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Dix choses que vous ne savez pas sur Iniesta
« En réalité, vous ne savez rien de moi. » Voilà comment Andrés Iniesta introduit sa biographie, Mon Histoire. Un livre écrit sous la plume des journalistes Marcos López et Ramon Besa, avec les témoignages de l’intéressé et de tous ceux qui l’ont côtoyé. C’est le parcours du gamin de Fuentealbilla devenu l’un des plus beaux joueurs de son époque, mais aussi un homme éclairé, franc et généreux. Voilà dix choses que vous ne savez pas sur Andrés Iniesta, tirées de sa bio.
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Le premier jour du reste de sa vie
À douze ans, le jeune Andrés réalise son rêve : intégrer la Masia. Pourtant, il considère aujourd’hui ses années au centre de formation du Barça comme « les pires de sa vie » . L’adolescent a vécu comme un déchirement de vivre loin de sa famille, restée dans son village natal de Fuentealbilla, dans la région de Castille-La Manche, où ses parents tenaient un bar. D’ailleurs, la première nuit d’Andrés à La Masia a failli être la dernière. Son père, sa mère et son grand-père, venus l’accompagner, passent la nuit dans un hôtel barcelonais. Mais le papa, José Antonio, ne trouve pas le sommeil : « Vous savez quoi ? Je retourne à La Masía récupérer le petit ! Je n’en peux plus » , lâche-t-il. « Si sa mère n’avait pas été là, je l’aurais ramené à la maison » , assure le père. Merci maman.
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Le soldat de Pep
Une défaite à Numancia et un match nul contre le Racing Santander. À l’été 2008, les débuts de Pep Guardiola à la tête de l’équipe première du Barça ne sont pas convaincants. Guardiola, lui-même, se pose des questions sur son projet de jeu. Un soir, un joueur pousse la porte du bureau du coach. Depuis son plus jeune âge, Andrés Iniesta a toujours été un garçon timide, discret, taiseux. Alors, quelle ne fut la surprise de Guardiola de voir la tête d’Andrés derrière la porte. « Ne vous en faites pas, mister, on va tout gagner. On est sur la bonne voie, continuez comme ça, d’accord ? On joue super bien, et on s’amuse à l’entraînement. S’il vous plaît, ne changez rien, déclare alors le milieu à son coach. Et Iniesta repart en lançant un : “¡ Vamos de puta madre !” » Abasourdi sur le coup, Pep Guardiola n’a rien oublié de cette marque de soutien.
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La dépression
2009, c’est l’apogée du FC Barcelone. L’équipe de Pep Guardiola réalise une saison historique en remportant six trophées en autant de compétitions disputées. Paradoxalement, c’est à cette période qu’Andrés Iniesta était au plus mal sur le plan personnel. Il ne dormait pas, se blessait constamment, avait mal à l’estomac, sans trouver aucune explication médicale. « Quelque part, c’était comme si mon corps et mon esprit s’étaient séparés. J’avais l’impression qu’ils allaient dans deux directions opposées, confie l’Espagnol dans le chapitre intitulé L’Abysse. Son père est même allé jusqu’à l’emmener voir un mage dans le sud de l’Espagne, qui lui a fait se couper les cheveux. Finalement, épaulé par son entourage, Iniesta a fini par retrouver progressivement l’équilibre qui lui manquait.
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« Joel, peux-tu… »
Comme tous les footballeurs sous les feux médiatiques, Andrés Iniesta est entouré d’une équipe pour gérer ses intérêts et sa communication. Cependant, il prend soin de lire et de répondre personnellement aux messages qui lui sont adressés. « Un jour, j’ai fait “l’erreur” de lui dire combien d’e-mails il avait reçus, sur son site, pose Joel Borrás, l’un de ses conseillers. Il s’agissait de personnes qui demandaient des maillots, des photos, des vidéos, des autographes, etc. […] Peu importe qu’il y en avait plus de cent, il voulait les lire. Je ne sais pas comment il a fait pour trouver le temps de le faire, mais, le lundi suivant, il m’a recontacté : “Joel, peux-tu te rendre au centre d’entraînement récupérer l’un de mes maillots et l’envoyer à cette adresse… ? Joel, n’oublie pas ces photos… Joel, ils m’ont demandé une vidéo. Je vais l’enregistrer et te l’envoyer, Ok ? Tu peux leur envoyer ensuite ?… Ah, et il faut aussi un maillot pour une école de Galice qui organise une tombola ! Ils récoltent des fonds…” Et cela a continué. Il est comme cela depuis le premier jour. »
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San Andrés
« Je me rappelle qu’on avait commencé à attaquer sur la droite et que Leo s’est retrouvé avec le ballon, dans la surface, narre Andrés Iniesta. Mais les défenseurs de Chelsea lui sont tombés dessus et c’est là qu’il m’a fait la passe, quand il m’a vu. Il a réalisé qu’il ne pouvait pas frapper, alors il me l’a passé. Et là… » C’est une frappe de mule qui fouette la lucarne de Petr Čech. Le but de sa vie (avec la délivrance en finale de la Coupe du monde). On joue la 93e minute à Stamford Bridge quand le Barça égalise à dix contre onze face à Chelsea, arrachant in extremis la qualification pour la finale de la Ligue des champions. Un mois plus tard, les Blaugrana soulèveront la coupe en battant Manchester United à Rome, 2-0. Mais il y a mieux : les statistiques l’attestent, neuf mois après le golazo signé Iniesta, les hôpitaux de Barcelone ont enregistré un fort pic de naissances.
