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EDF : 82% de mauvaise opinion, combien à Brignoles ?

Par Nicolas Kssis-Martov
5 minutes
EDF : 82% de mauvaise opinion, combien à Brignoles ?

Les Français n’aiment toujours pas les Bleus. C’est l’info de la semaine. Cela ne les empêche pas de les regarder à la télé (6 millions de téléspectateurs devant l'amical France-Australie, 25% de part d'audience), mais en espérant presque qu’ils se prennent les pieds dans le tapis. La presse l’a aussi bien compris, rien de plus vendeur en ce moment que les haters. Il reste juste à savoir ce qui se cache vraiment derrière le chiffre quasi soviétique de ce consensus anti-EDF. Un Front Populaire ou un Front National ?

Le sondage publié par Le Parisien a parfaitement joué son rôle et suscité le buzz pour lequel il avait été clairement commandé. 82% des personnes interrogées (une précision loin d’être superflue) y confessent avoir une « mauvaise opinion » de l’équipe de France de football et 54% pensent qu’elle échouera aux portes du Mondial 2014 au Brésil. Guère difficile d’imaginer le plaisir de BVA quand les données lui sont arrivées. Un 50/50 n’aurait pas provoqué autant de bruit médiatique ou de likes sur Facebook.

Le Parisien savait ainsi clairement dans quel contexte son sondage allait sortir. Le sujet est sensible. D’abord pour la FFF qui y joue son fond de commerce, bien qu’apparemment le désamour n’ait pas encore entamé ses parts de marché audiovisuelles, France-Australie trustant la première place avec 6 millions de téléspectateurs, soit 25% de part d’audience. Toutefois, au-delà de ces banales inquiétudes de boutiquiers sportifs, ce n’est (ni plus) ni moins que le pays qui est convoqué pour juger de la valeur d’une équipe, voire d’une génération, de sa qualité et de ce qu’elle représente. Passion nationale devenue depuis 98 le thermomètre approximatif des diverses fièvres hexagonales (immigration, inégalités sociales, exode fiscal, islam, etc), demander aux « gens » ce qu’ils pensent des « Bleus » , revient un peu à ausculter, sans véritablement l’assumer, le pouls du mythique « pays réel » si cher à Patrick Buisson, Lorànt Deutsch ou François Fillon. Bref de mesurer l’intensité ou la réalité de cette fameuse bascule du black-blanc-beur d’Aimé Jacquet au « Racaille Football Club » de Daniel Riolo.

Un « référendum de tous les instants »

Une façon surtout d’orienter le débat sans en avoir l’air. Au moment où la France fête les 30 ans de la marche des beurs, l’hostilité affichée envers un Samir Nasri, après la parenthèse enchantée d’un Zidane, permet aussi de comprendre où le pays en est et pourquoi Knysna ne passe toujours pas. Karim Benzema peut ensuite affirmer devant un micro, un peu comme on égrène un chapelet, qu’un but fera le printemps et qu’en remportant quelques rencontres, voire un trophée, ces « Bleus » effaceront l’ardoise, il démontre juste son incompréhension du problème et le fait que pour beaucoup de raisons très diverses, personne ne veut oublier (là où tout est pardonné à un Tony Parker en échange d’un titre européen).

Car ce foot d’opinion qu’on essaie de plus en plus d’imposer, sorte de reliquat sportif des « vrais Français » au nom desquels tous les populistes s’expriment, repose en l’occurrence sur l’idée fondatrice (le regretté historien Raoul Girardet aurait sûrement eu beaucoup à raconter sur le sujet) d’un lien affectif indispensable entre le « peuple » de France et sa sélection nationale de football (enfin celle de la FFF). Un « référendum de tous les instants » (pour paraphraser Ernest Renan) transformé en ola au SDF, et qui virerait donc désormais à la répudiation en bonne et due forme via les sifflets.

Ribéry de paria à chouchou grâce à ses buts

Peu importe donc en fait que 54% des sondés estiment que les Bleus ont peu de chances de fouler les stades flambant neufs du Mondial brésilien (cette estimation vaut bien celle des plateaux du CFC ou de L’Équipe 21). Il n’est pas non plus nécessaire d’avoir lu tout Emmanuel Todd pour anticiper que 86% jugeraient leurs rémunérations excessives, résultat sûrement pas si éloigné de ce que l’on obtiendrait sur les grands patrons ou banquiers. En revanche, que les trois quarts leur attribuent l’adjectif de « grossiers » interpelle beaucoup plus, de même que les 8% qui persistent malgré tout à revendiquer leur amour du maillot. Cette « jeunesse de France » en crampons révèle le problème autour duquel ce sondage et ceux qui ont disserté dessus s’amuse à tourner et à broder. Il demeure souvent plus facile de romancer les problèmes que d’entrer dans le vif du sujet. À ne pas mettre les mots et les noms, tout en surfant sur l’ambiguïté des questions soumises, on laisse vagabonder les interprétations. Et on laisse surtout les hypothèses prendre le pas sur l’information précise censée être fournie par l’institut BVA. Le drame de ce sondage est dès lors de flirter avec le politique et le social sans jamais oser y tomber, et laisser ensuite toutes les conjectures possibles s’épanouir derrière le coté massif de ces chiffres. Des données qui rassemblent sûrement le puzzle de plusieurs strates de mécontentement, déception, incompréhension, voire effectivement racisme et rejet.

Finalement en bon Zemmour du foot, Pierre Salviac s’est lâché le premier après cette manne inattendue du Parisien.

Dans un contexte où le FN monopolise le débat politique, où l’islamophobie progresse et la crise des valeurs s’intensifie (Valls contre Taubira), à chacun donc de tenter de comprendre les subtilités et les interrogations implicites (trop de « musulmans » en équipe de France ?) de ce bon coup en termes de clics (qui ne repose que sur un échantillon de 1091 personnes). Un ramdam avec ses parts de mystère : Ribéry bénéfice-t-il à titre d’indulgence de son « éducation bavaroise » au Bayern ou de ses récentes prestations sur le terrain ? Le foot peut-il aider la France à s’aimer si la France n’aime pas son foot, et surtout ceux qui l’incarnent ? Le foot relève, les médias aidant, des contes et légendes que notre pays aime se raconter le soir pour s’endormir. Et la France dort mal en ce moment.

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