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Dortmund, les cinq hommes du titre

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Dortmund, les cinq hommes du titre

Le Borussia Dortmund vient de remporter le huitième titre de son histoire, le deuxième d’affilée. Si cela a été possible, c’est grâce au travail de fond réalisé par Jürgen Klopp. Le Bayern achète à tour de bras en vue de reprendre son bien? Et alors? Au BVB, il y a déjà plusieurs éléments de valeur. Des joueurs jeunes et qui n’ont pas coûté des mille et des cents. Et même que certains n’ont pas besoin de jouer toute la saison, tellement ils sont chauds.

Mats Hummels: l’an dernier, c’était easy. Coup de pied arrêté botté par Nuri Sahin, tête de Hummels ou de Subotic, but. Cette saison, Mats s’est calmé. Il savait que Dortmund serait l’équipe à abattre, alors il s’est concentré sur son travail défensif. Son match le plus fou cette saison? Assurément face au VfB Stuttgart, où il se troue complètement derrière, mais délivre une jolie passe décisive et marque le but du 3-3 alors que son équipe en avait pris trois en dix minutes. Sinon, le reste du temps, il a régalé son public à coups de gestes de grande classe, le poitrail gonflé, le menton relevé, le regard droit. Pas étonnant qu’elles soient toutes amoureuses de lui, là-bas. S’il n’était pas footballeur, Mats Hummels aurait soit été surfeur, soit bassiste dans un groupe d’indie-rock. Pour l’instant, il n’a pas vraiment réussi à montrer ce qu’il était capable de faire hors d’Allemagne, mais nul doute que le Borussia Dortmund tient là un futur grand.

Sebastian Kehl: la dernière fois que Sebastian Kehl a fait une saison complète, c’était en 08/09. Et encore, il n’avait pas été épargné par les blessures. Cette année, le sort l’a laissé tranquille, préférant se focaliser (entre autres) sur un jeunot répondant au nom de Giuseppe Rossi. Du coup, le capitaine était là pour guider ses troupes depuis son milieu de terrain, à peu près du même endroit que le faisait Nuri Sahin. Sans avoir la même patte gauche, mais avec une envie terrible, et surtout beaucoup d’expérience. Avec son pote Roman Weidenfeller, Sebastian Kehl est le seul trentenaire du groupe. En fait, c’est un peu le mono qu’on rencontre en colonie de vacances, le mec hyper sympa qui joue de la guitare le soir et qui te raconte des histoires incroyables, et qui a tellement de classe qu’il t’explique comment faire pour aller embrasser cette fille qui te plaît tant.

Ilkay Gündogan: au début, l’histoire avait tout d’un traquenard. Dans le cœur des fans, Ilkay Gündogan devait remplacer Nuri Sahin, élu meilleur joueur de Bundesliga l’an dernier par ses pairs. Rien que ça. Problème numéro un: l’axe, c’est pas forcément le délire du transfuge de Nuremberg. S’il s’est révélé en Franconie, c’est grâce à ses percées sur les côtés. Problème numéro deux: il est natif de la ville de Gelsenkirchen, qui comme chacun sait, n’est pas vraiment appréciée à Dortmund. Problème numéro trois: tout comme un autre natif de sa ville, Mesut Özil, Ilkay Gündogan a opté pour la Nationalmannschaft. Si ça ne lui a pas valu des emmerdes de la part de la communauté turque, ça a failli le tuer comme un vulgaire Amalfitano, se voyant reléguer en bout de banc. Mais Jürgen Klopp a su le gérer, et a fini par réussir à l’intégrer dans sa philosophie de jeu. Profitant des absences successives de Moritz Leitner puis de Sven Bender, Gündogan a fini fort la saison, multipliant les caviars et les passes en une touche. Pendant ce temps, Nuri Sahin…

Shinji Kagawa: Attaquant? Milieu offensif? Neuf et demi? Tout ça à la fois? Que celui qui est capable de donner le véritable poste de Shinji Kagawa lève le doigt. Quand on le voit jouer, on a l’impression que Klopp ne lui a donné qu’une seule consigne: « Cale-toi entre les lignes, et fais-toi plaisir » . Et c’est exactement ce qu’il fait. Premier sur le pressing, premier à la récup, donc, Shinji Kagawa confirme cette saison qu’il est bien loin d’être un astéroïde. Il faut dire qu’un achat à 350K l’an dernier, y a de quoi flipper sur la qualité. En plus, le type est resté blessé durant toute la Rückrunde 10/11. Et non: le Japonais a montré beaucoup de choses, est le deuxième meilleur buteur du club (13 pions), et s’il continue comme ça, il risque très vite de devenir la meilleure plus-value du football mondial. En attendant, les supporters du Borussia Dortmund le célèbrent comme à leur habitude: « Kagawa Shinji, sha la la, sha la la, la la… »

