En finir avec la morale !!!

Les Red Devils ont mangé les Gunners tout crus. Ils auraient pu gagner 3-0 l’aller, easy, et ont défoncé les Gunners 3-1 chez eux au retour. Ne serait-ce que l’espace d’une seconde, Arsenal n’a pu développer son jeu, celui-là même qui enchante les esthètes, les enfants, les béni oui-oui et les présentateurs de Telefoot. La faute à un trio de casseurs flotteurs Carrick – Fletcher – Anderson et au pressing de deux enfants monstres, Rooney et Tevez. Chienne de vie.

Pire. La scène se passe pile poil au cœur du sanctuaire du beau jeu. Au Camp Nou, Chelsea fait sa merde. Fautes flagrantes, déni du jeu, défense à dix dans son camp, le seul Drogba comme menace offensive, les gugusses de Guus ont tout simplement empêché le FC Barcelone, « la plus belle équipe du monde » , de jouer son jeu, pardon, son beau jeu, pardon le plus jeu de l’univers. Sauf que pas question d’en prendre quatre à la mi-temps comme Lyon ou le Bayern. Chelsea a tenu bon, et tant pis s’il fallait mettre le pied, ou le coude, ou Ballack sur le terrain. Et les Catalans de crier au scandale. D’en appeler à l’esprit du jeu, à la morale. « On méritait de gagner » , déplore Pep Guardiola.

Oui, la morale.

Les joueurs de Chelsea ne seraient qu’une bande de sales petites putes, froides, cyniques. Mangeuses d’enfants dès le petit déjeuner. Sans foi ni loi. Et ultralibérales en plus de cela, évidemment. L’argent russe n’a pas d’odeur. Ou alors une sale. Le FC Barcelone, lui, c’est bien connu, est un club de pauvres, qui paie ses joueurs en carambars et sauve des petits vieux de la noyade comme Nadal enchaine les passing shots. Unicef sur le torse, port altier, technique superlative, bonne volonté en guise de pendentif ; dans le monde du football, le FC Barcelone serait le bien absolu. Et le Real Madrid le sale club de droite. Réaliste, sponsorisé par le Roi, les bras longs comme Kevin Garnett et le style aussi sale que les cheveux de Sébastien Tellier. Messi a beau être le sportif le mieux payé d’Espagne et le Barça de Puyol faire des fautes tactiques à 40 mètres comme tout le monde, le cliché persiste et signe.

Ne parlons même pas de la Juve, mais volontiers des deux clubs de sa voisine piémontaise. Au Milan AC le beau jeu et la classe, à l’Inter le désordre et le chaos. Du point de vue du jeu, il est vrai que celui du Milan, organisé autour d’un milieu technique et précis, est plus charmant.

Faut dire que celui de l’Inter, ses joueurs eux-mêmes ne sauraient le définir. Et, si vous lui posiez la question, son Special One d’entraineur vous répondrait en termes de points gagnés, connard. S’il vous répondait. Alors que le propriétaire du Milan AC, un certain Silvio Berlusconi, serait tout content de vous dire comment qu’elle joue bien au ballon son équipe, comment qu’elle est belle et joueuse, comment qu’il en est fier, en vous tapant dans le dos et vous réservant un ballon de Romanée Conti 1982. Ouais mais quand même, si l’Inter existe, c’est bien parce que le Milan ne voulait pas que des joueurs étrangers salissent son maillot… Ma que, tu as un problème, il est pas bon mon pinard ?

Alors c’est quoi la morale de l’histoire dans tout ça ? D’ailleurs, y’en a-t-il une ? Car quelque part, qui sont les plus admirables ? Des mecs super forts qui se font des passes pendant une plombe ou des gaillards qui ont réfléchi à mettre en place la meilleure réponse face à un problème donné, résistent et se serrent les coudes ?

Après tout, le Catenaccio ne serait-il pas le football de gauche, le seul, le vrai, c’est à dire le communiste ? Si tant est qu’il y ait un football de gauche. Et si tant est qu’existe une morale dans ce jeu qu’on appelle football. Et pourquoi pas une éthique, cent balles et un mars tant qu’on y est…

En attendant, l’Italie a quatre coupes du monde, les Pays-Bas zéro. Et roule ma poule. Comme le disait Giovanni Trapattoni, « si je veux voir un spectacle, je vais au théâtre » . Et, vous, si vous voulez de la morale, relisez Pascal.