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Dylan Bronn : « Ma famille, la plage et l’AS Cannes, c’était le bonheur »
Titulaire à Metz, le défenseur tunisien de 25 ans enchaîne les matchs de Ligue 1. Un rythme de croisière qui n'est pas pour déplaire à celui qui est passé en quelques mois des parties de foot-volley sur les plages de Cannes à la Coupe du monde en Russie.
Dylan, je commence par une réclamation. Je me suis farci les trois premiers matchs de Metz : trois défaites. Le seul que je manque, contre Reims : victoire. Qu’est-ce qu’il s’est passé et quelle conclusion dois-je en tirer ?Il ne faut plus que tu regardes alors ! Mais cette victoire est dans la continuité de ce qu’on avait fait en début de saison. C’était cohérent, mais il nous manquait jusqu’ici les buts. On est restés solides, confiants, et dimanche, ça a fini par payer en fin de match. Maintenant, j’espère que ça sera le début d’une longue série.
À la fin du match contre Paris, on t’a vu jeter tes straps en sortant du terrain. Il y avait de la frustration de ne pas ramener ne serait-ce qu’un point du Parc ? Oui, c’est sûr, on sentait qu’il y avait de la place face au PSG qui n’était pas dans un très grand jour. On a vu dès l’entame de match qu’on pouvait leur faire mal, mais on s’est fait punir dans le temps additionnel. Et ça fait mal à la tête.
Mauro Icardi, ça donne quoi ?On a essayé de le tenir pendant 90 minutes avec John Boye et Mamadou Fofana. Ça s’est plutôt bien passé, en dehors d’une ou deux frappes. Mais il revenait de quarantaine, ça avait l’air compliqué pour lui. Cela reste un très grand joueur et il va vite retrouver son niveau.
Ce samedi, c’est Marseille. Pour toi le Sudiste, c’est un match particulièrement attendu ?Tous les matchs sont importants. Moi Marseille, je les suis depuis que je suis tout petit, donc ça fera chaud au cœur. Mais j’ai envie d’aller là-bas pour gagner.
Cette saison, tu la sens comment ?Vraiment très bien. Il y a un groupe de qualité, qui progresse, dans la continuité de la saison dernière. Le FC Metz est en train de passer un cap et c’est à nous les joueurs de faire évoluer l’équipe. Il y a largement la place cette année.
Il y a quatre ans, tu n’en étais pas du tout là. Tu vivais à Cannes et tu devais composer avec un travail alimentaire de livreur de sushis. Raconte-nous cette période ?Ce job, j’ai dû le faire pendant quatre jours. C’était pour dépanner un pote qui ouvrait un restaurant. Il m’a demandé si je pouvais livrer le temps de trouver quelqu’un. Donc entre deux foot-volleys sur le sable, j’allais faire une livraison de temps en temps. Sinon, mon quotidien, c’était être à la maison avec ma famille, faire un tour à la plage et aller m’entraîner le soir avec l’AS Cannes. C’était le bonheur.
Si les années fastes sont bien loin, ça représente quoi la formation à la cannoise aujourd’hui ? C’est de là que sont issus Zidane, Vieira, Micoud, Clichy… Même si on est tombé avec la DNCG (relégué en 2014 en DHR, N.D.L.R.), ça reste un grand club formateur. Les éducateurs qui sont restés pour entraîner les petits sont toujours les mêmes. J’ai eu la chance de connaître un coach qui est maintenant au Real Madrid : je parle de David Bettoni. L’AS Cannes représente toute ma vie, ça restera mon club de cœur, et les vrais Cannois y sont très attachés. Ce sont des gens très sérieux qui sont aujourd’hui aux commandes (Cannes est aujourd’hui en National 3, N.D.L.R.), ils font tout pour le faire remonter et je sais que ça marchera.
C’est à Niort que tu as réellement démarré ta carrière, alors qu’à la base tu étais arrivé pour dépanner en réserve…J’ai eu la chance d’avoir été supervisé par le staff des Chamois niortais quand je jouais à l’AS Cannes. Ils m’ont dit de venir faire un essai avec l’équipe professionnelle pendant une semaine. Ça s’est super bien passé, et à l’été, le président de l’époque Karim Fradin m’a contacté et m’a proposé un contrat avec l’équipe réserve. C’était à moi de faire mes preuves pour monter avec les professionnels. J’ai sauté sur l’occasion, parce que je savais qu’il y avait la Ligue 2 en ligne de mire.
