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Diego Rolán : « J’aimerais rejouer à Bordeaux un jour »

Propos recueillis par Thomas Broggini, à Montevideo
Diego Rolán : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J’aimerais rejouer à Bordeaux un jour<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Après plusieurs expériences contrastées en Espagne, en Égypte et au Mexique, l’ex-attaquant uruguayen des Girondins a décidé de relancer sa carrière dans le mythique club de Peñarol, à Montevideo. À 30 ans, il rêve encore de la sélection et d’un retour en Europe, dans son ancienne équipe par exemple, où il ne s’est « jamais senti aussi fort ».

Dix ans après ton départ du Defensor Sporting Club pour les Girondins de Bordeaux, te voilà de retour en Uruguay. Ça fait quoi d’être de retour à la maison ?

(Grand sourire.) Je suis comblé. Dix ans, c’est long. J’ai connu d’autres cultures, des façons de vivre différentes, j’ai appris beaucoup de choses. Mais le pays m’a énormément manqué. Revenir est un plaisir, une fierté. Je profite de ces moments comme jamais. Je suis proche de ma famille, de mes amis, de ma culture, dans une équipe dont je suis hincha depuis petit. 

Pourquoi ce choix ?

Je jouais depuis 2021 au Mexique (au FC Juárez), où l’entraîneur (l’Argentin Hernán Cristante, arrivé en mai 2022) ne comptait pas sur moi, donc j’ai dû partir. J’ai eu une opportunité en Espagne, mais elle ne me convenait pas, et une touche en Turquie. Puis j’ai voyagé avec ma famille à Punta del Este (au sud-est de l’Uruguay) pour les vacances, et l’opportunité de venir à Peñarol est apparue. Quand j’en ai entendu parler, mes poils se sont dressés parce que toute ma famille est fan de ce club. Ce n’était pas du tout planifié, mais je n’ai pas hésité et je suis très heureux de cette décision. C’était le moment de revenir. 

Que représente ce club pour toi ?

(Il souffle.) C’est énorme, je ne sais pas si les gens s’en rendent bien compte en Europe. Peñarol fait partie de l’histoire du football et a toujours été compétitif au niveau international. Son palmarès parle pour lui (51 titres de champion d’Uruguay, 5 Copa Libertadores, 3 Coupes intercontinentales). C’est un très grand club, par lequel sont passés beaucoup de grands joueurs (Darwin Núñez, Facundo Pellistri ou Federico Valverde parmi les plus récents). Être hincha de Peñarol, c’est un sentiment surpuissant et inexplicable. Le stade Campeón del Siglo est quasiment plein à chaque match, l’ambiance est phénoménale. 

Comment se vit le superclásico contre Nacional, l’autre géant de Montevideo et du football uruguayen ?

C’est sensationnel. L’un des plus grands clásicos du monde. La passion autour de ce match, ce qu’il signifie pour chaque club, l’intensité de la rivalité… C’est unique. J’ai très envie de vivre ça.

 

Signer au Peñarol, ce n’est ni un pas en arrière, ni une manière de terminer tranquillement ma carrière en venant me reposer au pays.

Ce retour aux sources, c’est un pas en arrière ?

D’aucune manière ! C’est même tout le contraire, puisque si tu es bon à Peñarol, ça t’ouvre des portes vers l’extérieur. Ce n’est ni un pas en arrière, ni une manière de terminer tranquillement ma carrière en venant me reposer au pays. Je viens pour gagner avec l’équipe de mon cœur. C’est tout ce qui m’anime, et je pense que c’est possible avec l’effectif qu’on a. Je veux être champion et je rêve de gagner la Copa Sudamericana. 

Avant de revenir en Europe ?

J’ai signé un contrat de deux ans, avec une clause de départ en fin de saison si une offre intéressante de l’étranger nous convenait, à moi comme au club. Retourner en Europe, ce n’est ni un besoin, ni une obsession, mais j’aimerais bien, oui. Et pourquoi pas vivre une expérience dans un nouveau championnat ?

Málaga, Leganés, Alavés, Juárez, La Corogne, Le Caire : tu as beaucoup bougé, depuis ton départ de Bordeaux en 2017.

