- Espagne
- Retraite
Pas ça Enzo, pas aujourd’hui...
L’expérience de footballeur pro du fils aîné de Zinédine et Véronique Zidane s’est refermée à 29 ans. Si elle donne un bon coup de vieux, cette annonce rappelle également qu’une carrière de rejeton est loin d’être évidente. Chapeau le fils.
Être le fils de Zizou le père, c’est le risque d’être perpétuellement ramené à la figure paternelle. Enzo Zidane ne le sait que trop bien. Alors que AS annonçait mardi que l’héritier allait prendre sa retraite à l’âge de 29 ans, impossible de ne pas penser qu’à cet âge-là, Zinédine signait au Real Madrid, palier doré dans une carrière déjà bien construite. Le Real, c’est là que les choses auraient pu devenir sérieuses pour Enzo, devenu un pilier du Castilla (78 matchs entre 2014 et 2017), mais c’est aussi là que tout s’est arrêté : le 20 mai 2023, c’est sous les couleurs de son huitième club en huit ans, le CF Fuenlabrada, et contre son ancienne maison qu’il disputait son dernier match pro. Drôle de coïncidence (ou pas), c’est aussi un 20 mai que le petit Zinédine faisait ses premiers en D1 avec l’AS Cannes, en 1989.
La gloire de mon père
Cette décision de quitter le monde cruel du foot, si l’intéressé ne l’a pas encore expliquée, ressemble au résultat d’une réflexion mûrie depuis plusieurs semaines. Rien à voir avec la manière dont est tombé le rideau sur la carrière de son père, sur un coup de tête un soir de juillet 2006. À Berlin, ZZ parachevait sa légende entre ombre et lumière et hissait son nom de famille dans un Olympe quasi impossible à accéder pour le commun des mortels. Même pour quiconque s’essaye aux roulettes dans le jardin familial, même en étant formé au Real Madrid, même en évoluant sous ses ordres.
Enzo Zidane aura tout donné, et personne ne pourra lui enlever : il a été footballeur, il a goûté au Real Madrid, il a côtoyé son idole Luka Modrić, un des descendants footballistiques de son paternel. C’est même Papa qui l’a lancé sous le maillot madrilène à la mi-temps d’un 16e de finale de Coupe du Roi, un 30 novembre 2016. Ce soir-là, il ratait, mais tentait une roulette avec son pied droit, et marquait le quatrième but de la Maison-Blanche, qui l’emportait 6 buts à 1. Le rêve de voir la classe ultime du chauve se réincarner dans l’aîné de ses fils, un droitier d’1,85 mètre lui aussi, prenait, quelques années avant que les trois autres bambins durent aussi supporter un nom.
Au nom du père, et du sien
Le nom. L’illusion un brin égoïste du supporter madridista de toujours voir un Zidane briller sous son maillot s’est évaporée, malmenée par la dure réalité du football. Pour la première fois depuis 2001, et depuis le départ cet été de Théo (le 3e), il n’y a plus de Zidane au Real Madrid. Si la retraite d’Enzo file un bon coup de vieux, elle rappelle que se faire un nom et accomplir son rêve n’est pas si aisé dans le football. Zidane, comme Zeus, avec qui il partage les initiales, a engendré des « demi-dieux ». C’est la carrière de ce dernier qu’a embrassée celui qui est né à Bordeaux en 1995. Jusqu’à ses 28 ans, il aura vadrouillé du National 3 à la Liga, jusqu’au stade Paul-Lignon de Rodez. Tant de stades de deuxièmes divisions européennes loin d’être faciles à dompter que son auguste paternel n’aura même pas eu le loisir de fouler.
Pendant plus de 200 matchs, il a supporté le poids d’un nom, et d’un prénom, associé à l’idole de son père, Enzo Francescoli. Il endossait même le numéro 5 lors de son passage à Rodez. Il floquait « Enzo » sur son maillot, et, conformément aux familles espagnoles comme pour se libérer d’un héritage, il apposait Fernández, le nom de famille de Véronique, sa maman, à celui de Zidane. Il jouait à Fuenlabrada et Majadahonda. Beaux symboles que ces deux villes localisées dans la banlieue de Madrid. Si proche, si loin de là où Zizou a tant fait vibrer. À 29 ans, il reste à Enzo encore beaucoup à découvrir, du temps avec ses trois filles, et du bonheur. Et ça, les Zidane savent l’apporter.
Par Ulysse Llamas