Le coach des pros, Denis Renaud, m’a dit que dès le premier jour à l’entraînement, il a perçu chez toi du sérieux et de la rigueur, alors que tu venais du milieu amateur. Ça vient d’où tout ça ?C’est tout ce qu’on m’a appris à l’AS Cannes. On était dans des conditions de haut niveau. J’avais toutes les armes et les valeurs pour accéder au rang professionnel.
Si je te dis que tu as un peu un profil à la Adil Rami, tu es d’accord ?Pas vraiment. Ok, lui aussi vient du monde amateur. Mais je pense que c’est un peu une caricature de dire ça : on ne vient pas du même endroit (Rami vient de Fréjus, N.D.L.R.), on n’a pas eu exactement le même parcours, et puis il s’est vite retrouvé dans des tops clubs européens…
Après une petite année en Ligue 2, tu as signé à La Gantoise et arrive à pousser la porte de la sélection tunisienne. C’est plutôt une belle progression.La Tunisie, c’est le pays de ma mère. C’est exceptionnel de pouvoir représenter une équipe nationale. Il n’y a que des bons joueurs dans cette équipe et j’ai eu la chance de disputer la Coupe du monde en Russie, comme la Coupe d’Afrique l’an dernier. Ce sont des souvenirs merveilleux et j’espère qu’il y en aura d’autres, parce que ça reste gravé. Je garde ça pour moi, pour pouvoir raconter mes petites histoires lors des repas de famille après ma carrière.
Il y aura forcément ce match de poule contre la Belgique (5-2) à raconter. Tu marques d’une belle tête décroisée face à Courtois, puis tu sors sur civière quelques minutes plus tard (23e), blessé au genou après avoir détourné de manière anodine un tir de Yannick Ferreira Carrasco. Il a été aussi court qu’intense le pic de ta carrière… C’était même doublement intense. Le but, je ne m’en suis pas rendu compte sur le moment même. Je me suis tout de suite replacé, j’ai même pas célébré le but parce qu’on était menés 2-0. Et puis cinq minutes après, je me fais mal au genou. Mais j’avais encore le sourire sur les lèvres sur la civière parce que j’étais à la Coupe de monde, je venais de marquer un but et je sentais que ce n’était pas une blessure grave. Il y a pire dans la vie !
Lors de ce match, tu étais le seul joueur du championnat belge sur le terrain. Ça veut dire quoi du niveau de la Jupiler Pro League ?J’y ai joué un peu plus de deux ans. Mais selon moi, c’est un championnat sous-estimé. Les joueurs qui arrivent là-bas et qui pensent que c’est facile, en général, ils se trouent. C’est extrêmement physique, il y a beaucoup d’attaque-défense, des duels un contre un pendant tout le match : il faut être prêt pour tenir. Je suis content d’y être passé parce que j’y ai appris beaucoup de choses.
Pourquoi avoir choisi Metz en janvier dernier ?C’est le club qui m’a le plus plu, qui est venu vers moi, qui m’a mis en confiance. C’est un club avec une belle histoire. Quand je suis arrivé, j’ai vu les installations, le centre d’entraînement tout neuf, le stade… Les gens qui travaillent ici sont exceptionnels, tout le monde a le sourire. C’est un club familial, et moi, c’est ce qu’il me faut. Et puis, c’est la Ligue 1, l’élite du football français. C’était mon rêve, et j’ai la chance d’enchaîner les matchs dans ce championnat.
Tu as l’air d’être un élément précieux dans le vestiaire. C’est quoi le secret pour se mettre tout le monde dans la poche ?J’essaie juste d’être moi-même, de sourire, de positiver, d’apporter de bonnes ondes. Quand ça marche, c’est top. Mais l’adaptation est aussi plus facile quand tu arrives dans un club où les gens ne se la pètent pas, et c’est ce que j’ai trouvé ici à Metz.
C’est vrai que tu n’aimes pas trop prendre l’avion ?Ouais, j’ai un peu peur… Quand ça bouge, je serre un peu les fesses sur mon siège. Mais avec tous les vols que j’ai pris avec la sélection, ça commence à passer.
Propos recueillis par Mathieu Rollinger