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Elche, le maintien pour rien
Maintenu sur le pré après une saison convaincante, le Elche CF ne reprendra pourtant pas la nouvelle saison en Liga. La faute à des dettes en pagaille et un jeu des chaises musicales au niveau de sa direction. Retour sur un beau gâchis.
« Les gros laissent toujours quelques points en route, comme lorsque nous avons obtenu notre maintien en faisant nul contre Barcelone. Contre le Real, nous avions le match nul en main, mais l’arbitre a commis une erreur en sifflant un penalty inexistant alors que le temps additionnel était dépassé… » En février dernier, Fran Escriba ne sait pas encore ce qui l’attend. Lui, alors entraîneur d’un Elche en quête de maintien, ressasse encore quelques décisions qui lui ont coûté son exploit face aux Merengues. Des Blancs qu’il s’apprête à retrouver cette saison pour un derby, cette fois sur le banc de Getafe. Car ses Franjiverdes ne sont plus des pensionnaires de Liga, et ce, malgré un sauvetage acquis sans stress lors du dernier exercice. Depuis ce début de semaine et une décision du Tribunal arbitral du sport (TAS), ils appartiennent à la catégorie des clubs de seconde zone d’Espagne. Une descente non pas sportive, mais judiciaire qui n’a rien de surprenante : ses comptes sont dans le rouge et ses dirigeants discrédités par la Ligue. Dans ce marasme, son public et ses joueurs sont forcément les premiers à trinquer.
Sans salaire, pas sans maintien
À l’instar de nombre de ses homologues, Elche connaît des soucis financiers depuis une éternité. Une spécialité espagnole dont la LFP souhaite se débarrasser depuis déjà quelques saisons. De fait, au début du mois de février, par le biais d’un communiqué laconique, l’instance du football pro outre-Pyrénées annonce « ne plus reconnaître pour les 18 prochains mois le président d’Elche, José Sepulcre, ainsi que le reste de sa direction » . De même, une amende de 90 000 euros leur est infligée. La ligue met en cause des irrégularités dans le budget annoncé pour la saison 2013-14 et de nombreux impayés de salaires, aussi bien pour les joueurs que les salariés du club. Cette décision ne tombe pas du ciel : depuis l’été dernier, Elche était dans le collimateur de la justice sportive. De fait, il avait été interdit de recrutement, ce qui avait poussé sa direction technique à miser sur des joueurs en fin de contrat ou de jeunes en mal de temps de jeu. Bref, une stratégie du pauvre qui tombait comme du pain béni pour Fran Escriba, entraîneur ô combien sous-coté, mais capable de miracle insoupçonné.
Pour ce faire, le message de celui qui entraînera désormais Getafe (remplacé par Ruben Baraja sur le banc d’Elche) envers ses poulains était bien rodé : « Je dis à mes joueurs que le privilège d’être un footballeur de Première Division n’est pas de gagner de l’argent, mais de voir un enfant avec ton maillot sur le dos. J’adore quand les gens me démontrent leur soutien quand je suis en terrasse. Il n’y a rien d’équivalent. Ils voulaient même mettre une rue à mon nom, mais ça c’est pour les gens plus importants. » Le plus important, c’est l’équipe. Un collectif fait de bric et de broc où seule une individualité se dégage : Jonathas. Malgré le marasme financier et des salaires non touchés durant trois mois, les Franjiverdes gardent la tête froide et les pieds chauds. Tant et si bien que le maintien est acquis à quatre journées du terme du championnat. En coulisse, une « guéguerre » interne se déclare entre José Sepulcre, en poste depuis neuf ans, et Juan Anguix, ancien allié en passe de prendre la relève. À la fin avril, ce dernier remporte la partie et promet de payer près de quatre millions d’euros d’arriéré de salaires. « Nous prenons le bon chemin parce que le paiement de cette dette sauverait le club » , annonce même un porte-parole de la direction.
Et 17 jours plus tard, la direction se réveilla…
Sitôt la Liga terminée, le couperet tombe le 5 juin : Eibar, pourtant premier relégable du dernier championnat, conserve sa place dans l’élite au détriment d’Elche. Pour la LFP, il s’agit tout bonnement de la première relégation administrative infligée. S’enchaînent alors des manifestations monstres dans cette ville de 230 000 habitants principalement connue pour sa palmeraie, la plus grande d’Europe. De recours en recours, la nouvelle direction passe des tribunaux de la Ligue à ceux de la justice civile. Mais, là encore, elle se trouve face à un mur. Bien qu’ayant enfin les liquidités suffisantes pour combler une grosse partie de sa dette envers l’Hacienda – le fisc espagnol -, rien n’y fait. La Ligue explique que conserver Elche dans l’élite reviendrait à « accepter que les dettes soient payées quand l’endetté le décide » . Un refrain repris en cœur par le TAS, pour qui le paiement du montant souhaité par la LFP ne s’est fait que 17 jours après la date butoir. Désormais, ne reste plus qu’à la direction de faire appel de cette décision auprès du Juge central des contentieux administratifs. L’espoir est maigre, et la Liga sera déjà commencée.
Par Robin Delorme, à Madrid