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Diego Forlan, un tueur aux boucles d’or

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Diego Forlan, un tueur aux boucles d’or

Joueur sous-coté pour les uns, véritable arnaque pour les autres, Diego Forlan navigue quelque part entre l'indifférence et l'injustice dont il est l'objet. Portrait d'un des meilleurs buteurs de la Liga, pour qui Manchester City serait prêt à débourser 32 millions d'euros cet été. Un prix justifié ou pas ?

Éliminés par Porto en huitième de finale de la Ligue des Champions, les supporters de l’Atletico ne comprennent toujours pas ce qui est passé par la tête du coach Abel Resino lors du match retour au Portugal : mais pourquoi diable avoir laissé Diego Forlan sur le banc ? Meilleur buteur des Colchoneros cette saison, l’Uruguayen est aussi l’un des matadors les plus réguliers de la Liga depuis bientôt cinq saisons. Malgré ses stats impressionnantes, le Charrua suscite pourtant plus d’indifférence que de passion autour de son cas. Oui, la vie est une belle salope, Diego Forlan ne sera jamais une star. Mais pourquoi donc ?

Pour Jorge Valdano, le plus gros défaut de l’attaquant rojiblanco est d’être né en Uruguay : « Si Forlan était argentin, il serait une énorme star du football et tous les clubs se l’arracheraient » . Il n’a pas tout à fait tort. A l’Atletico, la star c’est bien le Kun Agüero, et pourtant, les statistiques ne mentent pas : Forlan marque plus de buts que le gendre maradonien. Avec un pion toutes les 101 minutes, il est le buteur le plus efficace de la Liga, juste derrière Huntelaar et Samuel Eto’o. Agüero n’arrive que cinquième de ce classement de la rentabilité devant les bois mais c’est bien lui qui est toujours sous le feu des projecteurs. Forlan n’a pas qu’un problème de passeport ; il a aussi un problème d’image, c’est une évidence.

Au contraire de la grande majorité des attaquants sud-américains, Forlan n’est ni fantasque, ni capricieux et encore moins polémique. Il n’a pas de surnom ridicule comme Messi, pas de gueule de métèque mal léché comme Tevez et ne vient pas d’un quartier difficile comme le Kun ou la majorité des avants-centres cariocas.

Beau, blond aux yeux bleus et musclé, Forlan a vraiment de quoi faire complexer tout un continent. Son surnom à lui, c’est “El cachas”, le baraqué. Faut dire que le Charrua n’a jamais connu la malnutrition. Alors que ses homologues ont crevé la dalle pendant toute leur enfance, Diego tapait la balle jaune avec une raquette dans le très huppé Tarrasco Lawn Tennis Club de Montevideo. Être un gosse de riche, ça n’aide pas vraiment dans un sport aussi populaire que le football. Encore moins quand on joue dans le club de la classe ouvrière madrilène…

Petit-fils de l’entraîneur de la Celeste 62 et fils de footballeur (son père Pablo a disputé trois coupes du monde avec l’Uruguay et porté les maillots de Sao Paulo, Cruzeiro et Penarol entre autres), Forlan ne s’intéresse pas vraiment au football. Jusqu’à l’age de 11 ans, le tennis est sa seule passion : « Mon rêve quand j’étais petit, c’était de disputer Roland-Garros ou Wimbledon, pas de devenir footballeur professionnel » . C’est sa sœur Alejandra qui va changer son destin en ayant un accident de la route. Après quatre mois de coma, l’aînée apprend qu’elle finira ses jours en chaise roulante. Un épisode tragique -le seul- qui marquera à jamais la vie de l’attaquant : « J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps à cette époque-là. Ma sœur m’a orienté vers le football, elle disait que si elle pouvait encore courir, elle taperait dans un ballon de cuir. J’ai réfléchi et je me suis dit qu’avec le football, je pourrais mieux gagner ma vie qu’avec le tennis. Je voulais trouver un miracle pour Alejandra et ça passait par le football professionnel » .

Quatre ans plus tard, Dieguito intègre les équipes de jeunes du Penarol Montevideo, avant d’être transféré à 17 ans à l’Independiente Avellaneda, l’ancien club du Kun Agüero. C’est donc en Argentine que Forlan dispute son premier match en pro au poste de milieu de terrain.

2000, l’entraîneur le titularise en attaque. Une réussite, puisqu’en deux saisons, Forlan empile 34 buts en championnat. Surtout, Alex Ferguson le repère pour en faire un joker de luxe à Manchester United en 2002. A son arrivée en Premier League, Forlan semble pourtant dépassé par les événements. Ses ratés sont aussi nombreux que les critiques à son égard. Le coach écossais n’hésite d’ailleurs pas à le tacler durement : « Diego est peut-être l’avant centre qui se procure le plus d’occasions d’Angleterre, mais il a un défaut : il rate le plus facile et réussit le plus dur. S’il pouvait juste réussir le plus facile, ce serait déjà très bien » .

