti sur ces mots, prononcés par le coach de la Lazio en conférence de presse, devant un parterre de journalistes médusés : « Nous avons ponctué cette parenthèse avec la promesse d’essayer de faire le mieux possible ensemble. Mon aventure continue avec la Lazio » . Point. Silence dans la salle. Incompréhension. Tout ce tintamarre pour ça ? Oui. Edy Reja avait seulement besoin d’un peu d’amour. Il en a visiblement reçu. Et tout est bien qui finit bien, avec des bisous, des câlins et des fleurs roses.
Arnaque au mercato
Pour tout comprendre, il faut remonter à dimanche dernier. La Lazio, qui vient de perdre en Europa League face à l’Atletico Madrid (1-3), se déplace à Palerme, avec une équipe totalement remaniée à cause des blessés et des suspendus. Fatigue morale et physique, réussite qui fuit, la soirée est un véritable cauchemar. Les Romains s’inclinent 5-1, leur pire défaite depuis 2007. Mardi matin, le président Lotito, accompagné de son fidèle acolyte Igli tare, tels Minus et Cortex, se présente au centre d’entraînement de Formello. Et là, ça pète. Reja est réprimandé pour ses choix tactiques, mais aussi pour sa constante référence au fait que le mercato hivernal n’ait pas été celui qu’il aurait voulu. En effet, Reja avait demandé des renforts, notamment pour palier aux nombreuses blessures.
Les dirigeants, après lui avoir promis Honda et même Nilmar, lui ôtent finalement Djibril Cissé et Sculli, lui offrant le très modeste Candreva. Alors, à chaque défaite de la Lazio, Reja se fait un malin plaisir d’appuyer là où cela fait mal. « Dommage que le mercato ne m’ait pas permis de remplacer les absents par des joueurs du même calibre » assure-t-il après le revers contre le Genoa (3-2), avant de se montrer ironique après la défaite contre l’Atletico Madrid : « J’espère pouvoir obtenir quelques renforts au mercato de mars » . Toutes ces piques finissent par irriter Tare, le directeur sportif, qui lui fait savoir lors de ce colloque à trois. La réunion se termine dans une ambiance plutôt froide. C’est tout ? Non, évidemment. Le lendemain, à 14h, le couperet tombe. Edy Reja démissionne de son poste d’entraîneur de la Lazio.
Gigi De Canio dans les starting-blocks
Une démission à quelques heures d’un départ pour l’Espagne, où la Lazio doit jouer son match retour contre l’Atletico Madrid : voilà de quoi prendre tout le monde de court. Le club, pris au dépourvu, refuse illico la démission. Il faut dire que c’est déjà la troisième fois en deux ans que le vieux Edy fait le coup. Mais cette fois-ci, il semble déterminé. Du coup, Reja, presque sous la contrainte, part avec ses joueurs pour Madrid. Le soir, en conférence d’avant-match, il refuse de parler de cette affaire, et se contente uniquement de parler d’une « divergence d’opinion » . Le match passe totalement au second plan, la Lazio est battue 1-0 par les Colchoneros, avec la tête ailleurs. A la fin du match, le technicien laisse encore tout le monde dans l’attente. « Dormons tranquille, et nous règlerons tout ça demain » . Tu parles.
Le lendemain, vendredi, rien de neuf à l’horizon. Ou presque. L’équipe rentre à Rome, tandis que les rumeurs pullulent dans la presse italienne. On parle d’Alberto Bollini, le coach de la Primavera, pour remplacer Reja. Puis de Simone Inzaghi. Et enfin de Gigi De Canio, qui semble la piste la plus plausible. Et cela se confirme lorsque le président Lotito passe deux heures dans son bureau avec l’ancien coach de Lecce, pour lui proposer d’entraîner la Lazio jusqu’au mois de juin. Ce dernier accepte. Et pendant ce temps, dans un paradoxe total, Reja dirige l’entraînement d’une équipe qui, mine de rien, doit défendre sa troisième place au classement deux jours plus tard, contre la Fiorentina. Un joli bordel.
Lotito-Zola-Reja, l’assommoir
Samedi. Jour de la vérité. C’est là que le nouvel entraîneur de la Lazio doit être annoncé. La première nouvelle du jour parle d’un Reja qui souhaiterait guider les siens une dernière fois, dimanche soir, au Stadio Olimpico. Bah ouais, histoire de se dire au revoir, quoi. Sans nouvelle de son président, qui fait le mort, Reja se rend à nouveau à l’entraînement, avec des joueurs qui n’y comprennent rien. Et là, boum, nouvelle bombe. Après avoir reçu l’aval de De Canio, Lotito organise un entretien avec Gianfranco Zola. Sur le principe, l’ancien entraîneur de West Ham a l’air d’accord pour s’assoir sur le banc laziale, mais préfèrerait un contrat de deux ans plutôt qu’une pige de trois mois. Le club annonce alors une conférence de presse à 17h30. Les journalistes sont là. Tout le monde attend le dénouement. La conf’ est repoussée. 18h. 18h30. 19h. 19h30. Les micros frétillent, mais toujours personne.
Lotito débarque à Formello et se retrouve nez à nez avec Reja, pour la première fois depuis la démission. Pour lui confirmer son départ? Les deux hommes, seul à seul, s’expliquent droit dans les yeux. 20h20. La salle de presse s’impatiente. Ca y est. Une silhouette se dessine. Non, ce n’est pas Gigi De Canio. Ni Zola, ni Inzaghi, ni Bollini, ni même Lippi. C’est ce bon vieux Reja. Le coach s’assoit, et lâche ces mots, auxquels personne ne se serait attendu. « J’ai parlé avec le président, annonce-t-il. Mardi, j’ai senti que je n’avais plus sa confiance, et j’ai renoncé à mes fonctions. Dans chaque famille, il y a des divergences et des moments de difficultés et de litiges. Nous avons éclairci la situation. Je tiens à cette équipe, à ces couleurs, à ces garçons. Il ne m’a pas semblé juste de terminer mon rôle dans ce club en m’en allant ainsi. Nous nous sommes expliqués, et notre aventure continue pour cette année. Et comme le dit le président : « pour le futur » » . D’accord. Ah, au fait, ce soir, il y a un match contre la Fiorentina. Et un derby dans une semaine. Au cas où quelqu’un s’en souviendrait encore.
Eric Maggiori