C’est vrai. Et Bordeaux reste mon meilleur souvenir, sans aucun doute. C’est une ville qui m’a donné beaucoup d’affection, que j’aime beaucoup, où je me sens bien. J’ai développé une relation spéciale avec les supporters. Je suis retourné à Bordeaux il y a quelques mois pour les vacances avec ma famille et les gens me saluaient dans la rue. Ils se souviennent de moi. Dans un magasin, je suis même tombé sur un livre de l’histoire du club dans lequel je me trouvais. Ça m’a rendu fier.

C’est aussi un peu de ma faute si Ibrahimovic a traité la France de “pays de merde”.

Tu es arrivé en France à 19 ans…

J’étais très jeune, oui, et la première année a logiquement été très, très difficile pour moi. Je ne parlais pas la langue, je découvrais une autre culture, j’étais seul et loin de ma famille… J’ai même été sur le point de revenir en Uruguay, mais Jérôme Bonnissel (ex-directeur de la cellule de recrutement des Girondins, NDLR), qui était à l’origine de ma venue, m’a convaincu de rester. Petit à petit, j’ai relevé la tête, gagné du temps de jeu et marqué des buts. C’est un club qui représente beaucoup pour moi. Il m’a rendu meilleur en tant que footballeur, car la Ligue 1 est très dure physiquement et plus compétitive que la D1 uruguayenne à tous les niveaux. Et en tant qu’homme, j’ai aussi grandi, je suis devenu plus mature, puisque je n’avais plus ma famille avec moi pour m’aider si j’avais un problème. Si je suis ce que je suis aujourd’hui, c’est en grande partie grâce à ces années à Bordeaux. 

 

Quels sont tes plus grands souvenirs des Girondins ?

Je suis fier d’être entré dans l’histoire du club en marquant les deux derniers buts au stade Chaban-Delmas (contre Nantes, 2-1, le 9 mai 2015, NDLR) et les deux premiers dans le nouveau (face à Montpellier, 2-1, deux semaines plus tard). Il y a aussi cette victoire assez folle, 3-2, face au PSG, grâce au but que je marque dans les dernières minutes. En face, il y avait quand même Cavani, Ibrahimovic, Lavezzi, Thiago Motta, Thiago Silva, David Luiz, Lucas Digne… Une grande équipe qui explosait tout le monde. Donc gagner comme ça, c’était quelque chose. Mais le match est surtout resté célèbre parce que Zlatan a traité la France de « pays de merde » à la fin. (Rires.) Il était énervé contre l’arbitrage, mais ce ne serait peut-être pas sorti sans ce but, donc c’est aussi un peu de ma faute !

 

Ousmane Dembélé était incroyable à Rennes. Tu ne savais jamais ce qu’il allait faire quand il avait le ballon dans les pieds.

Des joueurs t’ont-ils impressionné durant ces quatre saisons et demie en France ? 

(Du tac au tac.) Ousmane Dembélé ! Il débutait à Rennes. Il était incroyable. Tu ne savais jamais ce qu’il allait faire quand il avait le ballon dans les pieds. Un coup, tu le voyais dans le couloir droit, un coup dans le couloir gauche. Il dégageait une telle impression de facilité, des deux pieds, il était si rapide… Wouah ! Impressionnant. Nabil Fekir était aussi un grand joueur, c’est dommage qu’il n’ait pas eu de chance ensuite avec sa blessure au genou. À Bordeaux, André Poko était plutôt petit, mais c’était un vrai roc, un joueur très, très fort physiquement. À l’entraînement, il bougeait Cheik Diabaté dans les duels. Globalement, on avait beaucoup de potentiel durant ces années, avec aussi mes amis Mariano, Henrique, Emiliano Sala, Jaroslav Plasil, Lamine Sané… 

Qu’a-t-il manqué au club pour faire mieux que sixième en Ligue 1, sa meilleure performance lors de tes années là-bas ?

On a quand même gagné la Coupe de France lors de ma première saison au club en 2013. On se battait pour la Ligue Europa, ce qui était certes moins bien que ce à quoi les supporters avaient été habitués les années précédentes. Après, il y avait le PSG, Lyon, Marseille, Monaco… des grandes équipes. Donc ce n’était pas si mal. 

