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- Espagne-France (2-1)
En fait, la France aurait dû continuer de jouer à rien
Et si les Bleus avaient péché par... excès d’ambition ? Face à l’Espagne, l’équipe de France a inscrit son premier but dans le jeu, avant de se faire retourner comme une crêpe. Peut-être aurait-il fallu se contenter du minimum, quitte à continuer de se la jouer petit bras, mais efficace.
Finalement, le défenseur le plus solide sur le terrain ce mardi soir aura été Marc Cucurella. Sifflé par tout le stade à chacune de ses prises de balle, l’arrière de Chelsea avait la preuve que, non, les Allemands ne lui ont toujours pas pardonné sa main non sifflée contre la Nationalmannschaft en quarts de finale. Ce qui ne l’a pas empêché de livrer une partie XXL et de grandement contribuer à écœurer les Bleus, pourtant étiquetés comme étant la défense la plus solide de cet Euro 2024. Hélas pour eux, au lieu de continuer de pratiquer ce que la presse suédoise qualifie de « jeu ennuyeux », la France a décidé de changer ses plans et de se présenter à la hauteur de la Roja, « équipe qui joue le mieux sur ce tournoi », dixit Adrien Rabiot. Erreur fatale : la France est dehors.
Tel est pris qui croyait prendre
Peut-être que, finalement, avoir laissé Antoine Griezmann sur le banc au coup d’envoi a provoqué l’électrochoc attendu dans le XI de Didier Deschamps. Ses joueurs se montrent de fait très entreprenants dès les premières secondes, et l’ouverture du score de Randal Kolo Muani neuf minutes plus tard n’en est que la conséquence logique. Super, la France prouve qu’elle sait aussi marquer dans le cours du jeu et c’est l’Espagne qui en fait les frais. Mais cette bonne nouvelle en devient rapidement une mauvaise. Dommage en effet d’avoir manqué de faire le break dans la foulée puisque, dix minutes plus tard, la Roja égalise grâce à sa pépite Lamine Yamal, avant que son feu follet Dani Olmo ne double lui-même la mise. Quatre minutes ont suffi aux adversaires des Bleus pour les retourner avant de refermer le jeu. « On aurait dû plus sortir, garder un peu plus le ballon et les faire courir, ils n’aiment pas ça », confessait d’ailleurs Randal Kolo Muani après la rencontre. « On avait peut-être un peu moins de jus, de fraîcheur, ce qui a mené à trop de déchet technique dans la construction du jeu, résumait pour sa part un Didier Deschamps dépité sur TF1. On savait très bien que ça viendrait vite presser et on n’a pas assez orienté vers l’avant. »
Six frappes d’un côté, neuf de l’autre, soit le plus faible total de chacune des deux nations depuis le début de la compétition, c’est finalement l’Espagne qui a joué au jeu de la France, et cette dernière qui s’est fait prendre à son propre piège, encaissant au passage deux buts d’un coup, soit le double de ce que sa défense pourtant réputée imprenable, avait pris depuis cinq matchs. Difficile, donc, de retenir quoi que ce soit de cette « compétition ratée », pour reprendre les termes de Kylian Mbappé. La France n’a pas brillé par le jeu qu’elle a proposé, et dans ce cas-là, seule la victoire finale aurait permis de l’excuser. Sauf que, contrairement au plan de jeu clair de l’Espagne, celui de la France s’est apparenté à un (trop) long coup de poker défensif qui s’est finalement (et logiquement) avéré perdant. Mais voilà au moins une bonne leçon à tirer de la campagne qui s’achève : on n’est pas obligé de la jouer petit bras pour être efficace et, donc, gagner. Que retiendront les supporters français de cet Euro 2024 en matière d’émotions, à part peut-être la séance de tirs au but remportée face au Portugal en quarts ? Probablement rien, hélas.
Par Julien Duez, à l'Arena de Munich