- Euro Espoirs
- Quarts
- France-Ukraine (1-3)
Les Bleuets ne gagneront pas l'Euro, et alors ?
Comme à chaque fois depuis 1988, les Bleuets ne gagneront pas l'Euro Espoirs. C'est un échec, mais ce n'est pas un drame et ça ne dit rien de l'avenir de l'équipe de France.
Comme à chaque fois depuis 1988, les Bleuets ne seront pas champions d’Europe. La défaite face à l’Ukraine en quarts de finale (1-3), ce dimanche soir, a enterré les derniers espoirs de voir une nouvelle génération succéder à celle d’Éric Cantona, Laurent Blanc ou du capitaine Jean-Luc Buisine, 35 ans plus tard. C’est dommage, mais ce n’est pas un drame. Cette très longue disette n’émouvrait en vérité personne si on ne la rappelait pas tous les deux ans à chaque gamelle des Français, qui ont d’ailleurs disputé leur troisième Euro d’affilée après treize années d’absence entre 2006 et 2019. Au fond, le résultat n’est pas très important, il ne l’a jamais vraiment été dans ces compétitions de jeunes, à part bien sûr pour les joueurs, qui ne peuvent pas cracher sur le grand bonheur procuré par un titre. Le public, lui, s’en remettra assez vite. Ce tournoi est davantage un passe-temps, une curiosité et une occasion de voir du foot en clair (861 000 téléspectateurs devant W9 pour ce France-Ukraine) qu’une machine à émotions et à conclusions.
Le petit poids de l’Euro Espoirs
Il n’est pas question de minimiser la déception de cette sortie de route des Bleuets dès les quarts de finale, il suffisait de voir les visages de Sylvain Ripoll et de ses joueurs après le coup de sifflet final pour constater leur désillusion. Mais qu’est-ce que cette élimination raconte du football tricolore et de son avenir ? Qui se souvient des vainqueurs de l’Euro Espoirs ? Qui se souvient de la défaite française aux tirs au but en finale contre la Tchéquie en 2002 ? Qui peut citer les noms des champions de 1988 ? L’Allemagne avait participé aux trois dernières finales (deux remportées) et la Mannschaft, éjectée dès les poules de la Coupe du monde en 2018 et 2022, a rarement paru aussi faible et inquiétante, à moins d’un an d’accueillir son championnat d’Europe. Le discours aurait-il été différent en cas de sacre français dans une semaine ? Peut-être, mais celui-ci n’aurait pas garanti une prochaine décennie florissante chez les grands, comme cette élimination n’annonce pas un grand désert.
L’équipe de France a été jusqu’en finale lors de quatre des sept derniers Mondiaux, ce qui est autrement plus significatif qu’un mauvais Euro Espoirs. Encore plus quand la compétition arrive au bout d’une saison déjà interminable, avec des jeunes joueurs quasiment tous titulaires dans leurs clubs respectifs. Ce qui peut expliquer la cascade de blessures ces derniers jours dans les rangs français et un certain manque de fraîcheur physique. Les plus cyniques diront même que ces vacances précoces sont les bienvenues pour que la préparation estivale des Bleuets ne soit pas trop chamboulée avant la nouvelle saison, surtout qu’ils devraient être plusieurs à changer de club. À 22 ans, Khéphren Thuram, passé à côté de son Euro, a bouclé un exercice à 55 matchs joués toutes compétitions confondues, entre Nice et la sélection. Il faut aussi prendre cette donnée en compte et rappeler que les calendriers de plus en plus chargés ne rendent service à personne, en tout cas pas aux joueurs.
Les JO, une autre histoire
Une question centrale peut cependant s’imposer : à un an des Jeux olympiques en France, Sylvain Ripoll est-il l’homme de la situation ? Le technicien aura bientôt besoin de sa deuxième main pour compter ses échecs à la tête de la sélection des Espoirs depuis sa nomination en 2017 (demi-finales à l’Euro 2019 ; quarts à l’Euro 2021 ; premier tour aux JO 2021 ; quarts à l’Euro 2023). « Il ne faut pas tout mélanger. Les JO, c’est à part, expliquait Ripoll devant la presse après la rencontre. Évidemment que ce résultat va engendrer des critiques. L’objectif assigné par la Fédération était les demi-finales, et on n’est pas dans les clous. On va digérer ça, prendre un peu de recul… Et on discutera avec la direction après. » Le fameux projet de jeu chez les sélections de jeunes, où le turnover est permanent, ressemble un peu à une chimère, mais l’ancien coach de Lorient ne semble pas non plus être capable de transcender un groupe et d’en tirer le maximum pour aller au bout d’une compétition. Voilà peut-être le seul enseignement à tirer de l’élimination des Bleuets de cet Euro en Roumanie et Géorgie, alors que les JO représentent une perspective bien plus intéressante et revêtent un enjeu plus important, notamment parce qu’ils vont se tenir en France. Ce sera différent, c’est vrai, puisque ce devrait être avec Kylian Mbappé et d’autres renforts expérimentés (Raphaël Varane ? Hugo Lloris ? Antoine Griezmann ?). En attendant, l’Ukraine, l’Espagne, Israël ou l’Angleterre fêteront un titre de champion d’Europe Espoirs en fin de semaine et tout le monde l’aura déjà oublié à la fin de l’été.
Par Clément Gavard