- Billet d'humeur
« En 2012, je veux être un Footix »
Déménagement au Stade De France, éviction de Kombouaré et venue de Beckham. Le PSG n’en finit plus de muter. Cela intéresse-t-il encore quelqu’un l’avis d’un supporter ou doit-on joindre d’abord le service clientèle afin de savoir si l’abonnement va augmenter?
La venue de l’ex joueur de Manchester United, du Real Madrid et des Los Angeles Galaxy – qui vaut bien un Bolton-Chelsea-Shanghai – ne constitue pas seulement la plus grande blague situationniste de l’histoire du foot professionnel français, dont personne ne soupçonnait la vocation à supplanter la MLS en matière de retraite dorée. Elle sert de révélateur. Amis supporters du PSG, il est temps d’assumer : soyons des Footix heureux et exigeants !
Certes, des petits contacts ont été apparemment pris et des perches tendues par la direction aux anciens abonnés. Mais au-delà de demander aux Ultras de compléter l’offre promotionnelle du PSG (venez voire nos vrais ultras en semi-liberté, ils ne mordent plus, promis), car il faut de belles images de tribunes en feu pour les retransmissions à l’internationale, qui peut encore croire que l’on reviendra aux années 90, ou même 80 ? Le boycott ne mène plus à grand chose donc. La nostalgie est toujours rassurante, bien qu’elle ne rendra ses tribunes à personne. Le PSG devait compter auparavant sur un noyau dur d’inconditionnels dans une indifférence sociale polie. Désormais il dispose d’une réserve de dix millions d’habitants en Ile de France. Un peu de supporters bien sages et conventionnés apporteraient peut-être une touche exotique, un refrain d’antan, comme la reformation d’un groupe composé d’ex-gloires de la Oi! française dans un squat du 19e arrondissement. En gros « Supporter Park », avec de l’ADN de tifo reconstitué.
Toutefois certains signes sportifs ne trompent pas. Virer Kambouaré, ce n’était donc pas seulement se débarrasser d’une entraineur gênant, peu bankable. Il s’agit aussi d’un bon moyen symbolique de couper les ponts avec les reliques du passé (même si cette pensée n’a surement jamais effleuré Léonardo). Signer Beckham, c’est balancer l’avenir du club dans une toute autre trajectoire, même si le choix du couple embaume un charmant parfum de kitsch rance. Il n’est certes pas question de trier entre les divers degrés du bon foot capitaliste. Juste, dans le registre « ironie de l’histoire », peut-être est-il temps d’assumer ce nouveau statut de client dans les tribunes. Pour devenir les Footix que ce club désormais réclame.
Ca se joue près de chez vous
Evidemment on a beaucoup dit de mal, y compris ici, sur cette espèce apprivoisée des tribunes. Cependant dans le nouveau contexte, tant spatial (le stade de France) que vis-à-vis du type de relation proposé au public parisien, il possède des avantages indéniables. Plus proche du consommateur que du supporter, au moins ne s’évertue-t-il pas à soutenir un club. Il déguste l’équipe sur le terrain en jaugeant le niveau du casting. Hédoniste individualiste davantage que passionné collectif, il apprécie en société d’aimer le foot quand l’Ultra se contente de le partager en circuit fermé. En outre, il peut gouter sincèrement le ballon, du genre « c’est le beau spectacle que j’apprécie » . Disons ce genre d’argument n’était pas prédominant par le passé…
Le PSG ne sera donc plus synonyme des couleurs de votre cœur, simplement le club qui joue près de chez vous. Un peu comme d’aller voir, puisque nous sommes en vacances sur la côte, une rencontre au Stade louis II au temps de la splendeur de l’AS Monaco, avec un cadre plutôt sympa, une équipe finaliste de la Ligue des Champions, et parfois de vraies stars sur le terrain et dans les gradins. Et puis si l’affaire tourne mal, la Premier League reste pour le moment sur Canal et personne ne pourra vous reprocher de « lâcher votre club » (allez, un hommage à la chanson de Balavoine sur l’ASSE), puisque qu’il est difficile de critiquer une personne qui change de cantine quand le menu ne lui convient plus. Le Footix est l‘avenir du PSG, parce qu’il ne mérite que cela et nous ne lui donnerons pas plus. L’offre et la demande ne sont-ils pas sensées s’équilibrer ?
Par Nicolas Kssis-Martov