La Pologne: difficile de sortir un ressortissant du pays de l’Aigle Blanc (Biale Orly en VO) du lot. Milieu offensif droit de formation, Lukasz Piszczek joue arrière latéral depuis son arrivée au Borussia la saison dernière. Le numéro 26 du BVB a réussi à surmonter les difficultés qu’il éprouvait dans le replacement défensif lors de la saison dernière, et a même marqué quelques pions importants lors de l’actuel exercice: le but de la victoire à Mayence à la toute dernière minute (7ème journée), le but de l’égalisation à Stuttgart (9èmejournée), ainsi que lors du derby face à Schalke (31ème journée). Il faut dire qu’il bénéficie pleinement de la relation qu’il a avec son capitaine en sélection, Jakub Blaszczykowski. « Kuba » n’a pas énormément joué en début de saison, et parlait même de partir. Jürgen Klopp l’a joué fine, et a poussé l’ailier dans ses derniers retranchements. Résultat: le Polonais a transformé tout son orgueil et son amertume en passes décisives sur le terrain, ce qui lui permet d’être le meilleur Vorbereiter du club, avec dix assists. Last but not least, Robert Lewandowski. Acteur principal du traditionnel changement à la 70ème minute estampillé Klopp, en lieu et place de Lucas Barrios, « Lewa » a profité de la blessure du Paraguayen pour s’approprier le poste d’avant-centre. Du coup, c’est un joueur très élégant techniquement que l’on a découvert cette année. C’est aussi un joueur frustrant, quelque part; il est tellement facile que lorsqu’il rate une occasion, c’est à s’en arracher les cheveux. Bon, après, il a marqué à 20 reprises en 32 matchs, et surtout en 111 tentatives (1). Costaud. Quelque part, on peut dire que la Pologne a conquis l’Allemagne.

Bonus track 1: Mario Götze. Chaque année, Jürgen Klopp désigne un joueur qui ne dispute pas les matchs retour. L’an dernier, c’était Kagawa, cette année, c’est Mario Götze. Il le force à se trouver une blessure, n’importe laquelle, afin d’être absent au début de l’année civile. Du coup, le poupon n’a pas beaucoup joué cette saison en championnat: quinze apparitions, cinq buts, cinq passes décisives. Du coup, il va arriver en forme pour l’Euro. Et les supporters espèrent qu’il ne va pas trop faire le fou, sous peine de devoir faire ses valises vers un Arsenal, un Chelsea, voire un Real Madrid, qui voulait l’associer à Mesut Özil l’an dernier. Sinon, en passant, mention spéciale à Roman Weidenfeller, auteur d’un arrêt décisif sur le pénalty d’Arjen Robben lors du sommet retour (gagné 1-0). Voilà, c’est dit.

Bonus track 2: le public. Quelques chiffres. Jusqu’à présent, 1 288 140 spectateurs sont venus assister aux seize matchs du BVB dans son Signal Iduna Park/Westfalenstadion. Seules trois rencontres n’ont pas eu lieu à guichets fermés (80 720 places). Seulement 78 400 personnes se sont déplacées pour voir le Borussia Dortmund évoluer contre Nuremberg. Bref, tout ça pour dire que ce titre, c’est sûrement celui des joueurs, mais au fond d’eux-mêmes, ils savent. Ils savent que c’est grâce à leur public, qui ne les laissera jamais marcher seul.

Par Ali Farhat

(1) Dans les buteurs à plus de 20 réalisations des cinq grands championnats européens, sa moyenne buts/tentatives est de 0,18. C’est un peu mieux que celle d’Olivier Giroud et Antonio Di Natale. C’est aussi bien que RVP, Wayne Rooney, Sergio Agüero, Cristiano Ronaldo, Falcao, Edinson Cavani, voire Zlatan Ibrahimovic. C’est en dessous de Lionel Messi, et ça n’a rien à voir avec les ratios de Mario Gomez, Klaas-Jan Huntelaar et Diego Milito. Cette saison, la référence absolue se nomme… Gonzalo Higuain, qui a marqué 21 buts en 56 tirs. Merci ESPN.

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