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« Dieu seul sait à quel point j’aime le TFC »



Par Florian Lefèvre
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Tatouée sur le bras, la causerie de Pascal Dupraz à Angers. Dans sa chambre, environ 70 maillots du Téfécé. Son club, dans la tête, « 24h/24». Depuis près d’une décennie, Andreas Nittis vit, mange, boit, dort TFC, et bien plus encore. Le tout à 2 879 km de Toulouse.

Salut Andreas, est-ce que tu peux te présenter ?Je viens de Limassol, j’ai 21 ans. Après avoir fait mon service militaire, j’étudie à l’université de Chypre, avec pour projet de devenir professeur des écoles. Dans la vie de tous les jours, je n’ai pas trop de hobby en dehors de mon club : le TFC. En fait, je t’avoue que j’ai le TFC dans la tête 24h/24 ! J’ai tout le temps l’œil sur mon smartphone (j’ai la 4G). Pendant les cours, à la fac, je veux être informé tout de suite des actus de mon club. Même au petit matin, je me lève exprès pour regarder des vidéos du TFC.



Comment en es-tu venu à supporter le Téfécé, depuis ton île chypriote ?En fait, ça sort vraiment de nulle part. À Chypre, je suis l’Apollon Limassol, mais ici, le foot… Les présidents arrangent les matchs, les dés sont pipés. Pourquoi la Ligue 1 ? Voir la lanterne rouge du championnat taper le leader du championnat, pour moi, c’était incroyable ! Mais je voulais me différencier des « footix » , comme vous les appelez en France, qui suivent le PSG, l’OM ou l’OL, mais qui, en vérité, ne connaissent rien de leur club. Tout commence en 2007, quand je découvre cette équipe qui remue les meilleures écuries de L1 (l’époque de Douchez, Arribagé, Mathieu, Dieuze, Batlles, Elmander… 3e en 2006-07, ndlr). De ces années-là, je me rappelle d’un succès 4-1 face au PSG, un 3-0 contre l’OM et des victoires devant le champion lyonnais.

J’essaye d’aller à Toulouse une à deux fois par an. Pour me payer les voyages, je travaille tout l’été de 23h à 7h du matin dans un petit kiosque. C’est dur, c’est crevant, mais ça vaut le coup.

Mais tu ne restes pas un simple supporter, tu deviens un véritable inconditionnel toulousain… En plus, au club, j’étais apprécié de tout le monde : supporters, joueurs, staff, les salariés du club, tout le monde ! Désormais, à chaque fois que je vais à Toulouse, je retrouve une deuxième famille. On m’accueille comme un fils. C’est justement cet esprit de famille qui me donne envie de tout donner pour le club.

Quand as-tu découvert le Stadium pour la première fois ? Un sacré périple depuis Limassol, non ? C’était en 2012 ! En tout, je suis venu six fois à Toulouse. Désormais, j’essaye d’y aller une à deux fois par an. Pour me payer les voyages, je travaille tout l’été de 23h à 7h du matin dans un petit kiosque. C’est dur, c’est crevant, mais ça vaut le coup. Assister pour la première fois à un match du TFC, pour moi, c’était un rêve qui devenait réalité. Un miracle ! Je ne pouvais pas y croire, et depuis je ne cesse de vouloir revenir à Toulouse.

Quel est ton état d’esprit, en tant que supporter ?Je suis à fond dedans. J’essaye tout le temps de me bouger pour l’équipe, même depuis mon île. J’écris et j’envoie des lettre aux joueurs, au staff, pour les encourager. Je fais des vidéos. (Rires) Sur les réseaux sociaux, j’essaye de porter haut le nom de mon club. Et bien sûr, il y a les tatouages !

Au début, à Chypre, tout le monde se foutait de moi.

Tu as contacté le TFC, comment ça s’est passé ?J’ai toujours rêvé de faire partie du staff du TFC, mais malheureusement, je crois que c’est impossible. D’ailleurs, pour prouver mon amour au club, je leur ai envoyé une lettre pour demander une place dans le staff, dans le but de motiver les joueurs par exemple. En réponse, ils m’ont fait comprendre que ce n’était pas possible, mais j’ai quand même reçu des maillots portés par les joueurs.
Qu’est-ce que tu leur as écrit ? Comment as-tu essayé de les convaincre ?Je leur ai raconté toute mon histoire, mes voyages à Toulouse, toutes les vidéos que j’ai réalisées pour le TFC (sur Viméo et Youtube), tout l’argent que j’ai dépensé pour le club… Depuis 2007, en tout, entre mes achats et ceux offerts par les joueurs, j’ai collecté environ 70 maillots du TFC !



Qu’en disent ta famille, ta petite amie, ton entourage ?Au début, ici, tout le monde se foutait de moi. Mais quand mon histoire a commencé à circuler dans les médias, quand je suis devenu un véritable membre du club, je ne les entendais plus… Je m’en fous maintenant, ce qui compte, ce sont mes vrais proches, et eux me soutiennent. Quand on s’est maintenu lors de la dernière journée, à Angers, mon père pleurait dans mes bras. Habituellement, je regarde les matchs du TFC avec ma copine. À vrai dire, c’est ma passion et ma différence qui l’ont rendu amoureuse de moi ! (rires)

Tu penses qu’ils savent à quel point tu es attaché au club ?Même si j’essaye de leur expliquer, même s’ils le voient tous les jours, il n’y aura toujours que Dieu pour savoir réellement à quel point j’aime cette équipe.

