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Espagne : Le précédent allemand
En 1972, l'Allemagne de l'Ouest est sacrée championne d'Europe. Deux ans plus tard, elle remporte la Coupe du monde. Enfin, en 1976, elle atteint la finale de l'Euro. Favorite, la Mannschaft s'incline, à la surprise générale, face à la Tchécoslovaquie. L'Espagne est prévenue. Car, parfois, l'histoire se répète.
C’était la finale rêvée. La finale attendue. L’Allemagne de Beckenbauer face aux Pays-Bas de sa majesté Johan. La revanche de 1974, l’opposition entre les deux équipes les plus imposantes du moment. Sauf qu’entre la logique d’avant-match et le verdict au coup de sifflet final, un fossé peut se creuser, plus ou moins profond. L’Allemagne, celle de Joachim Löw, l’a encore expérimenté à ses dépens jeudi dernier. À Kiev, le tant attendu affrontement entre Mannschaft et Roja n’aura pas lieu. En 1976, la RFA jouait le rôle de l’Espagne. Comme l’escouade de Vicente del Bosque, elle n’avait pas été loin, elle aussi, de se voir priver de la dernière étape de la compétition. Pour atteindre la finale, l’Allemagne de l’Ouest avait dû en passer par la prolongation pour dominer la Yougoslavie, pays hôte (4-2). Dans l’autre demi-finale, les Pays-Bas avaient, eux aussi, été contraints de s’échiner une demi-heure supplémentaire face à de surprenants Tchécoslovaques. Trente minutes de trop (3-1, score final). Échec total pour les Bataves.
En 1976, l’élimination des Néerlandais, avides de revanche, constituait plutôt une bonne nouvelle pour les Allemands. La Tchécoslovaquie venait certes de renverser un monstre, mais on parle d’une équipe qui n’était même pas présente lors de la Coupe du monde 74. Leback to backsemblait promis à la Mannschaft. Non seulement, la RFA était championne du monde et d’Europe en titre, mais son club phare, le Bayern Munich, venait de remporter sa troisième Coupe des champions de rang. Reste qu’en face de cette Allemagne hégémonique, se présentait un ensemble parfaitement huilé, dont la consistance collective peut conduire à la rapprocher de l’Italie de Prandelli, même si son style typiquement est-européen arrête là le jeu des comparaisons.
Une Espagne devenue conservatrice ?
Pour le moment, l’Espagne de Xavi affiche le même CV que l’Allemagne de Beckenbauer. Ces deux équipes sont toutefois aussi distinctes que le jour et la nuit. D’un côté, un ensemble qui maîtrisait les fondamentaux mieux que personne, mais n’enthousiasmait guère au-delà de ses frontières. De l’autre, une escouade révolutionnaire dans sa capacité à s’accaparer la gonfle et par la constitution physique de la grande majorité de ses joueurs, élément qui est venu mettre le holà à la surenchère athlétique. En 74, quand elle triomphait des Pays-Bas, la Mannschaft enfilait, elle, l’habit d’un réactionnaire entravant la prise de pouvoir d’une génération briseuse de tabous. À voir l’évolution du jeu espagnol en 2012, on peut toutefois se demander si, devant la propension de la Roja à dominer le secteur de la possession de balle, tout en se créant le minimum vital d’occasions, l’on ne se trouve pas devant la naissance d’une nouvelle forme de conservatisme ?
Revenons aux succès allemands et espagnols. 72 et 2008, d’abord. À chaque fois, le lauréat remporte logiquement le tournoi. L’Espagne n’était, certes, pas passée loin de se faire sortir par l’Italie en quart de finale, mais elle était indéniablement la meilleure équipe de la compétition, comme la RFA qui avait écrasé l’URSS en finale (3-0). 74 et 2010, maintenant. Les deux sélections ont connu un départ poussif, avant d’ajouter une ligne à leur palmarès aux dépens des Pays-Bas. L’analogie est troublante, mais elle s’arrête là, tant les deux sélections proposaient un football aux antipodes. L’Espagne va-t-elle toutefois continuer à marcher dans les pas dans la RFA, au point de s’incliner en finale de l’Euro ? En 76, les Allemands de l’Ouest s’étaient fait surprendre par Ondrus, Masny, Dobias, et… Panenka. Menés 2-0, ils étaient parvenus à arracher la prolongation en égalisant à la 90e minute, mais leur hégémonie avait pris fin lors de la séance de tirs au but. La Panenka venait de naître. Un geste que maîtrise parfaitement Andrea Pirlo, n’est-ce pas ?
Par Thomas Goubin