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Didier Segers : « On est toujours les légendes de Wembley 93 »

Propos recueillis par Julien Duez, à Duisburg
Didier Segers : « On est toujours les légendes de Wembley 93 »

Après douze ans de purgatoire, l'Antwerp fête aujourd'hui son retour dans l'élite du football belge. Mais le pic de son histoire remonte à 1993 et cette finale de Coupe des coupes disputée à Wembley face à Parme en 1993 (défaite 3-1). Depuis, aucun club belge n'a disputé la moindre finale européenne. À l'époque, sur le terrain, sévissait Didier Segers. À 52 ans, l'ancien défenseur est aujourd'hui patron de café à Tervuren, commune dans la province du Brabant flamand. Il revient aujourd'hui sur tout : Wembley, évidemment, mais aussi sa fin de carrière houleuse, sa chute dans l'alcool et son désir de tout plaquer pour aller bosser dans les vergers à Alicante.

On se souvient de toi en Flandre, mais à l’origine, tu es un vrai Bruxellois.

Je suis né dans la même clinique que Jean-Claude Van Damme.

En effet, je suis né à Berchem-Sainte-Agathe, dans la même clinique que Jean-Claude Van Damme. J’ai grandi à Molenbeek, avec mon père. Nous ne manquions pas un match du RWDM au stade Edmond-Machtens.

Tu as toujours voulu devenir footballeur professionnel ?Oui, mais j’avais un problème : j’étais trop gros. Après les matchs, je rentrais chez moi et je disais à mon père : « Papa, j’y arrive pas, je suis trop gros. » Et lui me répondait toujours : « Le plus grave, ce n’est pas de rater, c’est de ne pas essayer. » Alors j’ai essayé. Toutes les nuits, je sortais courir deux heures, je faisais du vélo d’appartement et j’ai perdu dix kilos. En 1984, après deux saisons au RWDM sous la houlette de Johan Boskamp, je suis allé passer des détections au Stade Louvain (D3) et j’ai été pris. Trois ans plus tard, j’étais transféré en D2, au Lierse, où jouaient des vedettes comme Dany Verlinden ou Gert Verheyen.

En 1992, tu quittes le Lierse où tu as passé cinq ans, pour l’Antwerp. C’était un pas en avant dans ta carrière ?Oui, bien sûr ! À mon époque, l’Antwerp était toujours dans le top 5, tandis que le Lierse était un cran en dessous. J’ai été transféré pour trente-cinq millions de francs belges (environ un million d’euros, ndlr). L’entraîneur Walter Meeuws ne voulait pas faire de gros recrutement, seulement deux joueurs qui seraient titularisés immédiatement. Ces deux joueurs, c’était Francis « Cisse » Severeyns et moi-même.

Et vous partez à la conquête de la C2, puisque le club vient de remporter la Coupe de Belgique. Quel adversaire t’a le plus marqué avant la finale ? Glenavon, l’Admira Wacker, le Steaua Bucarest ou le Spartak Moscou ?L’Admira Wacker, c’était un échec. À l’aller, on est allés gagner 2-4 chez eux. On se voyait déjà au tour suivant, d’autant plus qu’au retour, on menait 2-0 à la mi-temps. Mais en deuxième période, on en a pris quatre. Quatre buts… Heureusement, Ronny Van Rethy a marqué en prolongation, mais 7-6 score final, alors qu’on menait 6-2, il n’y avait aucune raison de se réjouir. On a pris nos douches et on est rentrés chez nous la tête basse. En revanche, le Spartak Moscou en demi-finale, ça, c’était une performance. Il faut savoir que jouer contre eux, ça revenait à jouer contre l’équipe de Russie. Moi, j’étais affecté au marquage de Valeri Karpine, qui a été élu meilleur joueur du championnat d’Espagne quelques années plus tard. Il n’a pas touché un ballon sur les deux rencontres et on s’est qualifiés devant notre public (0-1, 3-1), qui a fait honneur à sa réputation. À Moscou, il y avait 80 000 spectateurs et seulement 13 000 à Anvers, mais ils étaient beaucoup plus bruyants.

