- Serie A
- J33
- Fiorentina-Juventus (1-1)
Dušan Vlahović, un volcan s’éveille
Une nouvelle fois buteur sous les couleurs de la Fiorentina face à la Juve ce dimanche, Dušan Vlahović (21 ans) n’en finit plus d’affoler les compteurs cette saison en Serie A. Le fruit d’une éclosion programmée pour le « Zlatan serbe » autoproclamé.
Il est impossible de savoir si c’était un hommage ou un excès de confiance. Mais nul doute qu’Andrea Pirlo n’est pas resté insensible en voyant Dušan Vlahović inscrire une délicieuse panenka à son gardien Wojciech Szczęsny sous le soleil de Florence. Le jeune technicien turinois avait certainement l’esprit trop occupé, parasité par les innombrables questions tactiques qui fusent aux quatre coins du cerveau d’un coach, pour revenir neuf ans en arrière et ainsi redonner vie à « sa » panenka glissée à l’insolent Joe Hart à l’Euro 2012. Dans un rire, son homologue Beppe Iachini confiera après ce partage des points entre la Vieille Dame et sa Fiorentina qu’il aurait préféré que Vlahović « la mette dans un angle, on aurait alors été plus tranquilles ! » Mais il faut croire que l’attaquant d’1 mètre 90 ne fait pas grand-chose comme tout le monde. La preuve : avec ce but, son dix-septième de la saison en Serie A, il est le premier joueur de moins de 22 ans a atteindre ce total en Italie depuis Mirko Vučinić période Lecce en 2004-2005. En voilà une belle ligne sur un CV.
Le basketteur de Belgrade
À Florence, cette éclosion de Dušan Vlahović au plus haut niveau ne surprend pas ou peu. Depuis qu’il a posé ses bagages à 18 ans dans la cité qui abrite le Ponte-Vecchio, le gamin de Belgrade a eu le temps de se mettre en selle. Une adaptation en douceur aux exigences de la Serie A qui rappelle un peu celle qui a été la sienne au ballon rond dans les quartiers de la capitale serbe qu’il parcourt d’abord un ballon de basket en mains : « Quand j’étais plus jeune, je m’entraînais dans un club de basket de Belgrade dès l’âge de 4 ou 5 ans, resituait l’intéressé pour la Repubblica. Je n’étais pas très grand, de taille normale pour mon âge, et le basket me plaisait. Et puis, à douze ans, j’ai pris quinze centimètres d’un coup. » Pas de quoi le faire potentiellement rêver d’une carrière en NBA pour autant, ni sur le moment ni même après. Jugé « pas prêt » par Stefano Pioli à son arrivée, Vlahović est parti s’aguerrir avec les jeunes de la Primavera et a facturé onze pions en treize rencontres.
Puis Vincenzo Montella est arrivé, suivi de Giuseppe Iachini (revenu aux commandes depuis) et surtout Cesare Prandelli en novembre 2020. C’est sous l’égide du poète florentin que le jeune bomber serbe a pris son envol dans l’élite, claquant la bagatelle de onze buts durant le mandat de cinq mois du pompier Prandelli appelé pour éteindre l’incendie. Un palier est franchi et en retour, la reconnaissance, elle, est éternelle. « Prandelli m’a tout donné. Il a parié sur moi dès le début. Je le remercierai toujours. Je n’aurais jamais imaginé que quelqu’un puisse faire quelque chose d’aussi génial pour moi. » Peu avant le départ de son mentor, Vlahović avait d’ailleurs fait l’étalage de son talent sur la pelouse de Benevento en inscrivant son premier triplé. Trois coups de canon tirés ce soir-là, en Campanie, qui définissent à merveille sa polyvalence : un excellent jeu dos au but, des déplacements sans et avec le ballon tranchants couplés à une finition qui s’aiguise au fil des mois. Oui, si la Fiorentina a su redresser la barre en 2021, en prenant déjà vingt de ses trente-quatre unités actuelles, elle le doit en partie à la nouvelle coqueluche de la sélection serbe.
« Je suis le Zlatan Ibrahimović de Belgrade »
Pour expliquer le rendement infernal du gamin, il faut aussi s’attarder un instant sur son ego : tout le monde ne tente et ne réussit pas une panenka face à la Juve à 21 printemps. Et si c’est le cas avec lui, c’est aussi car le jeune attaquant couvé par Franck Ribéry – qu’il prend volontiers « en exemple » – a plutôt confiance en lui. Que pense-t-il par exemple d’Erling Haaland, le buteur en vogue du moment ? « Je le regarde jouer et j’essaye de comprendre sa finition et ses mouvements, comment il se déplace.(…)Cela peut paraître présomptueux, mais avec du travail, je pense pouvoir atteindre son niveau. » Une sortie qui n’a pas dû étonner Valeri Bojinov, ancien buteur de la Fiorentina et du Partizan où il a côtoyé le phénomène, qui disait à son sujet ceci il y a quelques semaines pour Transfermarkt : « Vlahović était fou, vraiment. Il aimait me répéter : « Je suis le Zlatan Ibrahimović de Belgrade, je vais jouer pour les meilleures équipes du monde. » » En attendant de devenir le Zlatan serbe, et aussi de savoir où atterrira-t-il alors que son contrat à la Fiorentina court jusqu’en 2023, Vlahović a vu le Z lui envoyer son maillot signé avec un message en serbe disant « Bonne chance, je te souhaite le meilleur. » Le dicton ne dit-il pas que les vrais reconnaissent les vrais ?
Par Andrea Chazy
Propos de DV recueillis par La Repubblica.