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En Italie, on appelle ça « une rimonta »

Par Éric Maggiori
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En Italie, on appelle ça « une rimonta »

La Roma a réalisé ce soir l'exploit de l'année, en éliminant le Barça en quarts de finale de la Ligue des champions. 4-1 à l'aller, 3-0 au retour. Une remuntada ? Non non, c'est une rimonta.

Il y a des soirées qui marquent l’histoire d’un club. Qui marquent l’histoire du football. Ce Roma-Barcelone du 10 avril 2018 en fait désormais partie. La Roma ne pouvait pas le faire. Rattraper un retard de trois buts au grand Barcelone, lorsque l’on est un sympathique quatrième de Serie A qui a perdu trois jours plus tôt 2-0 à la maison contre la Fiorentina, ce n’était pas envisageable. Le remuntadeur remuntadé ? Laissez-nous rire. Pourtant, la Roma avait déjà gagné un premier round avant le coup d’avant : en y croyant. Les joueurs y croyaient, le coach y croyait, le stadio Olimpico y croyait. Ils étaient les seuls ? Peu importe. Ce n’est pas avec l’opinion du peuple que l’on gagne des batailles personnelles, c’est avec sa propre abnégation, ses croyances et son âme.

Alors, dès le coup d’envoi, la Roma a fait ce qu’elle sait faire de mieux cette saison : défendre très haut, avec ses trois soldats Fazio-Jesus-Manolas, l’un des trois montant en permanence sur le porteur du ballon pour couper les lignes. Une technique qui avait fonctionné avec brio face à tous ceux qui se sont aventurés cette saison au stadio Olimpico, qui n’a jamais aussi bien porté le titre de forteresse imprenable. Atlético de Madrid, Chelsea, Qarabağ, Shakhtar, Barcelone : cinq adversaires (et pas des pitres !), 450 minutes jouées, aucun but encaissé. Ce n’est pas un hasard, ça ne plus être un hasard. Deuxième arme, essentielle : marquer vite. Vite pour ne pas avoir à tomber dans la précipitation car, dans ce genre de rendez-vous, le temps est un ennemi redoutable. Džeko a donc pris les choses en main, avec un but de renard dès la 5e minute. Son sixième dans la compétition. Et dire qu’il était à un doigt et demi de partir en janvier pour Chelsea, quelle belle connerie cela aurait été.

Le Barça le sait : pour renverser un tel résultat, il faut être deux. Ou plutôt 22. Une équipe qui joue, et une équipe qui déjoue. Le PSG, il y a un an, avait endossé le costume peu saillant de celui qui déjoue quand les Catalans surjouaient. Un an plus tard, échange de costumes. Le Barça récupère les fringues sales, et les Romains enfilent les habits de lumière. Oui, cela n’est pas arrivé souvent en Ligue des champions lors des dix dernières années : le Barça a tout raté. Valverde a tout raté. La défense a tout raté. Même Messi a pratiquement tout raté, à l’image de ses deux coups francs envoyés dans les tribunes.

Comme une partie d’échecs où l’adversaire perd successivement son cavalier, son fou et sa tour, tout s’est parfaitement goupillé pour la Roma. Et quand Clément Turpin a même osé siffler un penalty contre le Barça, De Rossi a su que le moment était venu pour lui de ne plus être le « Capitan Futuro » . Mais de juste être le Capitaine. Celui du présent. Il y a un an, c’est Francesco Totti qui aurait tiré ce penalty. Désormais, c’est lui, et il n’a pas tremblé.

Il ne manquait alors qu’un petit but. Or, dans ces instants hors du temps, on le sent. C’est un feeling, un instinct, presque une prémonition : la Roma allait le mettre, ce troisième. Tout comme La Corogne allait mettre le quatrième à l’AC Milan. Tout comme le Barça allait mettre le sixième au PSG. C’était écrit. Le Sergi Roberto romain s’appelle donc Manolas. Un coup de tête sur corner au premier poteau. 3-0. Dans les gradins, ça hurle, ça chante, ça pleure, ça se prend dans les bras. La Roma a renversé le Barça. Mais bordel, on l’avait dit : c’était pourtant impossible, non ? Elle n’avait aucune chance ! Oui, sauf que le football n’est pas seulement une question de chance. C’est parfois autre chose. Incontrôlable, imperceptible, indécelable. Ça s’appelle peut-être juste la magie.

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