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- J4
- PSG-Anderlecht (5-0)
Docteur Layvin Mister Kurzawa
Layvin Kurzawa a claqué un triplé contre Anderlecht. Mais ce coup du chapeau ne peut suffire à atténuer les performances moyennes d'un joueur sur courant alternatif trop souvent cette saison.
À l’approche du dernier quart d’heure, Neymar balance une ouverture millimétrée pour Dani Alves, lequel remet sans contrôle pour Lo Celso. Involontairement, le petit milieu argentin fait un écran et permet à Layvin Kurzawa, esseulé, de crucifier le pauvre gardien d’Anderlecht d’une tête plongeante. Quatre à zéro pour le PSG et doublé pour le latéral gauche, qui s’en va fêter son but avec deux doigts sur la bouche et une chorégraphie toute personnelle de Sexual Healing sur le poteau de corner. Pour l’explication de la danse, on repassera.
En revanche, il est plus simple de comprendre pourquoi il a mis un doigt sur sa bouche à son premier but, puis deux au second. Depuis le début de saison, le joueur formé à Monaco a pris cher. Devenu titulaire depuis la saison passée et la pré-retraite de Maxwell, Kurzawa a d’abord consolidé ses acquis à Paris comme en équipe de France, avant de sombrer. Plus totalement crédible au PSG, où de nombreux observateurs l’ont pointé ces six derniers mois comme maillon faible, il n’est plus non plus indiscutable en équipe de France, où Benjamin Mendy lui est passé devant avant de se faire les croisés. Même Lucas Digne, présent et solide en Bulgarie, a affiché plus de garanties sur les dernières semaines.
Défenseur friable, contre-attaquant redoutable
Mais voilà, en plantant ses trois premiers pions en Ligue des champions ce soir contre Anderlecht, Layvin Kurzawa s’est fait du bien. L’espace de 20 minutes et d’un triplé, il a rappelé à l’ensemble des amateurs de foot français pourquoi il a percé à Monaco en 2013, avant de convaincre Laurent Blanc et la direction du PSG de claquer 25 millions d’euros pour en faire un Parisien. À défaut d’être un grand défenseur – qu’il ne sera sûrement jamais –, Kurzawa est l’un des meilleurs contre-attaquants d’Europe quand il est à son vrai niveau. Car cet ancien attaquant de formation a toute la panoplie offensive : se projeter, frapper fort en première intention, être à l’affût proche du but. Des qualités magnifiées en Principauté, puis aperçues par intermittence dans la capitale depuis deux ans et demi. Avec de plus en plus de rareté ces dernières semaines, alors que les lacunes défensives du joueur n’en étaient pas moins criantes.
Trois buts en trompe-l’œil
En plantant trois buts ce soir, la Kurz’ s’est donc rappelé aux bons souvenirs de ses meilleurs moments à Monaco, et quelques coups d’éclat passés à Paris. Mais ce hat trick de prestige ne doit pas tout effacer des difficultés d’un joueur dans le creux depuis de longs mois. Y compris ce soir contre les Mauves, où jusqu’à son premier but à la réception d’un coup franc de Neymar mal repoussé, le latéral gauche du PSG avait clairement été le joueur le moins en vue de son équipe : peu tranchant devant, pas toujours totalement sûr derrière par manque d’engagement… En clair, un joueur pas en confiance, pas totalement à l’abri de la concurrence de Yuri Berchiche, loin d’être un génie, mais clairement gage de sérieux et de professionnalisme.
On peut donc dire que Layvin Kurzawa est bien heureux de finir cette quatrième journée de Ligue des champions avec un triplé, mais qu’il faudra en faire bien plus, bien plus longtemps, et contre bien plus forte opposition, pour que l’on puisse certifier qu’il est revenu à son meilleur niveau. Quant à sa célébration indiquant que les critiques à son intention étaient malvenues, elle représente une ombre non négligeable à mentionner dans le tableau : les meilleurs joueurs sont ceux qui exigent beaucoup d’eux-mêmes et se taisent face aux critiques justifiées. Ces deux doigts sur la bouche de Kurzawa sont un peu comme un symbole de ce qui sépare le Français des références à son poste : l’humilité. Car personne ne niera que le talent, il l’a déjà.
Par Nicolas Jucha