Ali Ahamada est une crème, tu ne trouveras pas un footballeur plus adorable que lui. Depuis mes tout premiers échanges avec Ali sur Facebook, il a été super sympa. Il m’envoyait de nombreux cadeaux à Chypre, et j’en ai reçu plus encore quand je suis venu à Toulouse.

Comment expliques-tu ta passion débordante à quelqu’un qui ne s’intéresse pas au foot ?Avec une personne qui ne s’intéresse pas au foot, c’est compliqué, mais une passion, quelle qu’elle soit, doit être estimée et respectée. Si les gens ne mettaient pas de passion dans ce qu’ils font, le monde n’aurait pas cette allure aujourd’hui.

Venons-en aux tatouages sur ton bras droit. Quelques mois après t’être gravé l’écusson du club, tu as donc la mythique causerie de Pascal Dupraz dans la peau, qu’est-ce que ça représente pour toi ? À l’origine, c’était un pari avec mes potes et des supporters du TFC. Tu dois toujours suivre ton instinct parce que dans la vie, il vaut mieux regretter d’avoir fait quelque chose plutôt que de regretter ensuite de ne pas l’avoir fait. Ce tatouage, c’est une fierté. Ma famille a toujours respecté mes choix parce qu’ils savent que c’est ma passion. Après, il y aura toujours des rageux…


D’ailleurs, ça vaut une sacrée récompense ce pari gagné, non ?J’ai l’honneur et le bonheur de porter toujours sur moi quelque chose qui me rend très fier de ce qu’a accompli mon équipe. Ça me suffit amplement.

L’année dernière, le site de France Football dressait ton portrait et évoquait tes échanges avec Ali Ahamada. Il t’a notamment envoyé ses gants à Limassol. Raconte-nous ta relation avec lui… Ali est une crème, tu ne trouveras pas un footballeur plus adorable que lui. Depuis mes tout premiers échanges avec Ali sur Facebook, il a été super sympa. Il m’envoyait de nombreux cadeaux à Chypre, et j’en ai reçu plus encore quand je suis venu à Toulouse. On a dîné ensemble. Aujourd’hui, même s’il n’est plus au club, j’essaye de lui rester fidèle. Je gère la page Facebook en son honneur. Avec le temps, plus qu’une relation fan/joueur, on est devenus des amis.

J’étais à White Hart Lane, mais je suis parti, je ne pouvais pas louper le Guingamp-Toulouse.

Il joue désormais à Kayserispor. La Turquie, c’est la porte à côté comparé à Toulouse. Tu as pu le rencontrer Ali Ahamada, là-bas ?Malheureusement, non. Les relations Chypre/Turquie, c’est plus que tendu. Nous, Chypriotes, on ne peut pas aller là-bas. La Turquie est le seul pays au monde à ne pas reconnaître la République de Chypre. (C’est-à-dire le sud de l’île, qui fait partie de l’UE. Depuis 1974, une ligne de démarcation barre l’île en deux parties, le nord étant un État non reconnu, sauf par la Turquie, ndlr.)

En mai 2015, tu es parti à Londres assister à un match des Spurs, mais tu as quitté White Hart Lane en plein milieu de la seconde période pour ne pas manquer les premières minutes d’un match du TFC à la télé. Ça mérite bien que tu reviennes sur cette soirée en détails… Avant mon quatrième séjour à Toulouse, j’ai eu la chance de visiter Londres pendant trois jours, donc j’en ai profité pour me payer un match de Tottenham (contre Hull City). La Premier League est le meilleur championnat au monde, je ne pouvais pas rater ça. Mais à la 70e, je n’en pouvais plus : deux heures plus tard, le TFC jouait Guingamp dans un match capital pour le maintien lors de la 37e journée de Ligue 1. Je ne me suis pas posé de questions : ma place m’avait coûté un bras, mais je me suis levé, et je me suis barré. Dans le stade, les gens me prenaient pour un fou. J’ai couru jusqu’à la station de métro la plus proche. En pensant au TFC, j’étais aussi rapide que Bolt. Finalement, j’ai réussi à rejoindre mon hôtel à temps, à Gatwick (le quartier de l’aéroport secondaire de Londres, au sud de la capitale, à l’opposé de White Hart Lane, ndlr). Et j’ai profité de mon TFC (défaite 2-1 à Roudourou, mais maintien assuré en L1 pour les Violets, ndlr).

Comment fais-tu pour suivre la Ligue 1 à Chypre ?

J’ai pris un abonnement mensuel avec l’équivalent de beIN Sports, pour regarder tous nos match – et évidemment, en plus, je suis tout le temps connecté sur les sites liés au TFC.

D’ailleurs, sur les réseaux sociaux, tu postes tes messages en français (l’interview s’est déroulée en anglais, ndlr), tu étudies la langue à la fac ? J’ai appris le français uniquement en discutant avec les autres supporters. Et maintenant que je suis à la fac, j’en suis récompensé : j’ai eu deux fois 10/10 en français aux examens. Merci le TFC ! (rires)

Pour conclure, est-ce que tu as un message à faire passer à Pascal Dupraz ? Tu t’es quand même tatoué son discours sur le bras !À notre coach, je déclare un énorme MERCI, pour avoir orchestré ce come back incroyable ! Et je veux lui dire qu’avec lui, on est convaincus de vivre des heures de gloire au TFC.

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Par Florian Lefèvre

crédits photos : Facebook - Andreas Nittis, alias Andreas Allez Toulouse

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