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La prophétie de Trinité-et-Tobago
À l’été 2001, l’équipe de France U17 remporte la Coupe du monde à Trinité-et-Tobago, Florent Sinama-Pongolle est élu meilleur joueur du tournoi. De son côté, l’Espagne se fait sortir dès la phase de poules après avoir battu Oman, puis perdu successivement contre le Burkina Faso et l’Argentine. Pas glorieux. Andrés Iniesta et Fernando Torres, les tauliers de la sélection espagnole, sont pointés du doigt après cet échec. Dans l’avion du retour, les deux coéquipiers échangent leur maillot. Fernando laisse une dédicace à son ami Andrés : « Un jour, toi et moi, on gagnera la Coupe du monde. Fernando Torres. » Vrai, et El Niño aurait même pu rajouter deux championnats d’Europe dans sa dédicace.
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L’héritier
Étant jeune, Andrés Iniesta avait deux idoles : Pep Guardiola et Michael Laudrup. Le premier en a fait son élément-clé quand il menait le Barça, le deuxième aperçoit en lui son double. « Quand je le vois jouer, j’ai l’impression de me revoir jouer à l’époque, assure le Danois. Je dis surtout cela quant à sa façon de se déplacer. Il y a aussi sa façon de dribbler, d’amener la balle d’un pied à l’autre, pour l’éloigner de l’adversaire.[…]Il y a le joueur qui voit la passe que tout le monde voit, même ceux qui sont en tribunes. Qu’elle soit faite ou non, c’est autre chose, mais au moins il la voit. Puis il y a le joueur qui fait la passe que personne n’attend : tout le monde pense que la balle va partir dans un sens, et il l’envoie dans l’autre. Et enfin, il y a une autre catégorie de passe, la plus difficile : celle qui passe dans un trou quasi inexistant, et que personne n’a vue. Andrés est capable de faire ces trois types de passe. »
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Un sens de l’humour déroutant
Andrés Iniesta, la monotonie incarnée ? Derrière sa personnalité calme, posée, presque mystérieuse, se cache un type qui aime bien se marrer. « Il joue sur cette impression que les gens ont de lui, décrypte son coéquipier Marc Bartra. Son sens de l’humour peut être sec, et parfois, un peu noir. Tu ne sais pas s’il se moque de toi ou pas. C’est sa façon de te surprendre. » Luis Suárez en a fait l’expérience : « Andrés, il faut apprendre à le connaître, tout comme lui doit apprendre à te connaître. Et ce n’est pas facile d’être synchro sur le terrain, quand on parle d’un milieu qui base son jeu sur des passes courtes et d’un attaquant comme moi qui cherche des ballons derrière la défense, et qui étire davantage le jeu. Il faut du temps. Un jour, il m’a dit : “Qu’est-ce qu’il y a ? Tu ne reçois aucune de mes passes.”Je me suis figé. Je ne savais pas quoi dire. Et là il m’a sorti : “Je déconne !” Je ne m’y attentais pas… »
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Andrés, le malicieux
Sur le terrain comme dans la vie, Andrés Iniesta est un homme respecté et apprécié. Et il est précisément capable de jouer sur sa réputation de joueur modèle. C’est encore Marc Bartra qui raconte : « Un jour, lors de la première mi-temps d’un match à Allecas, contre le Rayo, quand Tata Martino nous entraînait, on était assis sur le banc, tous les deux, juste derrière le juge de touche, et on n’arrêtait pas de lui crier dessus, de le critiquer. Quand l’arbitre a sifflé la mi-temps, Andrés est allé le voir pour lui dire : “Ne faites pas attention à eux, ils sont un peu tendus, ce match compte beaucoup.”Je n’en croyais pas mes yeux. S’il y en avait bien un qui râlait contre l’arbitre, c’était Andrés. Quand je lui ai dit, il m’a répondu : “T’inquiète, je l’ai séduit. Tu vas voir comment ils vont être bons, en seconde période.” »
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Le sens des responsabilités
Andrés Iniesta ne tire jamais les penaltys. Pourtant, en demi-finales de l’Euro 2012, alors que l’Espagne et le Portugal vont se disputer le ticket pour la finale aux tirs au but (0-0), le joueur s’adresse à Vicente del Bosque : « Míster, je veux tirer. » La dernière fois qu’il s’était essayé dans l’exercice, c’était en juveniles, à l’âge de dix-sept ans, et le gardien avait repoussé sa tentative. Mais dix ans plus tard, à Donetsk, il se porte volontaire pour tirer le seul tir au but de sa carrière professionnelle afin d’envoyer l’Espagne en finale de l’Euro. Si inattendu qu’après la qualification de la Roja, la journaliste Sara Carbonero demande à Iniesta : « Auriez-vous aimé tirer, ce soir ? » Elle avait oublié que le Barcelonais avait marqué le deuxième tir, en ouvrant son pied le plus tranquillement du monde face à Rui Patrício.
Par Florian Lefèvre