- Amical – Espagne/Venezuela
Espagne-Venezuela, le concours de Miss
L’Espagne reçoit ce soir la 46ème équipe au classement FIFA, en amical, à Malaga. Autant dire que Miss Monde n’en peut plus de se sentir belle. Pourtant le Venezuela est l’une des équipes qui ont le plus progressé en quelques mois. Plus qu’un test ?
Des Miss, du pétrole et Hugo Chavez : voilà de quoi il ne faut plus parler en soirée si vous coupez des citrons dans une cuisine en compagnie d’une jolie Vénézuélienne. Pour marquer des points, mieux vaut laisser pourrir les poncifs et tout miser sur la dernière hype à Caracas : la Vinotinto (l’équipe de foot couleur vin rouge). Pendant des siècles, le football, dans le pays de naissance de Simon Bolivar, n’était rien. A Caracas, on rêvait d’être Johan Santana, lanceur des Mets, et de jouer devant 45 000 personnes au Citi Field de New York. Il a fallu attendre le Mondial U20 en 2009 en Égypte pour voir un bolivarien se joindre à un événement organisé par la FIFA. Cette année-là le miracle s’achève en huitièmes de finale contre la Corée. En 2011, Farias commet un nouvel exploit et emmène sa génération (Rondón, Arango, Orozco) en demi-finale de la Copa America après avoir éliminé le Chili en quart. Le Paraguay remportera la demi-finale aux pénos et le Venezuela terminera finalement quatrième. Mais c’est lui le vrai vainqueur en 2011, pas l’Uruguay.
Cependant les exploits misérables d’une équipe de seconde zone ne sont rien à côté des cadors espagnols. Pendant des années, la Roja a été le lieu de toutes les frustrations. Depuis 2008, elle est devenue l’orgueil national. Del Bosque pourrait bien mériter un jour le Prix Nobel de la Paix : « Notre obligation est de prendre soin de la sélection » . Tout va bien dans le monde merveilleux de la Roja (qui jouera en bleu ciel ce soir). Alors le Venezuela, franchement, on s’en fout. La rivalité des derniers clasicos, c’est ça qui préoccupe : « Il s’agit d’épisodes qui n’ont rien de gratifiant mais avec les joueurs qui viennent en sélection, la bonne ambiance et l’ordre qui y règnent ne s’en sont jamais ressentis » . Del Bosque est un chêne qu’on n’abat pas. Vendredi dernier il annonce la non-sélection de Torres, vache sacrée de l’effectif. La Moustache est claire et juste : « Je suis très peiné de ne pas sélectionner Fernando Torres mais mon rôle est aussi d’être juste avec ceux qui arrivent fort derrière » . Soldado profite du strapontin empoisonné et est bien obligé de faire semblant: « J’espère que Fernando sera à l’Euro » . Voilà le prix de la bonne ambiance.
La Roja vraiment (trop) sûre d’elle
Bien sûr il est difficile d’imaginer autre chose qu’un ballet de ballons au milieu de terrain de la Championne de tout contre la sélection sud-américaine. Déjà en juin à Puerto La Cruz (300 km à l’Est de Caracas), l’Espagne remportait l’un de ses rares matchs amicaux. Malgré plus de 30 degrés, 80% d’humidité et les vacances toutes proches, les Espagnols en passaient trois en une seule mi-temps à la Vinotinto (Villa 7’, Pedro 20’, Alonso 44’, score final 3-0). Ce soir à Malaga, il fera un temps parfait pour faire rouler le ballon sur le gazon de la Rosaleda (15 degrés, 60% d’humidité). Torres a disparu de la liste et Villa a le tibia en deux pièces. L’équipe de Del Bosque doit donc essayer de nouveaux tours en attaque. Llorente, Soldado, Negredo ou bien personne du tout façon Barça 2011-2012 ? C’est la seule question existentielle que pose ce match. Le stock de milieux de terrain rassure et fait peur en même temps : Silva, Mata, Thiago, Navas, Iniesta, Xavi, Fabregas, Busquets, Alonso. Les choix tactiques du coach à moustache : voilà ce qui intéresse la ménagère. Il pourrait bien commencer comme à l’entrainement d’hier : Casillas/Iraola-Ramos-Piqué-Jordi Alba/Alonso-Busquets/Iniesta-Cesc-Silva/Llorente. Soldado devra attendre un peu avant de casser l’ambiance.
Du coup, le seul qui ne s’intéresse pas qu’à lui-même et se méfie du match de ce soir c’est toujours le même… « Le Venezuela a beaucoup progressé dans le ranking FIFA, est en bonne voie pour se qualifier pour la Coupe du monde, a un excellent entraineur, de bons joueurs qui évoluent dans des championnats étrangers. Pour moi c’est un bon rival (…) Je m’attends à un Vénézuela compliqué, bien placé sur le terrain, avec de la personnalité et un bon football » avertit Vincent Du Bois. Et comme souvent, le sage a raison. Troisième de la zone Amérique du Sud après quatre matchs (avec notamment une victoire contre l’Argentine en octobre), le Venezuela est sur les bons rails pour taper un grand coup et se qualifier pour son premier Mondial. Cesar Rabias, l’homme qui a fait oublier le Baseball à 27 millions de personnes en même temps, prévient. Son équipe « a beaucoup progressé » depuis son dernier match contre les champions du monde. Sur 21 joueurs, 17 jouent à l’étranger (dont Rondon à Malaga, Arango à Mönchengladbach, Rosales à Twente, Miku à Getafe , Orozco à Wolfbourg ou Rincon à Hambourg). « Le Venezuela est maintenant une équipe très compétitive qui a très envie d’aller au Mondial » ajoute le coach violet. Tant pis pour les Miss, le pétrole et Hugo Chavez.
Par Thibaud Leplat, à Madrid.