C’est donc dans la douleur que vous vous qualifiez pour la finale contre Parme.Au stade de Wembley, c’est pas mal, non ? Mais malheureusement, on a perdu 3-1. Je pourrais refaire le match pendant des heures, mais je retiens juste qu’on n’a pas eu assez de temps pour analyser leur jeu. Les tours précédents, on souffrait au match aller, mais du coup on savait comment réagir au match retour parce qu’on avait une extraordinaire capacité à lire le jeu de l’adversaire. Au bout de cinq minutes, chacun d’entre nous savait quoi faire contre le joueur qui lui avait été affecté. On aurait presque pu jouer sans entraîneur. Mais contre Parme, ils étaient en surnombre. Moi, j’étais affecté au marquage d’Antonio Benarrivo et de Marco Osio, j’ai dû courir vingt kilomètres sur tout le match ! On était complètement acculés en défense et ils en ont profité. Parce qu’ils sont malins, les Italiens, hein ! S’il y avait eu une finale retour, on aurait peut-être pu gagner, qui sait…

Vidéo


Comment s’est passé votre retour à Anvers ?On a été accueillis comme des légendes. C’est simple : aujourd’hui encore, on est toujours des légendes. Les légendes de Wembley 93, les derniers Belges à avoir participé à une finale de Coupe d’Europe. Ça a été une grande fête, qu’on a réitérée vingt ans plus tard, en organisant un match de gala avec des vedettes de la télévision, des joueurs de basket de première division et nous. Un sacré bazar !

En quoi l’Antwerp est vraiment un club à part ?C’est un club qui a un côté anglais, déjà, rien qu’en voyant le stade du Bosuil, avec ses tribunes en bois.

On a été la dernière équipe à jouer avec des poteaux carrés, avant que la Fédération ne nous impose de les remplacer par des poteaux ronds.

On a été la dernière équipe à jouer avec des poteaux carrés, avant que la Fédération ne nous impose de les remplacer par des poteaux ronds. Et ce public… C’est un public très populaire, avec pas mal de supporters qui travaillent sur les docks du port d’Anvers. L’ambiance est complètement folle, ils arrivent à faire plus de bruit qu’au Standard, alors qu’ils sont trois fois moins nombreux.

En 1994, ton contrat se termine et tu joues encore neuf ans dans plusieurs clubs belges, dont Malines et Lommel. L’étranger ne t’a jamais attiré ?Quand j’étais au Lierse, j’ai eu une proposition de Willem II, sauf que je me suis cassé le pied et ça n’a pas abouti. Après coup, je ne voulais plus partir. Pour mes filles, ça voulait dire déménager, quitter leurs copines, trop compliqué. Et puis je ne manquais de rien : une maison, une voiture, de l’argent à la banque, pas besoin d’aller voir ailleurs.

Tu aurais pu découvrir d’autres pays.Découvrir quoi, la Hollande ? Non merci ! J’étais très bien en Belgique. Pour moi, découvrir quelque chose, ç’aurait été d’aller dans le Sud de la France. Le soleil, ça c’est chouette ! Mais c’est joli la Hollande, surtout à la côte en Zélande, c’est plus sauvage que chez nous, il n’y a pas tous ces buildings que tu retrouves de La Panne jusqu’à Knokke.

Comment ta carrière s’est-elle terminée ?En 2003, Lommel faisait faillite (au mois de mars, à onze journées de la fin de la saison, ndlr), mais la Fédération a fait une exception pour que nous retrouvions un club en dehors de la période du mercato. J’avais trente-huit ans, j’étais le vétéran du championnat, je me suis retrouvé au Tempo Overijse, en D4. Ma carrière a pris fin au bout de trois minutes à cause d’une blessure au genou. C’était le bon moment pour arrêter.