Et aujourd’hui, Bordeaux est en Ligue 2…

C’est incompréhensible et ça fait très mal. C’est une équipe qui doit être en Ligue 1. La ville et le club le méritent. Cette relégation, c’est la conséquence de nombreux bouleversements, la vente du club, l’arrivée d’un nouveau propriétaire, de nouvelles idées… La culture du club a changé, des gens qui aimaient le club sont partis. Tous ces changements ont fait du mal à ce club familial qui représente la ville et les Bordelais.

Depuis Alavés, je prenais parfois la voiture et roulais 350 km pour aller à Bordeaux le week-end.

Pourquoi être parti à Málaga en 2017 ?

Parce que je voulais vivre une expérience dans un nouveau championnat. Ce n’était pas parce que je n’étais plus heureux à Bordeaux ou parce que je n’aimais plus le club. Je l’aimais encore, et je l’aime toujours beaucoup. Mais professionnellement, j’aspirais à un changement. Je peux comprendre que certains n’aient pas compris cette décision à l’époque et aient interprété mon choix d’une autre manière. Mais chaque fois que je le pouvais, après mon départ à Málaga, et même ensuite quand je jouais à Leganés puis Alavés, je revenais le week-end à Bordeaux voir les matches et passer du temps en ville. Depuis Alavés, je prenais parfois la voiture et roulais 350 km.

Tu as pensé à revenir ?

Il y a un moment où j’en ai eu envie, oui, mais l’opportunité ne s’est jamais présentée. Je n’ai pas de honte à dire que j’aimerais y rejouer un jour. Ce club et cette ville signifient beaucoup dans ma carrière et dans ma vie. 

Tu as connu de nombreux entraîneurs ici. Lequel t’a le plus marqué ?

Chaque coach a sa méthode de travail et les joueurs doivent s’adapter. Francis Gillot était un très bon entraîneur, avec qui on a gagné la Coupe de France. Ensuite, il y a eu Willy Sagnol, qui est arrivé avec une idée du jeu très allemande, en rapport avec son passé au Bayern Munich. On a été très bons avec lui lors de la première saison, mais lors de la deuxième, tout a changé. Il est arrivé et a dit : « On n’utilise plus le téléphone portable, telle tâche est obligatoire, il faut faire ceci, cela… » Un management plus directif. Les joueurs ont été moins réceptifs et ça s’est moins bien passé cette saison-là. Avec Jocelyn Gourvennec, ça a été un peu la même trajectoire.

Tu n’as pas toujours été irréprochable, en arrivant par exemple plusieurs fois en retard au retour de vacances ou de la sélection. En décembre 2014, tu as aussi refusé de t’échauffer lors d’un match sur la pelouse du FC Nantes et tu as failli en venir aux mains sur le banc avec Nicolas Maurice-Belay…

Pour les retards, j’ai été sanctionné à chaque fois. Concernant la rencontre à Nantes, il restait peu de temps à jouer et je savais que je n’allais pas entrer. J’étais sur le banc, on m’a demandé d’aller m’échauffer et j’ai dit non. Nicolas, qui avait lui-même été remplacé, me l’a reproché et on s’est embrouillés pour ça. Je me suis fait sanctionner ensuite, j’ai passé une semaine en équipe réserve, en CFA. La vérité, c’est qu’on s’entendait très bien. On n’était pas super amis non plus; mais on s’est toujours respectés, on parlait beaucoup. C’est l’un des joueurs avec qui j’ai le plus aimé jouer. Comme attaquant, c’était un régal de pouvoir profiter de sa qualité de centre. On ne l’aurait pas dit, mais il était très rapide, et je savais que quand il débordait sur son côté, un centre allait arriver, souvent au premier poteau. Et j’ai marqué beaucoup de buts comme ça. On avait une vraie connexion sur le terrain. 

Tu regrettes d’être parti ?

Non, parce que j’ai grandi encore plus à travers d’autres expériences. J’ai découvert la Liga, un championnat très compétitif, avec Málaga. J’ai marqué contre le Real Madrid, un beau souvenir.

