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Eloi et Rabésandratana, Miami Vice

Par Régis Delanoë
7 minutes
Eloi et Rabésandratana, Miami Vice

Wagneau Eloi et Éric Rabésandratana sont actuellement à Miami en Floride, où ils viennent de monter une équipe de foot qui disputera sa première saison en PDL, un championnat faisant la part belle aux jeunes joueurs voulant se montrer aux yeux des recruteurs de MLS. Leur ambition : en faire un îlot francophone dans la ville même où David Beckham a l'ambition de créer sa franchise. Costaud.

Les deux loustics ont commencé à percer dans le milieu pro ensemble sous les couleurs de l’AS Nancy-Lorraine. Wagneau et « Rabé » ont arrêté leur carrière en même temps en 2007 en Belgique, et on les retrouve encore associés en ce début d’année 2015, en train de mettre sur pied un projet improbable : monter une équipe de football en Floride. Son nom : le FC Miami City Champions. Elle est inscrite pour la prochaine saison de l’USL Premier Development League (ou PDL), l’équivalent de la quatrième division en Amérique du Nord. Ses concurrents se nomment Florida Adrenaline, Panama City Beach Pirates ou encore Palm Beach Suns FC. Début des hostilités le 2 mai, avec une saison régulière express s’achevant en juillet et de possibles play-offs en août.

Pendant trois mois d’intense activité, des jeunes joueurs de moins de 23 ans, majoritairement, ont tous l’objectif de taper dans l’œil des nombreux recruteurs qui matent les matchs derrière la main courante. « C’est bien simple, assure Wagneau Eloi, 70% des joueurs actuellement en MLS sont issus de la PDL. C’est un championnat d’exposition. » Pour ce qui est de savoir comment il s’est retrouvé mêlé à ce projet avec son ancien acolyte nancéien, il suffit de le lui demander. « Éric et moi, on est restés en contact depuis ces années-là. Une fois nos carrières sportives terminées, on a d’abord eu envie de monter quelque chose ensemble à Paris, mais ça n’a pas abouti. Moi, je suis parti en Floride où j’ai eu cette opportunité de faire aboutir un projet que j’avais en tête depuis longtemps. J’en ai parlé à Éric, qui s’est montré intéressé et m’a rejoint. » Cette opportunité a été rendue possible grâce au soutien d’un autre Français, un certain Ravy Truchot, entrepreneur quadra installé en Floride, investisseur dans le monde du web via la société BlackDivine. Il est le président et l’argentier de ce projet très francophone en terre floridienne.

Vairelles, Govou, Déhu…

L’idée, germée il y a deux ans, a abouti il y a un an avec tout d’abord la création d’une académie de football. « On a démarré avec 100 gamins, et quelques mois plus tard seulement, on en est déjà à 450 inscrits » , développe l’ancien attaquant blond décoloré, qui explique pourquoi, d’une école de foot pour enfants, le projet s’est étendu au point de monter une équipe pour participer à la PDL : « Ces gamins, on ne peut pas se permettre de ne pas leur donner un futur. Le système de soccer ici est ainsi fait que quand ils arrivent à l’âge de 15 ou 16 ans, bien souvent ils arrêtent ou changent de discipline, car il n’y a pas de suivi. Au-delà, la formation passe par les universités, ce qui exclut une majorité de jeunes qui n’ont pas les moyens de payer l’inscription. » À moins d’obtenir une bourse, il est effectivement impossible pour beaucoup de jeunes footballeurs de la classe moyenne et en dessous de continuer à pratiquer à un bon niveau. Eloi et « Rabé » souhaitent donc importer une sorte de modèle de formation à l’européenne outre-Atlantique. « Ici en Floride, le potentiel est énorme. Il y a un vrai intérêt des gamins pour le foot, mais il n’est pas assez ou pas assez bien exploité. Nous, on leur offre la possibilité de se former au contact d’anciens joueurs pros. » Eux deux, mais aussi d’autres, assure-t-il, grâce à leur réseau d’anciens coéquipiers. « Plusieurs d’entre eux sont au courant de notre projet et se sont montrés intéressés. Tony Vairelles, dès qu’il aura l’occasion, viendra nous faire une visite. Sidney Govou aussi m’a donné sa parole de relayer sur nos activités ici et peut-être de venir participer à l’aventure. On en a parlé également à Frédéric Déhu… »