Tu n’as jamais envisagé une reconversion dans le milieu du football ?Si, mais… (Il soupire) C’est encore un truc que me reproche mon père. Quand tu es footballeur professionnel, tu peux suivre une formation gratuite pour devenir entraîneur. Mais quand tu ne l’es plus, ça coûte 400 000 francs belges (10 000 euros, ndlr). Quand j’étais joueur, je n’y pensais pas, c’était encore du football, toujours du football, je n’avais pas envie de faire que ça. Mais mon père a peut-être raison, j’aurais dû essayer. Mais c’est trop tard maintenant, j’ai fait d’autres boulots à la place.

Quel genre de boulots ?(Sa femme répond) Il avait travaillé chez un marchand de journaux, à la Poste, même pour une entreprise qui fabriquait des tuyaux. Il devait s’occuper de tester la pression, c’était très dangereux.

Et puis tu as eu des problèmes avec l’alcool, ce que tu n’as jamais caché.Ah, ça…

J’ai divorcé et ça m’a coûté énormément d’argent. En plus, je n’avais plus mes filles, j’enchaînais les boulots et à la fin j’en avais juste marre. Donc j’ai commencé à boire au point de me bousiller le foie.

Dans le même temps, j’ai divorcé et ça m’a coûté énormément d’argent. En plus, je n’avais plus mes filles, j’enchaînais les boulots et à la fin j’en avais juste marre. Donc j’ai commencé à boire au point de me bousiller le foie. Il y a un an et demi, mon médecin m’a dit : « Deux ans comme ça, Didier, et tu ne seras plus de ce monde. » Alors j’ai commencé à arrêter. Il y a un proverbe flamand qui dit quelque chose comme « si tu perds l’espoir, tu ne pourras pas voir ce qu’il y a derrière la colline » . Alors moi, je me suis dit qu’il devait y avoir quelque chose derrière la colline et je suis allé voir ce que je pouvais récupérer : mes enfants, ma santé, ce sera déjà pas mal. Maintenant, je suis bien, je ne bois plus que du Coca et de la Jupiler sans alcool. C’est pas terrible, mais bon, c’est mieux que rien.

Ton café s’appelle ‘t faillissement, la faillite en français. C’est un clin d’œil à tes années à Lommel ?
Non, il s’appelait déjà comme ça quand on l’a repris en… (il interpelle sa femme) Annemie, c’est en quelle année qu’on s’est rencontrés déjà ? (Sa femme répond) « En mars. 2010 » Voilà en 2010. Je savais comment ça fonctionne un café, puisque mes grands-parents en possédaient un à Molenbeek. Quand j’étais plus jeune, je travaillais avec eux le week-end, pour leur donner un coup de main. J’aime bien l’ambiance, on rigole, on croise plein de monde. À l’époque, je servais même le café du matin aux putes qui allaient au travail. Mais aujourd’hui, avec tout l’alcool qu’il y a autour de moi, on ne sait jamais comment ça peut finir. Comme on dit en flamand, il ne faut pas mettre le chat avec le lait. C’est une manière de dire qu’il ne faut pas se laisser tenter. C’est pour ça que je veux partir vite. Normalement en Espagne, à Alicante, quand on aura remis l’affaire. Je connais quelqu’un là-bas qui peut me trouver un boulot pour travailler dans les vergers. Et ma femme parle six langues. Elle pourrait travailler dans n’importe quelle société belge. On sait qu’ils cherchent des gens qui sont multilingues.

D’ici là, tu iras fêter la remontée en D1 avec les supporters le 9 avril ?(Rires) Je ne pense pas, je suis trop occupé avec le café ! Le week-end, il y a des randonneurs, des motards, des cyclistes. Le soir, il y a les agriculteurs du coin qui viennent boire un coup et les jeunes parce qu’ils savent que ça ferme tard. Quand je ferme à deux heures du matin, je suis déjà bien content, donc c’est te dire à quel point ce café me prend comme temps. Pourtant, comme j’ai fait partie de l’équipe qui a terminé finaliste à Wembley, j’ai un abonnement à vie au stade. Mais je ne l’ai jamais utilisé.

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Propos recueillis par Julien Duez, à Duisburg

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