Tu as aussi connu brièvement la troisième division espagnole, avec La Corogne…

Oui, parce que je devais partir à Nîmes, mais il n’y a pas eu d’accord avec La Corogne. Le contrat était prêt, tout le monde était d’accord et, au dernier moment, La Corogne a demandé à Nîmes une indemnité supplémentaire, et ça a fait échouer le transfert. C’était un malentendu autour d’un droit lié à la formation, une somme comme 100 000 euros je crois. Nîmes a recruté un autre attaquant, et je suis retourné en Espagne, mais ça a été très court, je n’ai joué que 5 matchs.

Et tu as atterri au Pyramids FC, une équipe du Caire, en D1 égyptienne…

Une expérience très particulière, difficile. La culture, la religion, les gens, le football… Tout est très différent. Au niveau personnel, je n’ai pas aimé. Mais je crois que même dans les moments plus compliqués, on apprend toujours quelque chose. Là non plus, pas de regret. Le jeu est très dynamique là-bas, tu cours sans arrêt d’une surface à l’autre, mais techniquement, ce n’est pas du très haut niveau.

Et le Mexique ?

J’ai beaucoup aimé, même si j’aurais aimé que ça se termine autrement. Quand je suis arrivé, Juárez était en pleine phase de croissance, donc les infrastructures n’étaient pas très bonnes, mais c’est une ville très agréable et les gens sont fabuleux. Ils m’ont beaucoup aimé et respecté là-bas. Ces derniers mois sans jouer ont été compliqués, mais ça reste un bon souvenir.

Tu as pu voir la folie André-Pierre Gignac de près ?

Il est phénoménal, et il l’était déjà en France. Au Mexique, c’est vraiment une légende. Les gens l’aiment parce qu’en plus de ses performances incroyables sur le terrain et des nombreux titres qu’il a gagnés avec les Tigres de Monterrey, il s’est approprié la culture locale. Il vit et parle comme les Mexicains. Voir qu’il s’éclatait autant, ça m’a donné envie de venir. J’ai vu que ça pourrait être intéressant de jouer dans un championnat en plein développement, par lequel d’autres grands joueurs comme Ronaldinho sont aussi passés. 

Tu n’as plus été appelé en sélection depuis juin 2017. Tu y crois encore ? 

C’est possible, bien sûr. Ça va dépendre de ce que je démontre ici. J’aimerais revenir un jour. Représenter mon pays lors de deux éditions de la Copa América, lors des éliminatoires pour la Coupe du monde 2018, c’était un rêve. J’ai des souvenirs magnifiques. J’ai partagé le vestiaire avec des grands joueurs comme Luis Suárez, Edinson Cavani, Diego Godín, Martín Cáceres… Aujourd’hui, il y a un renouvellement de génération, avec des joueurs très intéressants : Maxi Gómez, Darwin Núñez, Fede Valverde, Rodrigo Bentancur… Il y a aussi Matías Arezo (20 ans), un joueur à suivre, qu’on a la chance d’avoir à Peñarol. Il a des caractéristiques similaires à celles de Luis Suárez et je crois qu’il peut avoir un grand futur, en Europe et en sélection.

Tu es déjà parvenu à la meilleure version de toi-même ?

Pas encore. Mais je m’en suis rapproché à Bordeaux. Je ne me suis jamais senti aussi fort que lors de la saison 2014-2015 (15 buts et 4 passes décisives en 36 matchs de Ligue 1, NDLR), même si j’ai aussi été performant à Málaga. Et j’ai pris beaucoup de plaisir lors de ma première saison au Mexique. J’ai aussi connu quelques blessures qui m’ont freiné. Mais je suis fier et heureux de ma carrière. Je suis passé par des clubs importants, des grands championnats, j’ai joué avec des grands joueurs, j’ai connu la sélection (25 capes, 4 buts) et accumulé plein de souvenirs. Et à Bordeaux, à Málaga ou au Mexique, les gens m’aiment beaucoup. Je crois qu’il n’y a pas de plus belle récompense.

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Propos recueillis par Thomas Broggini, à Montevideo

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