Quatre saisons et seulement dix-sept buts plus tard, Forlan rejoint Villarreal pour 1,5 million d’euros. Un an plus tôt, le sous-marin jaune avait déjà été intéressé par l’attaquant, mais l’entraîneur, le néfaste et peu visionnaire Victor Munoz, considérait qu’il n’avait pas vraiment de qualités.

A l’époque, l’actuel entraîneur de Getafe lui avait préféré Marioni… Marioni, l’actuel attaquant de l’Atlas de Guadalajara (Mexique). Schuster, qui entraînait Levante, avait eu plus de flair que son homologue du sous marin jaune : « Pendant deux ans, j’ai fait le forcing pour qu’il vienne nous rejoindre. J’avais même dit au président que j’irais le chercher en voiture à Manchester s’il le fallait » .

En fuyant l’Angleterre, Forlan aurait donc pu finir dans un club de merde sans que personne ne s’en offusque. Après un club interplanétaire, Forlan choisit la tranquillité de Villarreal et découvre des matchs sans pression et des coéquipiers qui lui filent des caviars.

Aujourd’hui, le directeur sportif de Villarreal, llaneza, n’hésite pas à considérer Forlan comme le meilleur joueur de l’histoire du club : « Avec nous, il a explosé littéralement. En arrivant, il n’avait pas confiance, il voulait juste du calme et du temps de jeu. A chaque fois qu’il marquait, pour moi, c’était un cauchemar : je me demandais combien de temps on pourrait encore le garder. Forlan était trop ambitieux pour rester dans un club familial comme le notre » .

A la fin de sa première année en Espagne, Forlan est désigné Pichichi de la Liga avec 25 buts et partage le Soulier d’Or européen avec Thierry Henry. Ferguson s’en mord les doigts et verse dans l’ironie pour se consoler comme il peut : « C’est surprenant. Mais avec lui, c’est presque normal. Il a passé quatre ans avec nous et je ne saurais toujours pas dire s‘il est droitier ou gaucher » . Forlan est effectivement ambidextre, mais plante ses plus beaux buts du gauche et de loin de préférence. A Villarreal, ses compagnons lui donnent dès lors un nouveau surnom : le “tout-terrain”. Cazorla, son compagnon, se rappelle : « Il aimait courir, se dépenser, c’est un battant, il était partout à la fois. Quand il ne gagnait pas ou ne marquait pas, il devenait vraiment ignoble, limite chiant » .

Devenu meilleur buteur historique du sous-marin jaune, Forlan décide néanmoins de tout risquer en rejoignant l’Atletico. Un choix bizarre. Demandez donc à Kezman. Transféré pour 23 millions d’euros, Forlan double son salaire chez les Colchoneros, ce qui lui permet entre autres de financer personnellement une campagne de prévention contre les dangers de la route en Uruguay. Alejandra n’aura jamais de remède miracle, mais l’Atletico, en revanche, vient de trouver l’un des meilleurs antidotes du marché pour disputer les places qualificatives pour la Ligue des Champions. Il est sans conteste le meilleur investissement des Rojiblancos depuis Diego Simeone.

Dans la capitale espagnole, Forlan retrouve également son premier amour : le tennis. « Lors du Masters, j’ai rejoint l’entraîneur uruguayen de Nicolas Lapenti. J’échange quelques balles avec lui, j’ai même servi de sparring partner à Nalbandian » . Un petit kiff qui a également quelques vertus : « Le tennis, ça m’aide à travailler la résistance et la vitesse des jambes. C’est un sport où il faut être explosif, ce qui est également le cas du football. Quand je joue au golf, c’est plutôt le travail de concentration qui m’intéresse » .

Visiblement Forlan n’a pas encore un bon handicap. S’il avait réussi la moitié de ses face à face avec les gardiens cette saison, il serait sans doute à l’heure actuelle le Pichichi en lieu et place de Samuel Eto’o. Avec 21 buts au compteur, il peut néanmoins encore prétendre dépasser le Camerounais, d’autant que 65 % de ses buts sont marqués lors des matchs retours du championnat. Il reste dix journées à Forlan pour exploser les stats et prouver enfin qu’il mérite d’être comparé à un Argentin. Pour lui, c’est d’ailleurs bien plus qu’une question d’honneur : il ne sera jamais une star comme Agüero, mais de toute évidence le Kun ne deviendra jamais Pichichi de la Liga.

« D’ici deux ans, le gardien de l’équipe première aura un casque »

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