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Eden Hazard à l’état solide
Alors que son destin semblait lui couler entre les doigts lors des grands rendez-vous, le capitaine de la Belgique prouve en Russie qu'il sait enfin garder toute sa densité quand la température augmente. Les Bleus sont prévenus, c'est sur le bloc Hazard qu'ils pourraient glisser ou casser leur piolet.
6 juillet 2018, 21h47. Le Brésil jette ses dernières forces dans un match qui a déjà trouvé son roi. Car les chroniques ont déjà fait de cette date celle de l’avènement d’une Belgique enfin à la hauteur des espérances. Un acte fondateur. Au milieu d’un destin collectif, c’est aussi celui d’Eden Hazard qui s’écrit. Contre la Seleção, le capitaine des Diables rouges a déroulé une partition proche de la perfection. Une activité incessante, une gestion optimale de l’effort, des décrochages salvateurs pour aider les siens à ressortir les ballons, un engagement total dans les duels, se relevant sans broncher après les contacts là où d’autres artistes auraient surjoué l’agression, une recherche permanente des décalages pour lancer Romelu Lukaku, une frappe croisée flirtant avec le poteau et des dribbles toujours vers l’avant.
Mieux, il devient le premier joueur de l’histoire de la Coupe du monde à avoir réussi l’ensemble de ses dix dribbles (depuis 1966 et qu’Opta chiffre la compétition). Sans forcer la comparaison : Zinédine Zidane avait fait de son Brésil 2006 sa référence, Eden Hazard en a sûrement fait de même avec celui de 2018.
Un cap à tenir
Un match qui ressemble à une confirmation qui s’est fait trop longtemps désirer au niveau international. Jusqu’ici, l’attaquant était le porte-étendard d’une génération qui attendait son heure. Trop vert en 2014 pour être au Brésil plus qu’une promesse, sous pression à l’Euro 2016 au point de ne pas assumer son rang de costaud, le Belge n’avait brillé lors des phases finales que par un petit but face à la Hongrie et six passes décisives. Sur le plan comptable, il en est cette fois à un doublé face à la Tunisie et deux passes décisives. Mais là où Hazard avait laissé un goût de gâchis lors des derniers tournois, c’est surtout par son attitude qu’il impressionne aujourd’hui. Meneur de la révolte lorsque les Diables rouges étaient menés de deux buts face au Japon, n’hésitant pas à secouer un Lukaku timoré à la mi-temps du match face au Panama, il a rarement aussi bien porté le brassard que pendant cette compétition.
Ce même bout de tissu qui lui avait été donné en l’absence de Vincent Kompany pour le mettre face à ses responsabilité, puis qui avait été une charge trop lourde lors de l’été 2016 en France. Aujourd’hui, le défenseur mancunien est de retour, mais l’ailier de Chelsea a eu le temps de se faire à cette casquette de chef de file conquérant. « Je crois qu’Eden est un vrai capitaine, a été un vrai leader et est toujours resté lui-même avec un tempérament qu’on aime, saluait Roberto Martínez. Il est toujours disponible pour être décisif avec son football, et le niveau de jeu qu’il a montré a été excellent. Il a été décisif dans nos attaques, mais a surtout démontré qu’il est un chef pour notre équipe. »
Eden éternel
À 27 ans, l’ancien Lillois semble enfin avoir trouvé la bonne formule et remis en ordre toutes les pièces du puzzle. Après une saison ennuyeuse du côté de Stamford Bridge, il savait que ce Mondial russe était une des dernières occasions pour poser son empreinte sur une grande compétition et passer enfin un cap. Et plutôt qu’essayer de rejoindre à tout prix le clan de Messi, Ronaldo ou Neymar, Eden Hazard a choisi ses propres options. Sa consécration passera par l’humilité et le collectif. Lui qui se liquéfiait dans les grands événements, a trouvé de la consistance en s’ouvrant aux autres, en faisant fructifier une relation avec Kevin De Bruyne qui n’a pas toujours été limpide, et en s’épanouissant dans un système de jeu (3-4-3) pensé en partie pour lui, que ce soit chez les Blues ou les Diables rouges. Les molécules sont les mêmes qu’à l’époque lilloise, mais Hazard semble enfin dans son élément. Et à la veille d’une demi-finale face à la France, il souhaite prouver que les représentants du Plat Pays ne fondent pas à ces altitudes.
Par Mathieu Rollinger