Rémunération interdite

Avec le succès initial de l’académie, il a été décidé il y a quelques mois d’inscrire une équipe première dans ce championnat mineur nommé PDL, sorte de ligue de développement pour permettre aux jeunes joueurs qui y participent de montrer ce qu’ils savent faire. Là encore, c’est Eloi qui sert de guide. « Dans le système sportif américain, tu n’as pas de montée ou de descente entre les championnats. T’as de l’argent, tu paies et tu intègres une ligue. C’est pareil en MLS ou en PDL, où on a payé pour s’inscrire, avec une particularité de plus pour la PDL : les joueurs qui forment ton équipe ne t’appartiennent pas vraiment. S’ils sont repérés pour évoluer en MLS ou ailleurs, ils peuvent partir sans qu’on ne reçoive aucune indemnité. » Les contrats tels qu’on les entend n’existent pas, et ce n’est donc pas sans agacer un poil l’ancien attaquant passé notamment par Lens, Monaco et Guingamp : « Tu prépares ton groupe, et tes meilleurs joueurs peuvent partir en cours de saison… Et puis, en plus, on est interdit par la ligue de les rémunérer, ce qui limite considérablement nos possibilités de faire venir ici des joueurs étrangers. Ce serait pourtant une bonne opportunité pour eux de se montrer et pour les joueurs d’ici d’apprendre à leurs côtés… »

« Je reçois dix Français fin février »

Pas découragé pour autant par ces règles particulièrement restrictives, le FC Miami City Champions compte bien attirer d’ici le début de saison un maximum de joueurs, y compris de France. « J’en reçois dix fin février, assure Eloi. Ce sont des joueurs qui en ont marre de galérer en France, où c’est de plus en plus difficile pour les footballeurs, car il y a trop peu de places dans les clubs. Ici, on leur offre la possibilité de se relancer. » Et tout ça gratos ? « Rien ne nous empêche de les payer en primes, corrige-t-il. On va aussi prendre en charge leur logement ici, qu’au moins ils n’aient rien à dépenser. » En attendant que les premiers « talents » de l’académie arrivent à maturité, Miami City Champions FC va devoir disputer sa saison inaugurale de PDL avec uniquement des joueurs venant de l’extérieur, en respectant la règle de la ligue : huit non-Américains au maximum par effectif, et huit joueurs âgés de plus de 23 ans max. Eloi et Rabé multiplient ces derniers jours les sessions d’essai pour constituer leur groupe, avec une reprise des entraînements programmée pour fin février. « On a des mecs qui sont venus de New York, de Los Angeles, de Colombie, du Venezuela… » Le gros souci actuel de l’international haïtien, c’est l’absence d’infrastructures de son nouveau club. « Pour l’instant, on est sur des terrains en location. On est en train de se battre pour en avoir à nous. Le jour où ça arrivera, on est les numéros un des États-Unis, sans aucune prétention. »

« Beckham, on lui met des bâtons dans les roues ! »

Car Eloi en est sûr, il est dans l’état idéal pour lancer son business de soccer outre-Atlantique. « Ronaldo, le vrai Ronaldo, le Brésilien, a des parts dans le club de Fort Lauderdale, à 30 minutes d’ici (Fort Lauderdale Strikers, qui évolue en NASL, l’équivalent de la D2 nord-américaine, ndlr). Il a même dit qu’il viendrait y jouer, ça va créer un buzz inimaginable. Kaká est aussi pas loin, à Orlando, à 3 heures d’ici (Orlando City SC, qui va disputer sa première saison de MLS en 2015)… » Et puis, bien sûr, il y a David Beckham, qui a fait un retour fracassant aux États-Unis il y a un an, en officialisant sa volonté de monter sa propre franchise de MLS à Miami. Depuis cette annonce, le projet a été sérieusement ralenti par les autorités locales, qui refusent de lui laisser construire son stade de soccer en pleine ville, tout Beckham qu’il est. Du coup, si la franchise doit toujours voir le jour, aucune date d’intégration à la Major League Soccer n’est à ce jour avancé. Ce qui fait un brin marrer Wagneau Eloi. « Il a du mal Beckham, on lui met des bâtons dans les roues (rires)! » Avant de corriger, plus sérieux : « Chaque franchise de MLS doit désormais avoir une académie et une équipe réserve, alors si Beckham veut faire appel à nous, on sera là. On est positionnés. Qui nous dit qu’il ne va pas vouloir nous racheter ? » C’est vrai ça, qui ?

Mondial des clubs 2025 : mais au fait, il en pense quoi le reste du monde ?

Par Régis Delanoë

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