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Enfin réconciliés ?
Six ans après, Knysna est définitivement rangé au fond du placard. L’équipe de France fait de nouveau rêver. Explications.
C’est leur victoire à eux. À défaut d’avoir soulevé le championnat d’Europe en France, ce qui aurait certainement entraîné une liesse populaire comparable à l’été 98, les Bleus ont gagné l’adhésion de leur public. 20 827 téléspectateurs de moyenne devant la finale sur M6 (73% de part d’audience, sans compter beIN Sports, qui n’a pas communiqué ses chiffres), avec un pic à 23,4 millions de personnes devant leur télé, la fan zone de la tour Eiffel bondée et fermée plus de deux heures avant le coup-d’envoi, 84% des Français qui aiment leur équipe nationale selon un sondage (IFOP) publié ce dimanche 10 juillet (soit 38 points de plus par rapport au début de l’Euro)… En bref, un pays tout entier derrière sa sélection nationale.
Renouveler ses héros
« Il y a une réconciliation » , note Philippe Moreau Chevrolet, dirigeant de l’agence MCBG Conseil. Revigorée il y a deux ans au Brésil, la cote d’amour des Bleus remonte en flèche. Parce que le public a besoin de « figures » qui sortent du lot, Dimitri Payet et Antoine Griezmann incarnent ce rabibochage entre les Bleus et leurs supporters. « On vit dans un pays avec une forte défiance envers les élites, les gens installés, explique le communicant. Le public a besoin de nouveaux visages, de renouveler ses héros. » Plus que des joueurs exemplaires, le communicant insiste sur l’obligation pour l’équipe de France de se mettre « au même niveau que les gens » et le besoin de ressembler aux Français « pour ne pas susciter la méfiance » .
Une opération conduite soigneusement par la Fédération, au premier rang de laquelle on trouve le sélectionneur national, Didier Deschamps, et ce, en dépit de ses conférences de presse sans intérêt. « Deschamps, il a une communication minimaliste, mais qui fonctionne bien, paradoxalement. C’est maîtrisé, efficace, explique Philippe Moreau Chevrolet. Les gens s’identifient à lui, à l’instar d’Aimé Jacquet à l’époque de 98. C’est devenu un vrai personnage sympathique, grâce par exemple à sa marionnette aux Guignols. Il a l’air de bosser, de respecter les gens, c’est quasi imperceptible mais déterminant. » Même sa dentition lui rapporte des points : « On s’attache aux défauts. »
Il faut des résultats
Est-ce que ce tour de force aurait pu être réalisé si Didier Deschamps avait sélectionné Karim Benzema ? Il aurait alors fallu que la Benz’ aille chercher l’Euro. « La victoire efface tout » , assure Philippe Moreau Chevrolet. Reste que pour les Bleus, tout cela reste fragile. Comme toujours, une cote de popularité est plus facile à briser qu’à construire. « Pour obtenir l’adhésion des supporters, il faut des résultats » , rappelle le communicant. Surtout dans un pays qui ne brille pas par sa culture en matière de supportérisme (en ce qui concerne l’équipe nationale). Au-delà du sportif, l’engouement autour des Bleus a réussi l’exploit de reléguer au second plan l’état d’urgence et la peur de la menace terroriste. « Il y a un mois, au début de la compétition, on était dans une situation anxiogène, les discours étaient axés sur les enjeux sécuritaires, poursuit Philippe Moreau Chevrolet, ce climat a disparu. On a retrouvé un peuple uni au terrasse des cafés. » Et c’est ça la vraie réussite de cet Euro.
Par Florian Lefèvre
Propos recueillis par FL