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Du porte-à-porte pour rameuter des supporters
Loin d'ici, à Singapour, les Singapouriens se passionnent pour la Premier League anglaise, mais n'en ont rien à secouer du championnat national. Du coup, l'un des clubs, le Balestier Khalsa, a trouvé une solution : faire du porte-à-porte chez les habitants pour les inciter à venir au stade. Superbe.
Il y a des championnats, comme la Bundesliga, où la plupart des matches se jouent à guichets fermés. Où l’on est presque obligé de refuser l’accès aux supporters parce que les tribunes sont déjà pleines à craquer. Et puis, il y en a d’autres où le problème se pose à l’envers. Pas un chien dans les gradins et des stades qui sonnent désespérément creux. C’est le cas du championnat de Singapour. Le pays n’est pas réputé pour être une grande terre de football, certes, mais le ballon rond est pourtant un sport extrêmement populaire au sein des habitants de l’État asiatique. Enfin, pas tous les aspects du ballon rond. Les 5 millions d’habitants de Singapour se passionnent devant leur télévision pour le football européen, surtout pour la Premier League anglaise. Beaucoup de fans de football locaux sont d’ailleurs fans de Manchester United, Liverpool ou Arsenal.
De plus, quand certains clubs européens viennent en tournée à Singapour, notamment en été, les stades sont pleins, bien qu’il ne s’agisse que de matches amicaux. Non. Le vrai problème du football, à Singapour, c’est le championnat local. La S-League a été fondée il y a seize ans, avec la ferme intention de passionner les foules. Problème : seize ans après sa création, la S-League a sombré dans l’anonymat le plus total. Pour l’ensemble de la saison 2012, qui s’est terminée le 4 novembre dernier, la moyenne de spectateurs a été de 932 par match. A titre comparatif, la dernière journée de National (D3) en France s’est disputée devant une moyenne de 2380 spectateurs. Il faut donc réagir. Et un club a trouvé une idée plutôt insolite.
Mission colportage
Le club en question, c’est le Balestier Khalsa. Cette équipe, fondée en 1898 (!), a terminé sixième du dernier championnat singapourien, et a remporté en août dernier le Plate Tournament, un trophée de consolation pour les équipes ayant terminé troisième de leur poule en Coupe de la Ligue. Oui, sauf que tous ces matches à domicile, disputés au Toa Payoh Stadium, se sont déroulés devant une moyenne de spectateurs ridicule. 500 âmes en peine. Parfois 1000 lorsque l’affiche en valait la chandelle. Du coup, pour la nouvelle saison, qui a débuté le 20 février, le président du club, S. Thavaneson, a eu une lumineuse idée : faire du porte-à-porte pour convaincre les gens de venir au stade, et même aller directement leur vendre des billets. Comme des bons vieux colporteurs.
Ce porte-à-porte est toutefois un peu particulier, puisque ce ne sont pas des gamins du club ou des stagiaires qui doivent s’en charger, mais bien les joueurs eux-mêmes. « Tout au long de la saison, les joueurs iront directement toquer à la porte des gens. Plus ils feront ça, plus les gens du quartier les reconnaîtront. Ainsi, cela aiguisera leur curiosité et cela leur donnera peut-être envie de venir voir des matches au stade » a expliqué Thavaneson. Visiblement, le porte-à-porte et le bouche à oreille ont déjà fonctionné. Pour le premier match à domicile de la saison, disputé le 26 février face à Geyland United (victoire 1-0), 1417 personnes se sont rendues au stade, soit 36% de la capacité d’accueil du stade. « Nous jouons dans un quartier de 100 000 habitants. Il suffirait d’en convaincre 3% pour avoir un stade à guichets fermés à chaque rencontre » ajoute Thavaneson. Il ne manque plus qu’à organiser une tombola, et on est bons.
Sept Français là-bas
Malgré cette situation relativement déplorable, le championnat de Singapour continue d’attirer des joueurs étrangers. Cette saison, dans les 12 équipes de la S-League, on retrouve sept joueurs français : Benoît Croissant (Tampines Rovers), Aurélien Hérisson, Anthony Aymard, Ismael Benhamed (Tanjong), Stéphane Auvray (DPMM FC), Sirina Camara (Home United) et Stefan Milojevic (Geylang United). Ce championnat, composé de « franchises » (modèle américain) et non d’équipes à proprement parler, est d’ailleurs assez incroyable : l’actuel leader, l’Albirex Niigata, est un club japonais (uniquement composé de joueurs nippons), le DPMM FC est composé en majeure partie de joueurs de Brunei, et l’Harimau Muda II est en fait, tenez-vous bien, l’équipe nationale de Malaisie des moins de 21 ans. Sacré melting pot, qui ne suffit pas à faire venir les supporters au stade, mais qui ne demande qu’à avoir un peu plus de reconnaissance. En attendant, la page Facebook du Balestier Khalsa compte 1486 fans. Même avec eux, on ne pourrait pas encore remplir le Toa Payoh Stadium. La lose.
Par Eric Maggiori